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01/12/1992 | FRANCE | N°90-19611

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 01 décembre 1992, 90-19611


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant : Sur le pourvoi formé par la société Heppner, société anonyme, dont le siège est ... (Seine-Saint-Denis),

en cassation d'un arrêt rendu le 4 juillet 1990 par la cour d'appel de Paris (5e chambre), au profit de : 1°/ la société Septodont, dont le siège est ... à SaintMaur-des-Fossés (Val-de-Marne),

2°/ la compagnie la Réunion Européenne, société anonyme, dont le siège est ... (9ème),

3°/ la compagnie La France, société anonyme, dont le siège est ... (9ème)

,

4°/ la société Dart Container Line, ayant son siège ... (11ème),

défenderesses à la cas...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant : Sur le pourvoi formé par la société Heppner, société anonyme, dont le siège est ... (Seine-Saint-Denis),

en cassation d'un arrêt rendu le 4 juillet 1990 par la cour d'appel de Paris (5e chambre), au profit de : 1°/ la société Septodont, dont le siège est ... à SaintMaur-des-Fossés (Val-de-Marne),

2°/ la compagnie la Réunion Européenne, société anonyme, dont le siège est ... (9ème),

3°/ la compagnie La France, société anonyme, dont le siège est ... (9ème),

4°/ la société Dart Container Line, ayant son siège ... (11ème),

défenderesses à la cassation ; La société Septodont, d'une part, les compagnies la Réunion Européenne et La France, d'autre part, défenderesses au pourvoi principal ont formé un pourvoi incident contre le même arrêt ; La demanderesse au pourvoi principal, invoque à l'appui de son recours, quatre moyens de cassation annexés au présent arrêt ; La société Septodont, demanderesse au pourvoi incident, invoque à l'appui de son recours, un moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ; Les compagnies la Réunion Européenne et La France, demanderesses au pourvoi incident, invoquent à l'appui de leur recours, deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ; LA COUR, en l'audience publique du 20 octobre 1992, où étaient présents : M. Bézard, président, M. Nicot, conseiller rapporteur, M. Hatoux, Mme Pasturel, MM. Edin, Grimaldi, Apollis, Mme Clavery, MM. Lassalle, Tricot, conseillers, M. Rémery, conseiller référendaire, M. Raynaud, avocat général, Mme Arnoux, greffier de chambre ; Sur le rapport de M. le conseiller Nicot, les observations de la SCP Nicolay et de Lanouvelle, avocat de la société Heppner, de la SCP Delaporte et Briard, avocat de la société Septodont, de Me Mattei-Dawance, avocat des compagnies la Réunion Européenne et La France, les conclusions de M. Raynaud, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ; Statuant tant sur les pourvois incidents respectivement relevés par les sociétés La Réunion Européenne et la France et par la société Septodont, que sur ce pourvoi principal formé par la société Heppner ;

