Attendu que, par ordonnance du 30 septembre 1991, rectifiée le 9 octobre 1991, le président du tribunal de grande instance de Nanterre, a autorisé des agents de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, en vertu de l'article 48 de l'ordonnance du 1er décembre 1986, à effectuer une visite et une saisie de documents dans les locaux de dix entreprises pétrolières dont ceux de la SA Texaco France, 5, rue Bellini à Puteaux (Hauts-de-Seine), en vue de rechercher la preuve de pratiques anticoncurrentielles sur le marché du " carburéacteur " ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la SA Texaco fait grief à l'ordonnance d'avoir autorisé la visite et saisie litigieuses, alors selon le pourvoi qu'en ne précisant ni les fonctions auxquelles M. Raguin était délégué ni la durée de la délégation, l'ordonnance a violé les dispositions de l'article 48 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 ;
Mais attendu que l'ordonnance rectifiée énonce, qu'elle a été rendue par " M. X..., juge délégué par ordonnance du président du tribunal de grande instance de Nanterre, en date du 22 février 1991 " ; qu'une telle mention répond aux exigences de l'article 48 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le deuxième moyen :
Attendu que la SA Texaco France fait aussi grief à l'ordonnance d'avoir autorisé la visite et saisie litigieuses, alors, selon le pourvoi, que l'article 3, alinéa 2, du décret du 23 janvier 1947 autorisant les ministres à déléguer par arrêté leur signature, dispose que l'arrêté de délégation de signature doit désigner les matières qui font l'objet de la délégation ; que cette disposition est considérée comme respectée lorsque la délégation de signature est faite dans les limites des attributions du délégataire à condition que celles-ci aient elles-mêmes été définies par arrêté ; qu'en se référant uniquement à l'arrêté du 3 juin 1991 qui portait délégation de signature à M. Babusiaux " dans la limite de ses attributions ", sans préciser si les attributions du service dirigé par celui-ci avaient elles-mêmes été définies par arrêté, l'ordonnance est entachée d'un défaut de base légale au regard des articles 3, alinéa 2, du décret du 23 janvier 1947 et de l'article 48 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 ;
Mais attendu qu'en l'espèce, il n'est pas allégué que l'application de l'ordonnance du 1er décembre 1986 n'entrait pas dans les attributions de la Direction générale de la Concurrence, de la Consommation et de la répression des Fraudes, telles que définies par arrêtés même non publiés, que le président du tribunal n'était pas tenu de viser ; que, dès lors, le moyen n'est pas fondé ;
Sur le troisième moyen, pris en sa troisième branche :
Vu l'article 48 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 ;
Attendu que le juge, qui autorise en vertu de ce texte une visite et une saisie à la requête de l'administration de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, doit vérifier de manière concrète, par l'appréciation des éléments d'information que cette administration est tenue de lui fournir, que la demande d'autorisation qui lui est soumise est bien fondée ;
Attendu que le juge, qui n'a pas décrit, même succinctement, celles des pièces soumises à son appréciation par l'administration requérante et qu'il avait retenues pour fonder son appréciation par une simple référence à des annexes de la requête, n'a pas mis la Cour de Cassation en mesure d'exercer son contrôle et n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'ordonnance rendue le 30 septembre 1991 et rectifiée le 9 octobre 1991, entre les parties, par le président du tribunal de grande instance de Nanterre ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi.