Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Dijon, 6 décembre 1989), que MM. X..., Y... et Z... ont été employés par la société d'assurance La Mondiale en qualité d'agents producteurs ; que leur rémunération provenait d'un salaire fixe et de commissions ; que l'employeur a signé avec ses agents une convention de consolidation et d'amortissement des avances de trésorerie, une convention d'ouverture de prêts en compte courant, une convention d'ouverture de prêt en compte de développement ; que ces conventions avaient pour objet de leur permettre de bénéficier d'avances remboursables par prélèvement sur leur compte de commissions ; qu'en avril 1988, La Mondiale, ayant constaté que les comptes de prêts de ses agents étaient débiteurs, a compensé une partie de leurs dettes avec la totalité de leurs salaires d'avril 1988 ; que les agents, après avoir vainement protesté, ont, le 1er juillet 1988, pris acte de la rupture de leurs contrats de travail ;
Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit que la rupture du contrat de travail liant MM. X..., Y... et Z... s'analysait en un licenciement sans cause réelle et sérieuse et d'avoir, en conséquence, condamné la société à payer à ces trois salariés une certaine somme à titre d'indemnité de licenciement et de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen, d'une part, que constituent des acomptes sur salaires, remis en considération du travail en cours, les anticipations de rémunération consenties sur leur demande à des salariés d'une compagnie d'assurances rémunérés par des commissions dont le paiement est subordonné au règlement de la cotisation dès lors qu'elles sont à déduire des commissions dues, peu important la qualification donnée à l'acte par les parties ; qu'ainsi, en décidant que ces anticipations constituaient des prêts qui ne pouvaient s'imputer intégralement sur les salaires dus en raison notamment de l'utilisation des termes de " prêts " et d'" emprunteur " dans les conventions conclues entre La Mondiale, et MM. X..., Y... et Z..., la cour d'appel a violé l'article 12 du nouveau Code de procédure civile et l'article L. 144-2 du Code du travail ; alors, de deuxième part, qu'il était clairement stipulé dans les conventions que " l'emprunteur accepte le principe que le paiement des échéances s'opère par écritures de compensation entre le compte de prêt et son compte d'agent commissionnaire " ; qu'ainsi, en énonçant que La Mondiale qui avait effectué à l'échéance convenue une compensation d'une partie de sa créance avec les commissions dues, avait commis un abus caractérisé dans l'application des conventions qui font la loi des parties en s'abstenant de notifier à ses salariés une sommation de payer alors que cette formalité n'était prévue que dans l'hypothèse où était exigée le paiement immédiat de la totalité des sommes dues, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis des conventions liant les parties et, par suite, violé l'article 1134 du Code civil ; et alors enfin, que La Mondiale avait exposé qu'elle avait respecté les stipulations de l'article 16 de la convention collective de travail des producteurs salariés de base des services extérieurs d'après lesquelles " en principe, chaque mois ou au moins tous les 3 mois ou en cas de cessation de fonction, il est vérifié que le producteur salarié de base se trouvera avoir reçu au total, depuis le début de l'exercice en cours, une somme brute au moins égale à la rémunération minima correspondant à la période écoulée dudit exercice " ; qu'en omettant de répondre à ce moyen déterminant, la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu que, répondant en les écartant aux conclusions, la cour d'appel a relevé, hors toute dénaturation, d'une part, que selon les termes de la convention de consolidation La Mondiale consentait à son agent un prêt pour une durée de 2 ans remboursable selon un plan d'amortissement, qu'un intérêt était prévu, d'autre part que la convention d'ouverture de prêt en compte courant avait pour objet le versement d'avances moyennant un intérêt, que le bénéficiaire était qualifié d'emprunteur, enfin que la convention d'ouverture de prêt en compte de développement se présentait comme un contrat d'ouverture de crédit à un agent qualifié emprunteur ; qu'en l'état de ces constatations, la cour d'appel a pu décider que les sommes reçues par les agents en application de ces conventions ne constituaient pas des acomptes sur un travail en cours au sens de l'article 144-2 du Code du travail et, que dès lors, en retenant la totalité de la rémunération des agents, l'employeur avait méconnu les dispositions d'ordre public de ce texte ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.