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12/10/1993 | FRANCE | N°91-17738

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 12 octobre 1993, 91-17738


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par :

1 / la société à responsabilité limitée Galliéni, dont le siège est ... à Neuilly-Plaisance (Seine-Saint-Denis),

2 / la société à responsabilité limitée Astorg, société en liquidation amiable, représentée par M. Claude Alix, son gérant liquidateur, demeurant en cette qualité ... à Neuilly-Plaisance (Seine-Saint-Denis),

3 / M. Claude X..., demeurant ... à Neuilly-Plaisance (Seine-Saint-Denis)

, en cassation d'un arrêt rendu le 1er juillet 1991 par la cour d'appel de Paris (4ème chambre, sect...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par :

1 / la société à responsabilité limitée Galliéni, dont le siège est ... à Neuilly-Plaisance (Seine-Saint-Denis),

2 / la société à responsabilité limitée Astorg, société en liquidation amiable, représentée par M. Claude Alix, son gérant liquidateur, demeurant en cette qualité ... à Neuilly-Plaisance (Seine-Saint-Denis),

3 / M. Claude X..., demeurant ... à Neuilly-Plaisance (Seine-Saint-Denis), en cassation d'un arrêt rendu le 1er juillet 1991 par la cour d'appel de Paris (4ème chambre, section A), au profit de Mme Suzanne Z..., demeurant ... à Neuilly-Plaisance (Seine-Saint-Denis), défenderesse à la cassation ;

Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, les cinq moyens de cassation annexés au présent arrêt :

LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 8 juin 1993, où étaient présents : M. Bézard, président, M. Gomez, conseiller rapporteur, M. Nicot, conseiller, Mme Piniot, avocat général, Mme Arnoux, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. le conseiller Gomez, les observations de la SCP Lesourd et Baudin, avocat de la société Galliéni, de la société Astorg et de M. Alix, de Me Vuitton, avocat de Mme Z..., les conclusions de Mme Piniot, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, (Paris, 1er juillet 1991) que Mme Z..., propriétaire d'un fonds de commerce de transactions immobilières, commerciales et industrielles, sis ..., désigné par l'appellation "cabinet Z..." a, après avoir dénoncé le contrat de location gérance accordé à la société Astorg, ayant pour gérant M. Alix, qui l'exploitait sous l'appellation "cabinet Galliéni", donné le fonds en location gérance à la société Cati ; qu'à l'occasion de difficultés survenues entre l'ancien et le nouveau locataires, un huissier, désigné par le juge des référés, a constaté que sur quatre-vingt clients du cabinet Z..., devenus clients de la société Astorg, vingt-quatre avaient dénoncé leur contrat et cinquante-six autres n'avaient pas renouvelé leur mandat de gestion ; que Mme Y... et Mme B..., salariées de la société Astorg, avaient, avec le concours d'autres personnes, racheté les parts de la société Cabinet Galliéni, exploitant au ... les activités d'agence immobilière, administrateur de biens et gérance d'immeubles ; que, de plus, deux anciens salariés de la société Astorg avaient été engagés par la société Cabinet Galliéni, que Mme Z... et la société Cati ont assigné la société Astorg, le cabinet Galliéni, M. Alix et Mme Y... pour violation de la clause de non-concurrence contenue dans le contrat de location gérance de la société Astorg et pour concurrence déloyale ;

Sur le deuxième moyen, qui est préalable, pris en ses trois branches :

Attendu que la société Gallieni fait grief à l'arrêt de l'avoir condamnée in solidum avec M. Alix et la société Astorg au paiement de dommages et intérêts à Mme Z... en réparation du préjudice causé par des actes de concurrence déloyale alors, selon le pourvoi, d'une part, qu'il appartenait à Mme Z..., demanderese à l'instance, de démontrer que l'activité de gérance et d'administration de biens était incluse dans l'objet du contrat de location-gérance consenti le 1er juillet 1970, d'où il suit qu'en reprochant à la société Astorg, à elle-même et à M. Alix de ne pas justifier de la création de toutes pièces d'un tel fonds postérieurement à la signature dudit contrat de location, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et violé l'article 1315 du Code civil ; alors, d'autre part, qu'il résultait des énonciations claires et précises du contrat de location-gérance, rédigé de surcroît par un notaire, que le fonds donné en location consistait seulement en un "cabinet de transactions immobilières commerciales et industrielles", d'où il suit que la cour d'appel a dénaturé l'objet dudit contrat en y incluant les activités de gérance et d'administration de biens ; alors, enfin, que pour les mêmes motifs l'arrêt a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile en s'abstenant de répondre au chef des conclusions d'elle-même, de la société Astorg et de M. Alix, qui avaient fait valoir que la signature du contrat de location-gérance étant postérieure à l'entrée en vigueur de la loi du 2 janvier 1970 qui distingue les activités de transactions immobilières et celles relatives à la gestion et l'administration de biens, le notaire rédacteur du contrat de location n'aurait pas manqué de préciser l'inclusion de l'activité de gérance si tel avait été l'objet de la convention des parties ;

