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17/11/1992 | FRANCE | N°91-13429

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 17 novembre 1992, 91-13429


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par la société anonyme Elf France, dont le siège est ..., (Hauts-de-Seine),

en cassation d'un arrêt rendu le 8 février 1991 par la cour d'appel de Lyon (3ème chambre), au profit de :

1°) M. Jean X..., demeurant au Lieudit "le Grand Port" à Loyettes (Ain),

2°) M. Guido Y..., demeurant au Lieudit "le Bouchet" à Chavanoz (Isère),

défendeurs à la cassation ; La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen unique de cassat

ion annexé au présent arrêt ; LA COUR, composée selon l'article L. 131-6 alinéa 2, du Code de...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par la société anonyme Elf France, dont le siège est ..., (Hauts-de-Seine),

en cassation d'un arrêt rendu le 8 février 1991 par la cour d'appel de Lyon (3ème chambre), au profit de :

1°) M. Jean X..., demeurant au Lieudit "le Grand Port" à Loyettes (Ain),

2°) M. Guido Y..., demeurant au Lieudit "le Bouchet" à Chavanoz (Isère),

défendeurs à la cassation ; La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ; LA COUR, composée selon l'article L. 131-6 alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 6 octobre 1992, où étaient présents :

M. Bézard, président, M. Grimaldi, conseiller rapporteur, M. Hatoux, conseiller, M. Curti, avocat général, Mme Arnoux, greffier de chambre ; Sur le rapport de M. le conseiller Grimaldi, les observations de la SCP Delaporte et Briard pour la société Elf France, de Me Choucroy, avocat de M. X... et de la SCP Guiguet, Bachellier et Potier de la Varde, avocat de M. Y..., les conclusions de M. Curti, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ; Attendu, selon l'arrêt déféré (Lyon, 8 février 1991), que, par contrat du 21 juillet 1970, M. et Mme Y... ont donné en location gérance à M. X... un fonds de commerce de station-service ; que, par contrat du 30 mars 1976, M. Y... s'est engagé à s'approvisionner exclusivement auprès de la société Elf France (société Elf) ; que, par contrat du même jour, M. X... a promis de respecter cet engagement de M. Y... ; que la société Elf se plaignant de ce que M. X... avait cessé ses approvisionnements en carburants et en lubrifiants à partir respectivement d'avril et juillet 1985, l'a mis en demeure, le 20 août 1985, de reprendre ses achats, dans les quinze jours à venir ; que M. X... s'est exécuté ; que la cour d'appel, saisie de diverses demandes tant principales que reconventionnelles, a dit que la société Elf avait, à compter de janvier 1985, pratiqué des prix discriminatoires au profit d'une station-service située à proximité de celle de M. X... et l'a condamnée, de ce chef, à payer à ce dernier une somme de 181 527,50 francs ; qu'elle a dit en outre que cette pratique discriminatoire justifiait la résiliation du contrat aux torts de la société Elf, qu'elle a

condamnée à payer 50 000 francs à M. X... ; Sur le moyen unique, pris en ses première et deuxième branches :

Attendu que la société Elf fait grief à l'arrêt d'avoir prononcé ce dernier chef de condamnation alors, selon le pourvoi, d'une part, que la résolution pour inexécution d'un contrat ne peut être prononcée aux torts d'un contractant que s'il apparaît qu'il a méconnu une de ses obligations contractuelles ; qu'en l'espèce, ayant relevé que la société Elf n'était pas contractuellement tenue à l'exclusivité envers MM. Y... et X..., mais était responsable envers eux sur le plan délictuel pour avoir commis des actes de concurrence déloyale, la cour d'appel ne pouvait pas en déduire, en l'absence de violation par Elf de ses obligations contractuelles, que la résiliation s'était faite à ses torts exclusifs, sans violer l'article 1184 du Code civil ; et alors, d'autre part, en tout état de cause, qu'engage sa responsabilité celui qui pratique à l'égard d'un partenaire économique des prix discriminatoires et non justifiés par des contreparties réelles en créant, de ce fait, pour ce partenaire, un désavantage dans la concurrence ; que tel n'est pas le cas, lorsqu'une compagnie pétrolière pratique des prix différents entre un pompiste indépendant lié par une obligation d'approvisionnement exclusif, en contrepartie d'un prêt de matériel et d'un cautionnement donné par la compagnie pétrolière, et un pompiste mandataire ; que dès lors en l'espèce, en ne recherchant pas, comme elle y était invitée par Elf, si la différence de statut juridique des distributeurs ne pouvait pas justifier objectivement une différence de prix, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du Code civil, et de l'article 37-1 de l'ordonnance du 30 juin 1945 ; Mais attendu, en premier lieu, que, pour contester le caractère discriminatoire des prix pratiqués à l'égard de M. X..., la société Elf, si elle a fait valoir, devant la cour d'appel, que la station-service concurrente était sa mandataire, elle n'a invoqué ni "les contreparties réelles", ni le "prêt de matériel", ni le "cautionnement" ; que la cour d'appel n'avait donc pas à procéder à la recherche invoquée par la deuxième branche, qui ne lui était pas demandée ; Attendu, en deuxième lieu, qu'ayant retenu qu'à partir de la libération des prix des produits pétroliers, en janvier 1985, la société Elf pratiquait, au préjudice de M. X..., des prix

discriminatoires entre les deux points de vente, situés à quelques centaines de mètres l'un de l'autre, la cour d'appel a pu décider que cette pratique constituait une faute, dès lors que l'exploitant de la station concurrente était le mandataire de la société Elf, ce dont il résulte que cette dernière vendait le carburant pour son compte personnel ; Attendu, en troisième lieu, que cette faute constitue une violation de l'article 1134, alinéa 3, du Code civil et a donc une nature

contractuelle ; que, par ce motif de pur droit, substitué à celui erroné de la cour d'appel, l'arrêt se trouve légalement justifié ; D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli en aucune de ses deux branches ; Et sur la troisième branche du moyen :

Attendu que la société Elf fait encore le même grief à l'arrêt alors, selon le pourvoi, qu'ayant relevé que M. X... avait méconnu son obligation essentielle d'approvisionnement exclusif, la cour d'appel ne pouvait pas prononcer la résolution aux torts exclusifs de la société Elf France, sans méconnaître l'article 1184 du Code civil ; Mais attendu que l'arrêt retient que la "politique discriminatoire entre les deux commerces concurrents a eu une répercussion directe et immédiate sur le volume d'activité de M. X..., l'empêchant de réaliser les quotas fixés contractuellement" et que ces agissements de la société Elf l'"exonèrent" de toute responsabilité ainsi qu'ils "justifient le prononcé de la résiliation" du contrat aux torts de la société Elf ; qu'ainsi, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ; PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 91-13429
Date de la décision : 17/11/1992
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

REGLEMENTATION ECONOMIQUE - Prix - Politique discriminatoire - Prix différents consentis aux distributeurs d'un même réseau - Application à des produits pétroliers.

VENTE - Vente commerciale - Exclusivité - Concession exclusive de vente - Politique discriminatoire - Prix différents - Faute du concédant - Résiliation du contrat.


Références :

Code civil 1184
Ordonnance du 30 juin 1945 art. 37-1

Décision attaquée : Cour d'appel de Lyon, 08 février 1991


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 17 nov. 1992, pourvoi n°91-13429


Composition du Tribunal
Président : Président : M. BEZARD

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1992:91.13429
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