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19/10/1993 | FRANCE | N°91-10250

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 19 octobre 1993, 91-10250


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par :

1 / La société Pepsico Inc., société de droit américain dont le siège est à Purchase 10577 New-York (USA),

2 / La société Pepsi-Cola de France, société à responsabilité limitée dont le siège social est ... (8e), en cassation d'une ordonnance de référé rendue le 18 décembre 1990 par le premier président de la cour d'appel de Paris, au profit de :

1 / La société Perrier, société anonyme don

t le siège social est ... (Gard),

2 / La société SFBG, Compagnie française de boissons gazeuses, dont ...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par :

1 / La société Pepsico Inc., société de droit américain dont le siège est à Purchase 10577 New-York (USA),

2 / La société Pepsi-Cola de France, société à responsabilité limitée dont le siège social est ... (8e), en cassation d'une ordonnance de référé rendue le 18 décembre 1990 par le premier président de la cour d'appel de Paris, au profit de :

1 / La société Perrier, société anonyme dont le siège social est ... (Gard),

2 / La société SFBG, Compagnie française de boissons gazeuses, dont le siège social est ... (8e),

3 / La SGG, Société générale des grandes sources d'eaux minérales françaises, dont le siège social est ... (8e),

4 / Le Comité central d'entreprise (CCE) de la Société générale des grandes eaux minérales françaises (SGGSEMF), dont le siège social est ... (8e),

5 / Le Comité d'établissement de la Source Perrier, établissement de la SGGSEMF, dont le siège social est à Vergèze (Gard),

6 / Le syndicat des employés et ouvriers des Sources Perrier (CGT), dont le siège social est à Vergèze (Gard), défendeurs à la cassation ;

Les demanderesses invoquent, à l'appui de leur pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

LA COUR, en l'audience publique du 15 juin 1993, où étaient présents : M. Bézard, président, M. Le Dauphin, conseiller référendaire rapporteur, Mme Pasturel, MM. Edin, Grimaldi, Apollis, Mme Clavery, MM. Lassalle, Tricot, conseillers, M. Rémery, conseiller référendaire, M. Curti, avocat général, Mme Arnoux, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. le conseiller référendaire Le Dauphin, les observations de Me Choucroy, avocat des sociétés Pepsico Inc. et Pepsi-Cola de France, de la SCP Delaporte et Briard, avocat de la société Perrier, de la Compagnie française de boissons gazeuses (SFBG) et de la Société générale des grandes sources d'eaux minérales françaises (SGG), de la SCP Masse-Dessen, Georges et Thouvenin, avocat du Comité central d'entreprise CCE de la Société générale des grandes sources d'eaux minérales françaises (SGGSEMF), du Comité d'établissement de la Source Perrier et du Syndicat des employés et ouvriers des Sources Perrier, les conclusions de M. Curti, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Attendu, selon l'ordonnance attaquée (premier président de la cour d'appel de Paris, 18 décembre 1990), que la société Pepsi-Cola company devenue Pepsico INC (société Pepsico) a conclu avec la société Compagnie française de boissons gazeuses (société CFBG) un contrat dénommé "EBA", par lequel elle lui a confié, pour une durée de soixante ans, l'exclusivité de l'embouteillage et de la distribution de la boisson Pepsi-Cola sur les territoires français et monégasque ; que le bénéfice du contrat a ensuite été transféré à la société Perrier ; que la Société générale des grandes sources d'eaux minérales françaises (société SGG), filiale de la société Perrier, a participé à son exécution ;

que, le 31 octobre 1989, la société Pepsico a unilatéralement résilié le contrat, avec effet au 31 décembre 1990 ; que les sociétés CFBG, Perrier et SGG ont assigné la société Pepsico ainsi que la société Pepsi- Cola France (les sociétés Pepsico) afin de faire juger que, la résiliation n'étant pas justifiée, le contrat devait continuer à produire ses effets ; que, par jugement du 2 novembre 1990, assorti de l'exécution provisoire, le tribunal de commerce, "sans statuer sur la responsabilité de cette résiliation", a constaté qu'à la date du 31 décembre 1990 le contrat EBA cessera ses effets entre les parties ; que les sociétés CFBG, Perrier et SGG ont demandé au premier président d'arrêter l'exécution provisoire de ce jugement ; que le syndicat des employés et des ouvriers des Sources Perrier (CGT), le comité central d'entreprise de la société SGG et le comité d'établissement de la Source Perrier sont intervenus au soutien de la demande ;

Sur le premier moyen, pris en ses trois branches, et sur le second moyen, pris en ses deux branches, réunis :

