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Sur le moyen unique, pris en ses diverses branches :
Attendu, selon l'arrêt confirmatif attaqué, (Amiens, 16 novembre 1988) que M. X..., cadre au service de la Société des usines Chausson, a été licencié le 27 avril 1987 pour motif économique, avec dispense d'effectuer son préavis de 3 mois ; que le 5 juin 1987, l'employeur a notifié au salarié la rupture immédiate des relations contractuelles en raison des fautes graves commises par celui-ci au cours du préavis, et a refusé à l'intéressé le bénéfice de l'indemnité conventionnelle de licenciement et du solde de l'indemnité de préavis ;
Attendu que la société fait grief à l'arrêt de l'avoir condamnée à verser à M. X... l'indemnité conventionnelle de licenciement alors, selon le moyen, que d'une part, l'article 29, alinéa 1er, de la convention collective nationale des ingénieurs et cadres de la métallurgie du 13 mars 1972, modifiée le 12 septembre 1983, applicable en l'espèce, soumet le droit pour le salarié à l'indemnité de licenciement à la double condition d'avoir moins de 65 ans, et de n'avoir pas commis une faute grave ; que ces deux conditions doivent nécessairement être appréciées à la même date ; que, nul ne contestant que la condition d'âge maximum doit s'apprécier au dernier jour du préavis, il ne peut qu'en aller de même pour la condition d'absence de faute grave ; qu'en décidant que la faute grave qu'elle avait constatée n'entraîne la privation de l'indemnité de licenciement que lorsque cette faute est commise avant la notification du licenciement, la cour d'appel a méconnu le texte susvisé en y apportant une restriction qu'il ne comporte pas, et a donc violé l'article 1134 du Code civil ; alors que, d'autre part, le pouvoir disciplinaire reconnu à l'employeur comme corollaire de son pouvoir de direction par les articles L. 122-40 et suivants du Code du travail, implique qu'une sanction régulièrement prononcée soit appliquée effectivement ; que la sanction de la faute grave est constituée à la fois de la rupture immédiate du contrat de travail et de la privation de l'indemnité de licenciement ; que ces deux éléments sont indissociables, quelle que soit la date de la commission de la faute ; qu'en décidant d'accorder une indemnité de licenciement à un salarié qui avait été sanctionné pour une faute grave, la cour d'appel a excédé ses pouvoirs en privant en fait de portée la sanction prononcée, ce qui équivaut à l'annulation partielle de celle-ci ; que ce résultat est, au surplus, immoral dans la mesure où il peut permettre au salarié de provoquer son renvoi par sa faute pour percevoir l'indemnité, voire d'adopter en toute impunité durant le préavis des comportements pouvant aller jusqu'à la faute lourde, assuré qu'il serait de ne pas perdre son indemnité de licenciement ; alors que de troisième part, en énonçant que le droit à indemnité de licenciement naît au moment de la notification du licenciement, la cour d'appel, à supposer cette affirmation exacte, aurait méconnu le fait que l'absence de faute grave avant la fin du préavis, date d'exigibilité de l'indemnité de licenciement, est alors une condition suspensive du bénéfice de ce droit ; que la pertinence de la motivation retenue par l'arrêt attaqué, qui procède d'une confusion entre le décès du salarié au cours du préavis et la faute
grave commise au cours du préavis, est en tout état de cause contredite notamment par le fait qu'un salarié atteignant 2 ans d'ancienneté, en cours de préavis de licenciement, peut néanmoins prétendre à l'indemnité de licenciement, ou bien encore par le fait qu'un salarié qui atteint l'âge de 65 ans, après la notification de son licenciement, ne peut prétendre, selon l'article 29 de la convention collective susvisée, qu'à l'indemnité de départ mais non à l'indemnité de licenciement ; alors qu'enfin, l'affirmation juridiquement discutable de l'indemnité de licenciement, selon laquelle le droit à cette indemnité naîtrait à la date de la notification du licenciement, est en tout cas exacte pour l'indemnité compensatrice de préavis, lorsque l'employeur a dispensé le salarié de travail pendant le délai-congé ; qu'en se fondant sur cette seule motivation pour attribuer une indemnité de licenciement au salarié, qui avait commis une faute grave en cours de préavis dispensé de travail, alors, qu'elle refusait de lui attribuer une indemnité de préavis, la cour d'appel soit s'est contredite, soit n'a pas donné de base légale à sa décision ; qu'au surplus les dispositions légales et conventionnelles relatives à ces deux indemnités en soumettent, en des termes identiques, le bénéfice à l'absence de faute grave du salarié ; que rien ne justifie donc que ces textes soient respectivement appliqués de façon différente dans une même situation ;
Mais attendu, d'une part, que la cour d'appel énonce exactement que la faute grave commise par le salarié pendant le préavis, si elle justifie qu'il soit mis fin à la poursuite de celui-ci, ne peut entraîner la perte du droit à l'indemnité de licenciement qui naît à la date de la notification du congédiement, même si son exigibilité est reportée à la fin du préavis ;
Attendu d'autre part, que l'article 29 de la convention collective nationale des ingénieurs et cadres qui dispose qu'il est alloué à l'ingénieur et au cadre licencié avant d'avoir atteint l'âge de 65 ans et sans avoir commis de faute grave une indemnité distincte de celle du préavis, ne déroge pas à la règle énoncée ci-dessus ;
D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi