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05/10/1993 | FRANCE | N°91-11034

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 05 octobre 1993, 91-11034


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par la société anonyme Disco Gros-Centre, dont le siège social est ... (Essonne), Paray Vieille Poste, en cassation d'un arrêt rendu le 28 novembre 1990 par la cour d'appel de Poitiers (chambre civile, 2e section), au profit de :

1 / M. Aimé X..., pris en sa qualité de mandataire-liquidateur de la liquidation judiciaire de la SARL Sogail, demeurant en cette qualité ... (Corrèze),

2 / Mme Liliane Z..., veuve Y..., dem

eurant ... (Corrèze), défendeurs à la cassation ;

La demanderesse invoque, à l'a...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par la société anonyme Disco Gros-Centre, dont le siège social est ... (Essonne), Paray Vieille Poste, en cassation d'un arrêt rendu le 28 novembre 1990 par la cour d'appel de Poitiers (chambre civile, 2e section), au profit de :

1 / M. Aimé X..., pris en sa qualité de mandataire-liquidateur de la liquidation judiciaire de la SARL Sogail, demeurant en cette qualité ... (Corrèze),

2 / Mme Liliane Z..., veuve Y..., demeurant ... (Corrèze), défendeurs à la cassation ;

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

LA COUR, en l'audience publique du 1er juin 1993, où étaient présents : M. Bézard, président, M. Tricot, conseiller rapporteur, Mme Pasturel, MM. Edin, Grimaldi, Apollis, Mme Clavery, M. Lassalle, conseillers, MM. Le Dauphin, Rémery, conseillers référendaires, M. de Gouttes, avocat général, Mme Arnoux, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. le conseiller Tricot, les observations de Me Guinard, avocat de la société Disco Gros-Centre, de Me Choucroy, avocat de M. X..., ès qualités, de la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, avocat de Mme Y..., les conclusions de M. de Gouttes, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Attendu, selon l'arrêt déféré (Poitiers, 28 novembre 1990), que la société SOGAIL (la SOGAIL), représentée par son gérant, M. Serge Y..., a conclu avec la société Disco Gros-Centre (société Disco) un contrat dit d'affiliation qui lui donnait le droit d'utiliser l'enseigne "Timy", propriété de la société Disco, ainsi que divers services techniques de cette société pour l'exploitation d'un magasin d'alimentation à Brive ; qu'en contrepartie, la SOGAIL était tenue de s'approvisionner prioritairement auprès de la société Disco et de se conformer à la politique commerciale définie par elle ; que la conclusion de ce contrat avait été précédée d'études de marché et d'analyses d'exploitation réalisées par la société Disco et facturées à la SOGAIL ; que l'exploitation du magasin s'est révélée déficitaire ; qu'après la mort du gérant de la SOGAIL, sa veuve, agissant tant en qualité de gérante qu'à titre personnel et au nom de son fils mineur, a signé avec la société Disco et un tiers, M. Yvon Y..., "un protocole d'accord" qui, tout en maintenant les engagements de caution qu'elle avait contractés ainsi que ceux de son fils, portait promesse de vente, au prix de un franc, des parts sociales de la SOGAIL à M. Yvon Y... à l'issue du contrat de location-gérance du fonds de commerce qui lui était consenti ; que M. Yvon Y... ayant renoncé tant à la poursuite de la location-gérance qu'à l'achat des parts sociales, la SOGAIL a été mise en redressement puis en liquidation judiciaires ; que la cour d'appel a condamné la société Disco à payer à M. X..., liquidateur judiciaire de la SOGAIL, la somme de 1 000 000 de francs en réparation du préjudice causé par l'erreur commise dans les prévisions et par le retard que son intervention a causé dans l'ouverture de la procédure collective ; que la cour d'appel a, en outre, condamné la société Disco, d'un côté, à payer à Mme Y...,

la somme de 200 000 francs en réparation du préjudice moral causé par la mort de son mari et, d'un autre côté, à la garantir, ainsi que son fils, de leurs engagements de caution dans la proportion des deux tiers de leur montant ;

Sur le premier moyen, pris en ses deux branches :

Attendu que la société Disco fait grief à l'arrêt d'avoir ainsi statué, alors, selon le pourvoi, d'une part, qu'en décidant que les dispositions du "protocole d'accord" étaient devenues caduques, aux motifs que M. Yvon Y... n'avait pas levé l'option d'achat des parts sociales de la SOGAIL et que l'engagement de la société Disco était subordonné à la "condition suspensive de la réalisation complète des dispositions contenues dans le présent protocole d'accord", et donc de la levée d'option, après avoir relevé que M. Yvon Y... disposait d'une simple "faculté d'option", ce dont il résultait qu'il n'était nullement tenu d'acquérir lesdites parts et que la validité du protocole d'accord ne pouvait être subordonnée à cette levée d'option, la cour d'appel a violé les articles 1134 et 2044 et suivants du Code civil ; et alors, d'autre part, que seul le tribunal saisi de la procédure de redressement judiciaire peut connaître d'une action en nullité des actes faits par le débiteur postérieurement à la date de cessation des paiements, exercée sur le fondement de l'article 107 de la loi du 25 janvier 1985 ; qu'en prononçant, néanmoins, la nullité du protocole d'accord du 3 juillet 1986, en application de ce texte, après avoir constaté que le tribunal saisi de la procédure de redressement judiciaire à l'encontre de la SOGAIL était le tribunal de Brive, et qu'elle statuait sur l'appel d'un jugement rendu par le tribunal de commerce de Poitiers, la cour d'appel a excédé ses pouvoirs, en violation des articles 174 du décret du 27 décembre 1985 et 107 de la loi du 25 janvier 1985 ;