Attendu, selon les énonciations de l'arrêt attaqué (Paris, 4 juillet 1990), que la société Septodont a confié à la société Heppner, en qualité de commissionnaire de transport, le soin de faire acheminer de la région parisienne à Newcastle (Etats-Unis), des produits dentaires, et notamment des anesthésiants destinés à la société Deproco ; que la société Septodont a précisé par lettre que la marchandise devait être transportée en conteneur à température contrôlée de six degrés centigrades au minimum ; qu'en réalité, la société Heppner a fait mettre à la disposition de la société Septodont un conteneur isotherme ; que ce conteneur a été transporté par voie maritime ; qu'à déstination, les marchandises ont été reconnues avariées en totalité pour avoir été exposées à des températures trop basses ; que la société Deproco ayant refusé de payer le prix de ces marchandises, la société Septodont a elle-même refusé de s'acquitter du montant de la commission et des frais réclamés par la société Heppner ; que cette société a assigné la société Septodont en paiement, tandis que celle-ci agissait à l'encontre du commissionnaire de transport en dommages et intérêts pour la perte de la marchandise ; que la société Heppner a appelé notamment en garantie les sociétés La France et La Réunion Européenne (les assureurs), ainsi que la société Dartcontainer Line, le transporteur maritime ; Sur le premier moyen du pourvoi principal et sur le premier moyen du pourvoi incident formé par les assureurs, chacun pris en ses deux branches : Attendu que la société Heppner et les assureurs reprochent à l'arrêt d'avoir déclaré recevable la demande en réparation formée par la société Septodont, vendeur "CAF", à l'encontre du commissionnaire de transport, alors, selon le pourvoi, d'une part que le commissionnaire de transport est partie au contrat, sauf s'il est expressément prévu qu'il agit pour le seul compte de son commettant ; qu'en retenant que la société Heppner ne pouvait agir comme si elle était partie au contrat, parce que le rapport juridique la liant à la société Septodont est un contrat de commission auquel la société Deproco, acheteur, était totalement étrangère, la cour d'appel a violé par fausse application les articles 101 du Code de Commerce et 1984 du Code civil ; et alors d'autre part que, l'action en responsabilité pour pertes ou avaries contre le transporteur maritime, n'appartient qu'au dernier endossataire du connaissement à ordre, et qu'elle n'est ouverte au chargeur qu'à la condition que celui-ci soit seul à avoir supporté le préjudice résultant du transport ; qu'en s'abstenant d'indiquer en quoi la société Septodont, chargeur de la marchandise vendue C.A.F., était seule à avoir supporté lors de l'introduction de l'action en responsabilité, le préjudice résultant du transport, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article 49 du décret du 31 décembre 1966 ;

Mais attendu, d'une part, qu'ayant relevé que la société Septodont avait chargé la société Heppner, en qualité de commissionnaire de transport, d'acheminer les marchandises litigieuses, la cour d'appel a décidé à bon droit que, sur le fondement du contrat de commission qui était le rapport juridique liant les

deux sociétés, la société Septodont avait qualité pour agir contre la société Heppner et était donc recevable en sa demande ; Attendu, d'autre part, que l'arrêt a relevé que les marchandises transportées avaient été reconnues avariées dans leur totalité et que la société destinataire avait refusé d'en payer la valeur à la

société Septodont ; que l'arrêt a retenu en outre que la marchandise devait être expédiée dans un conteneur à température contrôlée et que la société Heppner avait mis à disposition un conteneur isotherme non prévu pour assurer cette température minimale ; que si, dans une vente stipulée C.A.F. les risques du transport sont transférés à l'acheteur, le chargeur a l'obligation de veiller à l'emballage convenable de la marchandise et, en particulier, si le transport comporte l'utilisation d'un conteneur, de veiller au choix d'un matériel approprié à sa bonne conservation ; qu'en déduisant de ce principe, au vu de ses constatations, que la société Septodont était seule recevable à réclamer à la société Heppner la réparation du préjudice né de la mauvaise exécution des obligations qui leur appartenaient et dont elle lui avait confié l'accomplissement, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ; D'où il suit que ni l'un, ni l'autre des moyens ne sont fondés en leurs branches respectives ; Sur le deuxième moyen du pourvoi principal pris en ses deux premières branches et sur le second moyen du pourvoi incident des assureurs, pris en ses deux branches : Attendu que la société Heppner et les assureurs reprochent en outre à l'arrêt d'avoir condamné la société Heppner à payer à la société Septodont une somme en dollars des Etats-Unis ou son équivalent en francs français au jour du payement, alors, selon les pourvois, d'une part, que la validité du consentement doit être appréciée au moment de la formation du contrat, celui qui invoque l'erreur ne pouvant, ultérieurement, se fabriquer à lui-même la preuve de celle-ci ; qu'en l'espèce, la cour d'appel devait se situer à la date du 21 décembre 1984 pour apprécier l'accord verbal donné téléphoniquement par la société Septodont au maintien du transport en containeur isotherme, et ne pouvait fonder sa décision sur la dénégation, par cette société, de la validité de l'accord verbal intervenu, dés lors que cette dénégation ne procède que de l'affirmation faite par la société Septodont, dans un télex du 30 janvier 1985,