Mais attendu que l'arrêt retient qu'il résultait des engagements de location, des procurations ou des mandats de gestion ainsi que des comptes de gérance, produits aux débats par Mme Z..., que le fonds, exploité par le cabinet Z..., avait eu, pour activité, tant la gérance d'immeubles que l'administration de biens et les transactions immobilières ; que de ces constatations et appréciations, la cour d'appel a déduit que la société Astorg n'avait fait que reprendre ses activités et ne les avaient pas créées, contrairement à ce qu'elle soutenait ; qu'ainsi, sans inverser la charge de la preuve et sans dénaturer l'objet du contrat, la cour d'appel a répondu, en les rejetant, aux conclusions prétendument délaissées ; d'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

Sur le premier moyen, pris en ses trois branches :

Attendu que la société Galliéni reproche encore à l'arrêt de l'avoir condamnée in solidum avec M. Alix et la société Astorg au paiement de dommages et intérêts à Mme Z... en réparation du préjudice causé par des actes de concurrence déloyale alors, selon le pourvoi, d'une part, qu'en étendant à M. Alix à titre personnel l'obligation de non-concurrence souscrite contractuellement par la seule bénéficiaire du contrat de location-gérance, la société Astorg, société commerciale ayant une personnalité morale distincte de celle de son représentant légal au surplus non-associé, l'arrêt a dénaturé la clause conventionnelle litigieuse, au mépris de l'article 1134 du Code civil, alors, d'autre part, que l'arrêt a pour les mêmes motifs, violé l'article 5 de la loi du 24 juillet 1966 ; et alors, enfin, que l'arrêt a pour les mêmes motifs, violé l'article 1165 du Code civil ;

Mais attendu qu'après avoir constaté que la clause de non-concurrence, inscrite au contrat de location-gérance, prévoyait que, pendant toute la durée du bail, le locataire-gérant ne pourrait pas s'intéresser directement ou indirectement, à quelque titre que ce soit,à l'exploitation d'un fonds de même nature que celui donné à bail ou s'en rapprochant et que la même interdiction, limitée dans le temps à une durée de trois années et dans l'espace à un rayon de quatre kilomètres, s'appliquait à partir de la cessation du bail, l'arrêt retient que M. Alix gérant salarié de la société Astorg, était le seul détenteur de la carte professionnelle ; qu'en déduisant hors toute dénaturation de ces constatations et appréciations que, bien que ne détenant aucune part dans la société Astorg, il en était le dirigeant et qu'en cette qualité, la clause de non-concurrence, dont il ne pouvait pas ignorer l'existence, lui était opposable, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;

d'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

Sur le troisième moyen, pris en ses trois branches :

Attendu que la société Galliéni fait de plus grief à l'arrêt, de l'avoir condamnée in solidum avec M. Alix et la société Astorg au paiement de dommages et intérêts à Mme Z... en réparation du préjudice causé par des actes de concurrence déloyale alors, selon le pourvoi, d'une part, que la cour d'appel a dénaturé le procès-verbal de constat du 20 février 1989 dont aucune des énonciations n'établit que seule l'intervention de Me A... a permis la remise des divers documents cités par l'arrêt ; alors, d'autre part, que modifie les termes du litige et se fonde sur un fait qui n'est pas dans le débat en violation des articles 4 et 7 du nouveau Code de procédure civile, la cour d'appel, qui reproche à la société Astorg d'avoir conservé pendant plus de six mois par devers elle, les divers documents énumérés par l'arrêt dès lors, que du propre aveu de Mme Z... "dans une lettre du 20 mai 1988" (antérieure par conséquent à la date d'expiration du contrat de location-gérance) M. Alix est revenu sur son refus antérieur constaté la veille, 19 mai 1988, et a été "disposé à laisser consulter "tous les documents, y compris les mandats de gestion, ce qui a annulé ses réponses faites dans la sommation interpellative du 19 mai 1988" ; alors, enfin, que manque de base légale au regard de l'article 1134 du Code civil l'arrêt qui retient la responsabilité contractuelle de la société Astorg sans constater l'existence d'une

violation par cette société de la clause de non-concurrence invoquée par la demanderesse à l'action savoir Mme Z..., et celle d'un préjudice personnellement subi par cette dernière ;

