AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par M. Jean-Pierre X..., demeurant ... (Charente), agissant en sa qualité de syndic de la liquidation des biens de la Société d'exploitation des établissements Marcel Y... (SEMP), en cassation d'un arrêt rendu le 17 septembre 1991 par la cour d'appel de Bordeaux (2e Chambre, Section A), au profit :
1 ) de M. Jacques Y..., demeurant ... (Charente),
2 ) de M. Michel Y..., demeurant ... (Charente), défendeurs à la cassation ;
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 15 juin 1993, où étaient présents : M. Bézard, président, M. Rémery, conseiller référendaire rapporteur, Mme Pasturel, conseiller, M. Curti, avocat général, Mme Arnoux, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. le conseiller référendaire Rémery, les observations de Me Brouchot, avocat de M. X... ès qualités, de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de M. Jacques Y..., les conclusions de M. Curti, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu les articles 238, alinéa 2, et 24O de la loi du 25 janvier 1985 ;
Attendu que, selon l'arrêt attaqué, après la mise en liquidation des biens de la Société d'exploitation des établissements Marcel Y... (la SEMP), prononcée le 19 septembre 1985, le syndic a assigné MM. Jacques et Michel Y..., le premier en qualité de gérant et le second en tant que dirigeant de fait, en paiement des dettes sociales sur le fondement de l'article 99 de la loi du 13 juillet 1967 ;
Attendu que, pour rejeter cette demande, l'arrêt retient que "la loi de 1985, en renversant la charge de la preuve des fautes de gestion ne permet plus de présumer, comme sous l'empire de la loi de 1967, une mauvaise gestion dès qu'il y a dépôt de bilan", et que, faute pour lui de fournir les documents permettant d'apprécier la gestion de la SEMP, le syndic ne rapporte pas la preuve de fautes pouvant justifier son action ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors qu'il résulte de ses articles 238 et 240 que la loi du 25 janvier 1985, qui a abrogé l'article 99 de la loi du 13 juillet 1967, n'est applicable qu'aux procédures ouvertes depuis le 1er janvier 1986, de sorte que cette dernière disposition, dépourvue de caractère répressif, demeurait applicable en l'espèce, la cour d'appel a violé par fausse application les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 17 septembre 1991, entre les parties, par la cour d'appel de Bordeaux ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Poitiers ;
Condamne les consorts Y..., envers M. X... ès qualités, aux dépens et aux frais d'exécution du présent arrêt ;
Ordonne qu'à la diligence de M. le procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit sur les registres de la cour d'appel de Bordeaux, en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par M. le président en son audience publique du dix neuf octobre mil neuf cent quatre vingt treize.