Attendu que les sociétés Pepsico font grief à l'ordonnance d'avoir accueilli la demande, alors, selon le pourvoi, d'une part, qu'il résultait des motifs de fond du jugement à exécuter que la cessation des rapports contractuels au 31 décembre 1990 était, en fait et en droit, consommé et irréversible ; qu'à cet égard, les premiers juges avaient constaté la gravité des griefs accumulés, ce qui s'opposait à la poursuite d'un contrat dans l'intérêt commun des deux partenaires ; que, par ailleurs, les dispositions de l'article 1142 du Code civil interdisaient de contraindre les parties à continuer d'exécuter le contrat au-delà du préavis fixé ; que le tribunal avait conclu qu'"obliger les parties à poursuivre l'EBA serait donc une mesure inefficace et inopérante en l'espèce", et que, "en tout état de cause, le problème serait résolu par l'octroi de dommages-intérêts, dans un sens ou dans l'autre" ;

qu'il en résultait que l'exécution provisoire du jugement, qui s'imposait au regard de ces motifs de fond, était sans conséquence sur les parties, si bien que le premier président, en arrêtant néanmoins l'exécution provisoire, a, en réformant les motifs de fond du jugement attaqué, méconnu le domaine d'application de l'article 524 du nouveau Code de procédure civile, a, en n'opposant aucune réfutation à ces motifs et aux conclusions des sociétés Pepsico, tirés du caractère irréversible en fait et en droit de la rupture des relations contractuelles, entaché sa décision d'un défaut de réponse aux conclusions, violant l'article 455 du nouveau Code de procédure civile et n'a pas, en arrêtant l'exécution provisoire, en

l'absence de toute conséquence matérielle effective sur la situation des parties, justifié légalement sa décision au regard de l'article 524 du nouveau Code de procédure civile ; alors que, d'autre part, en se bornant à faire état de "conséquences irréversibles" sur le plan social, sans constater que l'exécution provisoire risquait d'avoir des "conséquences manifestement excessives", le premier président n'a pas justifié légalement sa décision au regard de l'article 524 du nouveau Code de procédure civile ; et alors, enfin, que la société Pepsi-Cola avait fait valoir que la question sociale posée par la résiliation, qui était de toute façon inéluctable en l'état de la cessation de fait de relations contractuelles viables et qui concernait moins de 1 % du personnel d'une société de l'importance de Perrier, avait été posée avec préavis de quatorze mois, ce qui avait laissé à Perrier la possibilité d'envisager sur le plan social toutes les nécessaires reconversions et solutions ;

qu'elle avait ajouté que si la société Perrier avait fait preuve de la plus totale inertie en la matière, c'était dans le but d'utiliser le dossier social comme moyen de chantage pour monnayer au prix fort la cessation des rapports contractuels, dont elle avait pris elle-même, en réalité, l'initiative en vendant en juin 1990 tout son secteur Soft-drinks à Cadbury Schweppes ; qu'en se bornant, pour tous moyens et réponse, à énoncer que le préavis de quatorze mois n'était pas de nature à supprimer les conséquences irréversibles sur le plan social de la résiliation, sans procéder à aucune constatation de nature à établir que l'exécution provisoire risquait d'entraîner sur le plan social, compte tenu des facultés de la société Perrier et de la société Pepsi-Cola, des conséquences manifestement excessives, le premier président n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 524 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu qu'après avoir exactement énoncé qu'il ne lui appartenait pas de statuer sur les mérites de l'appel formé contre le jugement du 2 novembre 1990, le premier président retient que si la société Pepsi-Cola France a, lors de l'audience, proposé à la société Perrier de continuer à assurer l'embouteillage du produit pendant six mois pour lui permettre de préparer la reconversion du personnel affecté à cette tâche, les représentants des salariés ont "à bon droit" fait observer en réplique que cette "proposition de sous-traitance temporaire" n'était pas de nature à supprimer les conséquences irréversibles qu'entraînerait sur le plan social la résiliation de l'EBA ; qu'ayant ainsi constaté, dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation, par des motifs qui répondent aux conclusions invoquées, que l'exécution provisoire du jugement risquait d'entraîner des conséquences manifestement excessives, le premier président n'a fait qu'user des pouvoirs qu'il tient de l'article 524 du nouveau Code de procédure civile en se prononçant comme il a fait ; que les moyens ne sont fondés en aucune de leurs branches ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne les sociétés Pepsico Inc. et Pepsi-Cola de France, envers les défendeurs, aux dépens et aux frais d'exécution du présent arrêt ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par M. le président en son audience publique du dix-neuf octobre mil neuf cent quatre vingt treize.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 91-10250
Date de la décision : 19/10/1993
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

EXECUTION PROVISOIRE - Suspension - Jugement frappé d'appel - Exécution entraînant des conséquences manifestement excessives - Constatations suffisantes.


Références :

Nouveau code de procédure civile 524

Décision attaquée : Premier Président de la cour d'appel de Paris, 18 décembre 1990


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 19 oct. 1993, pourvoi n°91-10250


Composition du Tribunal
Président : Président : M. BEZARD

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1993:91.10250
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