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02/12/1992 | FRANCE | N°91-86145

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 02 décembre 1992, 91-86145


IRRECEVABILITE et REJET des pourvois formés par :
- X... Patrick,
- Y... Roland,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Riom, chambre correctionnelle, du 3 octobre 1991, qui a condamné, le premier à une amende de 30 000 francs, dont 20 000 francs avec sursis simple, pour complicité d'importation sans autorisation de produits d'oiseaux d'espèces non domestiques considérées comme gibier, dont la chasse est autorisée, le second à une amende de 15 000 francs, dont 7 000 francs avec sursis simple, pour mise en vente et vente sans autorisation des mêmes produits, ainsi que pour r

ecel, a ordonné la confiscation des produits saisis et prononcé sur...

IRRECEVABILITE et REJET des pourvois formés par :
- X... Patrick,
- Y... Roland,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Riom, chambre correctionnelle, du 3 octobre 1991, qui a condamné, le premier à une amende de 30 000 francs, dont 20 000 francs avec sursis simple, pour complicité d'importation sans autorisation de produits d'oiseaux d'espèces non domestiques considérées comme gibier, dont la chasse est autorisée, le second à une amende de 15 000 francs, dont 7 000 francs avec sursis simple, pour mise en vente et vente sans autorisation des mêmes produits, ainsi que pour recel, a ordonné la confiscation des produits saisis et prononcé sur les réparations civiles.
LA COUR,
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Sur la recevabilité du pourvoi de Roland Y... : (sans intérêt) ;
Sur le pourvoi de Patrick X... :
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et du jugement dont il adopte les motifs que le 30 novembre 1990, deux gardes de la chasse et de la faune sauvage ont constaté que l'exploitant d'une pizzeria commercialisait un pâté en barquette fabriqué en Belgique et portant la mention " mousse de bécasse ", qui lui avait été vendu par Roland Y..., grossiste en charcuterie, et qui était distribué en France par l'intermédiaire de Patrick X..., agent commercial, mandataire de la société belge Franex ; que Y... et X... sont poursuivis pour infraction aux dispositions de l'article L. 212-1 du Code rural, Y... l'étant également pour recel ;
En cet état :
Sur le premier moyen de cassation pris de la violation des articles 55 de la Constitution, 3, 30, 37, 85 et 177 du traité de Rome, 6-1 de la directive n° 79 / 409 CEE du 2 avril 1979, de l'arrêté du 20 décembre 1983, des articles 59 et 60 du Code pénal, L. 212-1, L. 215-1, R. 212-1, R. 212-2 du Code rural, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré le prévenu coupable de complicité du délit d'importation illicite et l'a condamné à 30 000 francs d'amende ;
" aux motifs propres que les textes applicables concernent la protection de l'environnement et ne visent pas à éviter des pratiques commerciales discriminatoires entre Etats membres de la Communauté économique européenne comme tente de le soutenir le prévenu X... ; qu'il suffit de constater que la directive n° 79 / 409 du 2 avril 1979 du Conseil des Communautés européennes a expressément prévu, en son article 6-4°, que les Etats membres peuvent appliquer aux espèces inscrites à l'annexe III, partie 3, les réglementations nationales existantes ; que la bécasse est bien visée à ladite annexe ; que dès lors, les dispositions réglementaires françaises interdisant le colportage, la mise en vente, la vente ou l'achat de la bécasse sous quelque forme que ce soit, y compris en mousse ou en pâté, ne présentent aucune incompatibilité avec la législation communautaire et que la question préjudicielle soulevée n'a pas à être posée ;
" et aux motifs adoptés que l'arrêté du 20 décembre 1983 reprend fidèlement, pour en assurer l'application en France, la directive du 2 avril 1979 en ce qui concerne la protection de la bécasse ; qu'il s'avère que la législation française n'est pas discriminatoire et ne dépasse pas les restrictions prévues par la norme européenne et justifiées par la protection de l'environnement ;
" alors que la complicité légale n'existe que si le fait principal est punissable ; que ne saurait recevoir de qualification pénale une infraction à une réglementation contraire au traité de Rome et aux directives communautaires ; que, s'il peut être dérogé, dans la mesure nécessaire à la protection de la santé publique, aux règles résultant des articles 30, 37 et 85 du traité de Rome, c'est à la condition qu'il ne soit pas porté dans certains Etats, aux règles de la libre circulation des marchandises, des atteintes constituant une restriction déguisée aux importations en provenance des pays de la Communauté européenne ; qu'en présence d'une directive relative à la protection des espèces, un Etat membre ne peut ajouter à ladite directive des exclusions ayant pour effet de restreindre les importations de marchandises licitement produites dans d'autres pays de la Communauté, en conformité avec ladite directive ; que constitue une telle extension, contrairement aux énonciations de l'arrêt, l'article 1er de l'arrêté du 20 décembre 1983 interdisant, sauf autorisation, la vente non seulement des oiseaux vivants, morts, ou de toutes parties ou de tous produits obtenus à partir de l'oiseau, facilement identifiables, mais encore des pâtés et conserves non visés par la directive ; qu'ainsi la cour d'appel ne pouvait faire application dudit article 1er du décret du 20 décembre 1983 sans violer les textes susvisés " ;
Attendu que de la légalité prétendue de la fabrication du pâté de bécasse en Belgique, découle, selon le prévenu, l'incompatibilité entre, d'une part, l'interdiction, édictée par l'article 1er de l'arrêté interministériel du 20 décembre 1983, d'importer, sauf autorisation délivrée dans les conditions prévues par les articles L. 212-1 et R. 212-1 du Code rural, toutes les espèces d'oiseaux non domestiques considérées comme gibier dont la chasse est autorisée-espèces au nombre desquelles figure la bécasse-ainsi que les produits issus de ces espèces, tels, notamment, les pâtés et conserves et, d'autre part, les dispositions du droit communautaire, et notamment celles de l'article 30 du Traité instituant la Communauté économique européenne interdisant, entre les Etats membres, les restrictions quantitatives à l'importation ainsi que toutes mesures d'effet équivalent ;
Attendu que, pour rejeter cette argumentation, les juges du fond rappellent d'abord que, suivant l'article 36 du Traité instituant la Communauté économique européenne, les dispositions des articles 30 à 34 ne font pas obstacle aux interdictions ou restrictions d'importation justifiées par des raisons de protection de la santé et de la vie des personnes et des animaux, dans la mesure où ces interdictions ne constituent ni un moyen de discrimination arbitraire ni une restriction déguisée dans le commerce entre les Etats membres ; qu'ils énoncent ensuite que l'arrêté du 20 décembre 1983 a été pris pour assurer l'application en France de la directive CEE n° 79 / 409 du 2 avril 1979 concernant la conservation des oiseaux sauvages, parmi lesquels figure la bécasse, inscrite à l'annexe III, partie 3, de cette directive, et que la procédure d'autorisation préalable prévue par l'article R. 212-1 du Code susvisé est conforme aux exigences de ce texte, notamment de son article 6 ; qu'ils en déduisent que l'arrêté du 20 décembre 1983 n'est nullement en contradiction avec la réglementation européenne relative à la protection de la nature, particulièrement avec la directive précitée du 2 avril 1979 ;
Attendu qu'en cet état, la cour d'appel a légalement justifié sa décision, dès lors que les pâtés et conserves issus des espèces d'oiseaux non domestiques considérées comme gibier dont la chasse est autorisée ne constituent qu'un des produits obtenus à partir des espèces concernées et, en tant que tels, relèvent, dès lors qu'ils sont facilement identifiables, de la réglementation protectrice édictée par l'article 6 de la directive européenne et reprise par l'article 1er de l'arrêté du 20 décembre 1983 ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Sur le deuxième moyen de cassation : (sans intérêt) ;
Sur le troisième moyen de cassation : (sans intérêt) ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
DECLARE IRRECEVABLE le pourvoi de Roland Y... ;
REJETTE le pourvoi de Patrick X...


