AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par la Caisse des dépôts et consignations, dont le siège est ... (7e), en cassation d'un arrêt rendu le 14 mai 1992 par la cour d'appel de Douai (8e chambre civile), au profit de :
1 / M. Alain Z... et Mme Z..., épouse B..., demeurant 44, La Place à Renescure (Nord),
2 / La Banque Sofinco, dont le siège est ... (8e),
3 / Le CIL, dont le siège est ... (Nord),
4 / Le Cétélem, dont le siège est ..., boîte postale 204 à Lille (Nord),
5 / La société Humez et fils, dont le siège est ... (Nord),
6 / M. André Y..., demeurant route nationale à Renescure (Nord),
7 / La Caisse d'allocations familiales (CAF), dont le siège est ... (Nord),
8 / M. C..., docteur en médecine, demeurant place Stoven à Renescure (Nord),
9 / Le Cofidis, dont le siège est ... (Nord),
10 / M. X..., docteur en médecine, demeurant à Ebblinghem (Nord),
11 / La Trésorerie principale, dont le siège est ... (Nord),
12 / Mme Odette A..., demeurant ... (Nord),
13 / France Télécom, dont le siège est ... (Nord), défendeurs à la cassation ;
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt ;
LA COUR, en l'audience publique du 1er juillet 1993, où étaient présents : M. Grégoire, conseiller le plus ancien faisant fonctions de président, M. Savatier, conseiller référendaire rapporteur, MM. Thierry, Renard-Payen, Lemontey, Forget, Mme Gié, M. Ancel, conseillers, M. Lupi, avocat général, Mlle Ydrac, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. le conseiller référendaire Savatier, les observations de la SCP Gauzès et Ghestin, avocat de la Caisse des dépôts et consignations, les conclusions de M. Lupi, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu que le tribunal d'instance, saisi de la procédure de redressement judiciaire civil des époux Z..., s'est prononcé sur les mesures de redressement de leur situation ; qu'il a notamment décidé de reporter et d'aménager le remboursement, à la Caisse des dépôts et consignations, d'un prêt ayant financé l'acquisition de leur logement ; que l'arrêt attaqué a confirmé le jugement ;
Sur le deuxième moyen, pris en ses deux branches :
Attendu que, dans son dispositif, le jugement n'a ni prévu que les versements à venir s'imputeront d'abord sur le capital, ni réduit à 1 % le taux des intérêts de ce prêt ; que, dès lors, manque en fait le moyen qui reproche à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir prononcé ces mesures ; qu'en aucune de ses branches ce moyen ne peut être accueilli ;
Mais sur le premier moyen :
Vu l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
Attendu que pour débouter la Caisse des dépôts et consignations qui, en cause d'appel, avait notamment réclamé la prise en compte des primes d'assurance, l'arrêt attaqué se borne à énoncer que la caisse "conteste à tort le réaménagement du remboursement du crédit, pratiqué justement par le premier juge dans le cadre des dispositions légales" et que "le disponible pouvant être affecté au remboursement par les débiteurs ne permet pas la modification du plan de redressement sans remise en cause de l'équilibre économique réalisé, de sorte que le jugement doit être confirmé" ;
Attendu qu'en ne se prononçant pas sur la prise en compte des primes d'assurance, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;
Et encore sur le troisième moyen, pris en ses deux branches :
Vu l'alinéa 4, de l'article 12 de la loi du 31 décembre 1989 ;
Attendu qu'aux termes de ce texte, ce n'est qu'en cas de vente forcée du logement principal du débiteur, ou en cas de vente amiable dont le principe, destiné à éviter une saisie immobilière, et les modalités, ont été arrêtés d'un commun accord entre le débiteur et l'établissement de crédit, que le juge a la faculté, par décision spéciale et motivée, de réduire, dans la proportion prévue par ce texte, le montant de la fraction restant due aux établissements de crédit après la vente ;
Attendu qu'en confirmant le jugement, l'arrêt attaqué a décidé que, "dans l'hypothèse où les époux Z... décideraient de poursuivre la réalisation de l'immeuble financé à l'aide du prêt, la Caisse des dépôts et consignations ne pourra pas exiger des époux Z... plus du quart des sommes restant dues à l'issue de cette vente" ;
Attendu, cependant, qu'en prononçant une telle réduction de la créance de l'organisme prêteur à un moment où ne pouvait être vérifié le caractère de la vente au regard des conditions exigées par le texte susvisé, la cour d'appel a violé celui-ci ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 14 mai 1992, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ;
remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Douai, autrement composée ;
Condamne les défendeurs, envers la Caisse des dépôts et consignations, aux dépens et aux frais d'exécution du présent arrêt ;
Ordonne qu'à la diligence de M. le procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit sur les registres de la cour d'appel de Douai, en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par M. le président en son audience publique du vingt-sept octobre mil neuf cent quatre vingt treize.