AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par la compagnie d'assurances Union des assurances de Paris (UAP), dont le siège est ... (1er), en cassation d'un jugement rendu le 23 mai 1990 par le tribunal d'instance de Limoges, au profit :
1 ) de la société Lim tour voyages, dont le siège est ... (Haute-Vienne),
2 ) de la société anonyme Transtours, dont le siège est ... (1er),
3 ) de Mme Yvette Y..., demeurant ... (Haute-Vienne),
4 ) de M. Armand X..., demeurant ... (Haute-Vienne), défendeurs à la cassation ;
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt ;
LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 30 juin 1993, où étaient présents : M. Grégoire, conseiller le plus ancien faisant fonctions de président, M. Thierry, conseiller rapporteur, M. Renard-Payen, conseiller, M. Lupi, avocat général, Mlle Ydrac, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. le conseiller Thierry, les observations de la SCP Célice et Blancpain, avocat de la compagnie d'assurances UAP, les conclusions de M. Lupi, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Donne défaut contre les sociétés Lim tour voyages et Transtours, Mme Y... et M. X... ;
Sur le premier moyen, pris en sa première branche :
Vu l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
Attendu que M. X... et Mme Y... ont acheté à la société Lim tour voyages, pour la somme de 20 000 francs chacun, des billets leur permettant de participer, du 11 au 27 octobre 1988, sur le navire "Chota Roustavelli", à une croisière en Méditerranée organisée par la société Transtours ; que, le 14 octobre 1988, un incendie s'est déclaré à bord, lequel a provoqué une modification de cette croisière, qui s'est trouvée amputée des escales de Sicile, de Grèce, de Chypre et d'Egypte ; que M. X... et Mme Y... ont alors assigné l'agence Lim tour voyages en paiement d'une somme de 10 000 francs chacun, à titre de remboursement de la partie de croisière non effectuée ; que Lim tour voyages a mis en cause Transtours, qui a appelé en garantie l'UAP, son assureur ;
Attendu que, pour condamner la société Transtours à verser à M. X... et à Mme Y... la somme de 7 000 francs chacun, et l'UAP à relever et à garantir cette société à concurrence de 90 % de ces sommes, le jugement attaqué se borne à énoncer que l'offre d'une réduction de 20 % sur le prix d'une autre croisière maritime ne conforte pas la thèse de l'affréteur tendant à l'exonération de toute responsabilité, en raison du cas fortuit ou de la force majeure ;
Attendu qu'en statuant ainsi, sans répondre aux conclusions de la société Transtours et de l'UAP, selon lesquelles l'article 11 des conditions générales du billet de croisière écartait toute responsabilité du transporteur en cas d'interruption du voyage causée par un incendie, le tribunal d'instance a violé le texte susvisé ;
Et sur la deuxième branche du même moyen :
Vu l'article 48 de la loi du 18 juin 1966 ;
Attendu que le manquement à l'une de ses obligations engage la responsabilité de l'organisateur de croisières, sauf si celui-ci établit qu'il s'agit de l'exécution du contrat de transport proprement dit ;
Attendu que, pour retenir la responsabilité de la société Transtours garantie par l'UAP, le jugement attaqué énonce encore "que l'incendie, qui s'est déroulé à bord du Chota Roustavelli, constituait à vrai dire un risque prévisible qu'il appartenait à l'affréteur de prendre en compte pour en limiter les conséquences" ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi, alors qu'il ressortait des constatations de l'arrêt que la société Transtours n'était pas une compagnie de transports maritime, mais un organisateur de voyages, le Tribunal a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, le jugement rendu le 23 mai 1990, entre les parties, par le tribunal d'instance de Limoges ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le tribunal d'instance de Poitiers ;
Condamne les défendeurs, envers la compagnie d'assurances UAP, aux dépens et aux frais d'exécution du présent arrêt ;
Ordonne qu'à la diligence de M. le procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit sur les registres du tribunal d'instance de Limoges, en marge ou à la suite du jugement annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par M. le président en son audience publique du vingt sept octobre mil neuf cent quatre vingt treize.