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 91-86145
Date de la décision : 02/12/1992
Sens de l'arrêt : Irrecevabilité et rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

1° PROTECTION DE LA NATURE ET DE L'ENVIRONNEMENT - Protection de la faune - Mesures de protection et de repeuplement - Réglementation concernant l'importation sous tous régimes douaniers - le colportage - la mise en vente - la vente ou l'achat de toutes les espèces d'oiseaux non domestiques considérées comme gibier dont la chasse est autorisée - et de leurs produits - Arrêté du 20 décembre 1983 - Domaine d'application.

1° Les pâtés et conserves issus des espèces d'oiseaux non domestiques considérées comme gibier dont la chasse est autorisée - au nombre desquelles figure la bécasse - qui ne constituent qu'un produit obtenu à partir desdites espèces, relèvent, dès lors qu'ils sont facilement identifiables, de l'article 1er de l'arrêté interministériel du 20 décembre 1983 qui prohibe, sauf autorisation, l'importation sous tous régimes douaniers, le colportage, la mise en vente, la vente ou l'achat en France de toutes les espèces d'oiseaux précitées, ainsi que de leurs produits, et notamment des pâtés et conserves

2° COMMUNAUTE ECONOMIQUE EUROPEENNE - Conseil de la Communauté économique européenne - Directives - Directive n° 79/409 du 2 avril 1979 concernant la conservation des oiseaux sauvages - Réglementation interne - Contradiction (non).

2° L'arrêté du 20 décembre 1983 a été pris pour assurer l'application en France de la directive de la Communauté économique européenne n° 79/409 du 2 avril 1979 concernant la conservation des oiseaux sauvages. La réglementation en résultant n'est donc pas en contradiction avec la réglementation européenne relative à la protection de la nature (1).


Références :

Arrêté du 20 décembre 1983 art. 1
Code rural L212-1, L215-1, R212-1, R212-2
Directive CEE 79/409 du 02 avril 1979 art. 6-1

Décision attaquée : Cour d'appel de Riom (chambre correctionnelle), 03 octobre 1991

CONFER : (2°). (1) Cf. A rapprocher : Chambre criminelle, 1988-06-14 , Bulletin criminel 1988, n° 270, p. 719 (rejet).


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 02 déc. 1992, pourvoi n°91-86145, Bull. crim. criminel 1992 N° 401 p. 1138
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 1992 N° 401 p. 1138

Composition du Tribunal
Président : Président :M. Souppe, conseiller le plus ancien faisant fonction
Avocat général : Avocat général :M. Libouban
Rapporteur ?: Rapporteur :M. Carlioz
Avocat(s) : Avocats :la SCP Masse-Dessen, Georges et Thouvenin, la SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1992:91.86145
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