donc postérieur à l'arrivée de la marchandise, le 24 janvier 1985 ; qu'ainsi, la cour d'appel a violé les articles 1109 et 1110 du Code

civil ; alors, d'autre part que, s'il incombe au débiteur qui se prétend libéré de justifier le fait qui a produit l'extinction de son obligation, il appartient d'abord à celui qui réclame l'exécution d'une obligation de la prouver ; qu'en l'espèce, l'existence de l'accord verbal donné téléphoniquement, par la société Septodont, pour le maintien du transport en containeur isotherme étant établie, il incombait à la société Septodont de prouver qu'elle n'avait pas ratifié, en pleine connaissance de cause, le choix d'un containeur isotherme ; qu'en mettant cette preuve à la charge de la société Heppner, la cour d'appel a violé par fausse application l'article 1315 du Code civil ; Mais attendu que, pour retenir que l'accord verbal donné téléphoniquement par la société Septodont au maintien du transport en conteneur isothermique reposait sur une confusion, non dissipée par la société Heppner, quant aux exigences auxquelles "répondait" le conteneur, l'arrêt s'est fondé à la fois sur le contenu du télex visé au pourvoi et sur la circonstance antérieure qu'induite en erreur par une mauvaise appréciation émanant d'un professionnel averti, la société Septodont avait néanmoins réitéré ses intructions relatives aux écarts de température tolérés ; que par ces constatations et appréciations, c'est sans inverser la charge de la preuve ni encourir les autres griefs du moyen que la cour d'appel a justifié sa décision ; qu'il s'en suit que les moyens ne sont fondés dans aucune de leurs branches ; Sur le deuxième moyen du pourvoi principal pris en sa troisième branche : Attendu que la société Heppner fait encore le même grief à l'arrêt, alors, selon le pourvoi, qu'elle a fait valoir, dans ses conclusions, du 9 juin 1988, que, conformément aux constatations de l'expert, la cause du gel de la marchandise était la rigueur tout à fait exceptionnelle du froid ayant sévi au cours de l'hiver 1984 sur la Côte Nord Est des Etats-Unis ; qu'en se limitant à énoncer que les basses températures en période d'hiver ne sont pas imprévisibles, sans aucune explication quant au moyen tiré de la rigueur exceptionnelle du froid, la cour d'appel n'a pas motivé sa décision, et a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ; Mais attendu qu'en retenant, non seulement que les basses températures de la période d'hiver n'étaient pas imprévisibles, mais encore que les conditions climatiques supportées par les produits litigieux ne revêtaient pas le caractère de la force majeure et que les conteneurs à température dirigée permettaient précisément d'y obvier, la cour d'appel a répondu aux conclusions prétendument omises ; qu'il s'ensuit que le moyen n'est pas davantage fondé en sa troisième branche ;

Sur le troisième moyen du pourvoi principal : Attendu que la société Heppner fait grief en outre à l'arrêt d'avoir débouté de son appel en garantie formé à l'encontre du transporteur maritime, alors, selon le pourvoi, qu'elle avait fait valoir dans ses conclusions, du 19 octobre 1988, que le navire avait été détourné de sa destination d'origine (Philadelphie) pour arriver à Norfolk le 6 janvier 1985, et que la vague de froid exceptionnelle qui, selon l'expert, est à l'origine du gel des marchandises, a touché le conteneur pendant qu'il était sous la responsabilité du transporteur maritime, entre le 6 et le 24 janvier 1985 ; qu'en s'abstenant de répondre à ces conclusions, tenant au changement d'itinéraire du navire, la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ; Mais attendu qu'ayant énoncé que la société Heppner avait soutenu que le transporteur maritime n'avait pas pris toutes les précautions nécessaires pour éviter le gel en période de froid exceptionnel, l'arrêt retient qu'aucune indication n'avait été portée au connaissement sur la nature des produits dentaires et leur absence de résistance au froid et que, par ailleurs, l'utilisation, indispensable en l'espèce, n'avait pas été faite d'un matériel à température dirigée ; qu'ainsi, la cour d'appel a répondu aux conclusions visées au pourvoi ; d'où il suit que le moyen n'est pas fondé ; Sur le quatrième moyen pris en ses deux branches du pourvoi principal : Attendu que la société Heppner reproche enfin à l'arrêt de l'avoir déboutée de son appel en garantie contre les assureurs, alors, selon le pourvoi, d'une part, que, le contrat d'assurance du 1er janvier 1982 prévoit, sans réserve, en son annexe 2, que les assureurs étendront la garantie au-delà des limitations