Mais attendu que la cour d'appel a retenu, par une interprétation que l'ambiguïté du "protocole d'accord" rendait nécessaire, que toutes ses dispositions étaient devenues caduques dès lors que la condition suspensive, tirée de la levée, par M. Yvon Y..., de l'option qui lui était offerte pour l'acquisition des parts sociales, ne s'était pas réalisée ; que par ces seuls motifs, elle a légalement justifié sa décision ; que le moyen ne peut être accueilli en aucune de ses branches ;

Sur le second moyen, pris en ses quatre branches :

Attendu que la société Disco fait encore grief à l'arrêt d'avoir statué comme il a fait, alors, selon le pourvoi, d'une part, qu'en s'abstenant de préciser, comme elle y était invitée, en quoi les époux Y..., dont il n'était pas contesté qu'ils avaient une expérience importante dans le domaine de la distribution de produits alimentaires en magasin à grande surface, n'auraient pas eu les éléments nécessaires pour contrôler le sérieux des prévisions de la société Disco, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1382 et 1383 du Code civil ; alors, d'autre part, qu'en relevant d'office le moyen tiré de ce que la société Disco avait commis une faute en ne provoquant pas plus tôt le "dépôt de bilan" de la société SOGAIL, sans avoir pour autant invité les parties à présenter leurs observations sur ce point, la cour d'appel a violé l'article 16 du nouveau Code de procédure civile ; alors, encore, que seul le débiteur est tenu de demander l'ouverture d'une

procédure de redressement judiciaire lorsqu'il constate sa cessation des paiements ; que le créancier, qui a la faculté de demander l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire à l'encontre de son débiteur, n'est jamais tenu de formuler une telle demande ;

qu'en décidant, néanmoins, que la société Disco avait commis une faute en ne provoquant pas plus tôt le dépôt de bilan de la SOGAIL, la cour d'appel a violé les articles 3 et 4 de la loi du 25 janvier 1985, 1382 et 1383 du Code civil ; et alors, enfin, qu'en décidant que la société Disco avait commis une faute en ne provoquant pas plus tôt le "dépôt de bilan" de la société SOGAIL, sans pour autant relever qu'elle avait eu connaissance à ce moment de l'état de cessation des paiements de cette dernière, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1382 et 1383 du Code civil ;

Mais attendu, en premier lieu, que la cour d'appel a relevé que M. Serge Y..., qui, par sa profession antérieure de cadre commercial, connaissait les impératifs de l'activité dans laquelle il s'engageait, a commis une erreur identique à celle de la société Disco en tenant pour plus fiables et sûres qu'elles n'étaient les études réalisées, tandis qu'il avait le devoir de les examiner avec prudence de sorte que la Sogail et la société Disco devaient l'une et l'autre supporter une partie des dommages qui avait été le résultat de leurs fautes respectives ; qu'elle a ainsi justifié légalement sa décision ;

Attendu, en second lieu, que la cour d'appel a retenu qu'après qu'aient été connus les résultats du premier exercice et après le décès de M. Serge Y..., la société Disco a élaboré, par le "protocole d'accord" et par l'exploitation directe du fonds, des solutions anormales au regard du bail commercial qui tendaient essentiellement à la sauvegarde de ses intérêts et a ainsi contribué à la perte de valeur de l'actif ; qu'abstraction faite de tous autres motifs, erronés, mais surabondants, la cour d'appel a justifié légalement sa décision ;

D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli en aucune de ses branches ;

Sur la demande d'indemnité et sur la demande présentée au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile :

Attendu que Mme Y... sollicite, d'une part, l'allocation d'une somme de 10 000 francs à titre d'indemnité, et, d'autre part, l'allocation d'une somme de 15 000 francs sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;

Attendu qu'il y a lieu de rejeter la première demande et d'accueillir la seconde ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Disco à payer à Mme Y... la somme de 15 000 francs sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;

La condamne également, envers M. X... et Mme Y..., aux dépens et aux frais d'exécution du présent arrêt ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par M. le président en son audience publique du cinq octobre mil neuf cent quatre vingt treize.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 91-11034
Date de la décision : 05/10/1993
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Poitiers (chambre civile, 2e section), 28 novembre 1990


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 05 oct. 1993, pourvoi n°91-11034


Composition du Tribunal
Président : Président : M. BEZARD

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1993:91.11034
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