Mais attendu, en premier lieu, que la cour d'appel a relevé qu'il résultait du procès verbal dressé par Puybaraud, huissier de justice le 20 février 1989, que seule l'intervention de cet officier ministériel avait conduit M. Alix à remettre à ce dernier les registres comptables, les registres répertoires des années 1973 à 1988, les cinq registres de transactions, les livres de commerce, un dossier comprenant l'ensemble des mandats donnés à la société Astorg et vingt-sept lettres de résiliation de mandats de propriétaires ;

que c'est hors toute dénaturation et sans modifier l'objet du litige, que la cour d'appel a retenu que les documents nécessaires à la gestion du cabinet Cati, n'avaient été restitués qu'après l'intervention de l'huissier ;

Attendu, en second lieu, que l'arrêt retient que le fonds de commerce, donné en location-gérance au cabinet Cati et la clientèle qui lui était attachée, appartenaient à Mme Z... qui, seule, pouvait intenter une action en concurrence déloyale et aussi que les documents nécessaires à la gestion du cabinet Cati avaient été indûment conservés par la société Astorg pendant plus de six mois ;

que la cour d'appel a pu décider que ces faits étaient constitutifs d'un comportement fautif caractérisant la concurrence déloyale de la société Astorg envers Mme Z... ;

D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

Sur le quatrième moyen, pris en ses deux branches :

Attendu que la société Galliéni fait en outre grief à l'arrêt de l'avoir condamnée in solidum avec M. Alix et la société Astorg au paiement de dommages et intérêts à Mme Z... en réparation du préjudice causé par des actes de concurrence déloyale alors, selon le pourvoi, d'une part, que ne déduit pas de ses propres constatations les conséquences légales qui en découlent et viole l'article 1134 du Code civil, la cour d'appel qui reproche à M. Alix d'avoir laissé accroire à la clientèle que la société Astorg ne serait pas remplacée par un autre locataire-gérant, après avoir formellement reconnu d'un autre côté, que dès le 1er juin 1988, Mme Z... avait elle-même envoyé à ses clients une lettre circulaire annonçant le changement de direction du cabinet immobilier ; alors, d'autre part, que manque de base légale au regard de l'article 1134 du Code civil, l'arrêt qui s'abstient de rechercher en quoi la prétendue faute imputée à M. Alix constituerait la violation de la clause contractuelle de non-concurrence par laquelle il s'était interdit "de s'intéresser directement ou indirectement à "l'exploitation d'un fonds de commerce de même nature" que celui objet du contrat de location-gérance ;

Mais attendu que l'arrêt constate que M. Alix s'était volontairement abstenu d'indiquer à certains clients du cabinet Z..., que la société Astorg serait remplacée par le cabinet Cati et leur avait ainsi laissé croire que la société Astorg n'aurait pas de successeur tout en leur demandant de le "contacter personnellement" à la suite du non-renouvellement du contrat de location gérance ; que la cour d'appel, qui avait retenu que la clause de non-concurrence était opposable à M. Alix, a légalement justifié sa décision en décidant que ces faits caractérisaient, de la part de M. Alix, une faute de concurrence déloyale à l'encontre de Mme Z... ; d'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

Sur le cinquième moyen, pris en ses deux branches :

Attendu que la société Galliéni reproche enfin à l'arrêt de l'avoir condamnée in solidum avec M. Alix et la société Astorg au paiement de dommages et intérêts à Mme Z... en réparation du préjudice causé par des actes de concurrence déloyale alors, selon le pourvoi, d'une part, que la rétention fautive des registres imputée par l'arrêt à M. Alix, ès qualités de représentant légal de la société Astorg, n'étant ni matériellement établi ni valablement caractérisée, la censure s'impose par voie de conséquence en vertu de l'article 624 du nouveau Code de procédure civile ; alors, d'autre part, que manque de base légale au regard de l'article 1382 du Code civil l'arrêt qui retient la responsabilité délictuelle de la société Galliéni sans établir que cette société aurait été complice de la violation par M. Alix à titre personnel de son engagement contractuel de non-concurrence ;

Mais attendu que l'arrêt retient que l'huissier avait trouvé au cabinet Galliéni une liste de quatre-vingts propriétaires, anciens clients du cabinet Z..., tandis que seuls vingt-quatre d'entre eux avaient effectivement résilié leur contrat de gestion et que les immeubles des cinquante-six autres avaient été gérés par la société Galliéni qui était en possession des registres indûment retenus par elle ; que la cour d'appel a pu déduire de ces constatations et appréciations que la société Galliéni avait commis un détournement de clientèle et caractériser à son encontre une faute de concurrence déloyale ; d'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne les demandeurs, envers Mme Z..., aux dépens et aux frais d'exécution du présent arrêt ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par M. le président en son audience publique du douze octobre mil neuf cent quatre vingt treize.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 91-17738
Date de la décision : 12/10/1993
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris (4ème chambre, section A), 01 juillet 1991


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 12 oct. 1993, pourvoi n°91-17738


Composition du Tribunal
Président : Président : M. BEZARD

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1993:91.17738
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