contractuelles lorsque l'assuré sera condamné à dépasser ces limitations en cas de faute lourde ; qu'en retenant que cette clause ne vise que les limites quantitatives du montant de l'indemnisation, et non les limites géographiques du territoire couvert par la police, la cour d'appel a dénaturé celle-ci et a violé l'article 1134 du Code civil ; et alors, d'autre part qu'elle a fait valoir dans ses conclusions, du 23 avril 1990, que si sa responsabilité devait être retenue à l'égard de la société Septodont, il conviendrait que les assureurs soient tenus à garantie, dés lors que le sinistre trouverait son origine sur le territoire français ; qu'en s'abstenant de répondre à ces conclusions, la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ; Mais attendu que c'est hors toute dénaturation que la cour d'appel a retenu que la clause du contrat d'assurance ne visait que les limites quantitatives du montant de l'indemnité et non les limites géographiques du territoire couvert par la police ; qu'en précisant qu'en cas de voyages maritimes et à défaut de

déclaration préalable entrainant surprime, la garantie ne s'appliquait que sur les transports effectués au départ de France métropolitaine et à destination des pays du Nord de l'Europe, la cour d'appel a répondu aux conclusions visées au pourvoi ; qu'il s'en suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses deux branches ; Et enfin sur le moyen unique du pourvoi incident formé par la société Septodont : Attendu que la société Septodont reproche à l'arrêt d'avoir décidé que le montant de l'indemnité due par la société Heppner devait être fixé à la contrevaleur en francs français d'une somme en dollars des Etats-Unis au jour du paiement, alors, selon le pourvoi, qu'il résultait de la facture émise le

31 décembre 1984 par la société Heppner que les parties au contrat de commission avaient entendu se référer, pour l'exécution de cette convention, à un cours du dollar fixé à 9,4585 francs ; qu'en refusant de tenir compte de la volonté exprimée des parties, la cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil ; Mais attendu qu'il résulte de l'arrêt comme des conclusions qu'elle a déposées devant la cour d'appel, que la société Septodont avait demandé que la somme due par la société Heppner fût calculée selon le cours du dollar des Etats-Unis au 24 janvier 1985, date de l'arrivée de la marchandise, et non pas au cours du

dollar auquel se réfère la facture du 31 décembre 1984 visée au pourvoi ; que le moyen est incompatible avec la position prise devant la cour d'appel et qu'il est donc irrecevable ; Sur la demande présentée au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile : Attendu que les compagnies La Réunion européenne et la France sollicitent l'allocation chacune d'une somme de 5 000 francs par application de ce texte ; Mais attendu qu'il serait inéquitable d'accueillir cette demande ; PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi ; REJETTE la demande présentée sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 90-19611
Date de la décision : 01/12/1992
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

(pour les 2 premiers moyens du pourvoi principal) TRANSPORTS MARITIMES - Marchandises - Commissionnaire de transport - Droit de l'expéditeur d'agir contre lui.

TRANSPORTS MARITIMES - Marchandises - Perte ou avarie - Transport en conteneur isotherme - Température dirigée - Vente C.A.F..


Références :

Loi du 18 juin 1966 art. 27

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 04 juillet 1990


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 01 déc. 1992, pourvoi n°90-19611


Composition du Tribunal
Président : Président : M. BEZARD

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1992:90.19611
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