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23/06/1992 | FRANCE | N°90-16650

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 23 juin 1992, 90-16650


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par la société anonyme Distribution Chardonnet, dont le siège social est ... (16e),

en cassation d'un arrêt rendu le 29 mars 1990 par la cour d'appel de Paris (15e chambre B), au profit de la société à responsabilité limitée Auto Delta, dont le siège est ...,

défenderesse à la cassation ; La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ; LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, ali

néa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 12 mai 1992, ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par la société anonyme Distribution Chardonnet, dont le siège social est ... (16e),

en cassation d'un arrêt rendu le 29 mars 1990 par la cour d'appel de Paris (15e chambre B), au profit de la société à responsabilité limitée Auto Delta, dont le siège est ...,

défenderesse à la cassation ; La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ; LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 12 mai 1992, où étaient présents :

M. Bézard, président, Mme Clavery, conseiller rapporteur, M. Hatoux, conseiller, M. Jéol, avocat général, Mme Arnoux, greffier de chambre ; Sur le rapport de Mme le conseiller Clavery, les observations de la SCP Vier et Barthélémy, avocat de la société Distribution Chardonnet, de la SCP Lesourd et Baudin, avocat de la société Auto Delta, les conclusions de M. Jéol, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ; Attendu, selon les énonciations de l'arrêt attaqué (Paris, 29 mars 1990), que, depuis 1982, la société à responsabilité limitée Auto Delta (société Auto Delta) était titulaire de contrats de concession exclusive, pour la région de Poitiers, tant avec la société Distribution Chardonnet pour les véhicules de marque Lancia et X... qu'avec la société André Y... pour les véhicules de marque Polski et Zastaba ; que les derniers contrats de concession ont été conclus le 16 avril 1986 pour une durée indéterminée à compter du 1er janvier 1986, que chaque année la société Auto Delta avait l'obligation d'adresser aux concédants la justification des cautionnements souscrits par elle en garantie de ses obligations, que, par lettres du 2 décembre 1986, les concédants ont rappelé à la société Auto Delta que sa caution bancaire arrivait à échéance le 31 décembre 1986 et qu'il convenait de la renouveler pour les mois suivants ; que, par lettre du 4 décembre 1986, les sociétés concédantes mettaient fin aux contrats du 15 décembre 1987 et précisaient que jusqu'à cette date les parties continueraient à assumer leurs obligations contractueles, que, par lettres du 26 février 1987, les sociétés concédantes faisaient connaître à la société Auto Delta que faute par elle d'avoir fourni le renouvellement du cautionnement elles n'appliquaient pas les dispositions des contrats prévoyant la résiliation de plein droit des conventions, et se contentaient de nommer "dès à présent" un second concessionnaire, que le 3 mars 1987 un contrat de concession de vente a été conclu par les sociétés concédantes avec un autre établissement, que la société Auto Delta a assigné la société Distribution Chardonnet et la société André Y..., en vue d'obtenir la résiliation des contrats à leurs torts et différentes sommes à titre de dommages-intérêts ;

Sur le premier moyen, pris en ses quatre branches :

Attendu que les sociétés concédantes font grief à l'arrêt de les avoir considérées comme seules responsables de la rupture des contrats de concession exclusive de vente de véhicules Lancia X..., Poloki et Lastoca les liant à la société Auto Delta et de les avoir en conséquence condamnées à payer in solidum à cette dernière la somme de 624 312 francs avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation, à titre de dommages et intérêts, alors, selon le pourvoi, d'une part, que les termes clairs et précis de l'article 9 des contrats litigieux stipulent que "le concessionnaire, à la demande du concédant,

constituera une garantie sous forme de caution"..., ce qui implique qu'il soit justifié sans délai de l'existence de cette garantie dès lors qu'elle a été demandée ; que la cour d'appel a constaté en l'espèce que les sociétés concédantes avaient par courrier du 2 décembre 1986 rappelé au concessionnaire que la garantie en cours venait à expiration le 31 décembre suivant, l'invitant ainsi à en constituer une nouvelle, dont l'intéressé n'a justifié qu'en mars 1987 ; qu'en déchargeant néanmoins de toute connotation fautive cette négligence manifeste et dûment constatée, la cour d'appel qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé la convention des parties et, partant, l'article 1134 du Code civil ; et alors, d'autre part, que c'est à la date d'expiration de la garantie en cours, dûment rappelée par les sociétés concédantes au concessionnaire, qu'il convenait d'apprécier les diligences accomplies par ce dernier, sans qu'interfère la portée rétroactive assignée au cautionnement produit -en mars 1987- avec plus de deux mois de retard, après qu'eût été constaté -le 26 février 1977- le défaut d'accomplissement de la formalité exigée et en refusant ainsi de considérer qu'au jour où la sanction a été prise, les sociétés concédantes étaient autorisées à la prendre, la cour d'appel a violé l'article 1147 du Code civil ; et alors, en outre, qu'il importait peu qu'aucune garantie n'ait été exigée dans les premières années d'exécution des contrats dès lors qu'il était constant que, dûment formulée, la demande n'a pas été satisfaite en temps voulu ; que le fait par ailleurs que les sociétés concédantes aient, dans leur bon vouloir, choisi d'appliquer une sanction moindre que celle normalement encourue par le concessionnaire, pour n'avoir pas répondu à la demande de garantie, n'était pas de nature à atténuer les négligences dont il a été ouvertement reconnu coupable ; qu'en écartant ainsi par des considérations totalement inopérantes toute faute de la société auto Delta, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article 1147 du Code civil ; et alors enfin, qu'il ne pouvait être valablement reproché aux sociétés concédantes d'avoir fait preuve de clémence en appliquant une sanction moindre que celle normalement encourue et en installant ainsi un nouveau concessionnaire, non à la place de la société Auto Delta comme elles auraient pu le faire, mais à ses côtés ; qu'en retenant néanmoins à cet égard la faute des sociétés

concédantes, la cour d'appel a violé l'article 1147 du Code civil ; Mais attendu que, dès lors, que les contrats de concession avaient été valablement résiliés le 4 décembre 1986 par les sociétés concédantes avec effet du 14 décembre 1987, la cour d'appel avait seulement à déterminer si le motif pris que la société Auto Delta n'avait pas fourni le renouvellement de sa caution permettait aux sociétés concédantes un manquement à leurs obligations contractuelles en désignant un second concessionnaires dans la zone d'exclusivité ; qu'après avoir constaté que les sociétés concédantes n'avaient aucune raison de douter du renouvellement de la garantie, que compte tenu des usages entre les parties la société Auto Delta avait pu penser que comme les années précédentes il était admis que les cautions pouvaient être renouvellées avec un certain retard, qu'après avoir relevé que la décision de nommer un nouveau concessionnaire exigeait plusieurs mois d'études et de pourparlers, que la société de Distribution
Y...
avait satisfait aux commandes du nouveau concessionnaire formulées dès le 16 janvier 1987 et que la société André Y... avait pris en compte des commandes adressées par lui depuis le 19 janvier 1987, elle a retenu que la négligence commise par la société Auto Delta était un faux prétexte pour justifier les relations commerciales entretenues par les sociétés concédantes avec un nouveau concessionnaire ; qu'elle retient, en outre, que la décision de nommer un second concessionnaire équivalente à un retrait de l'exclusivité ne se rattache à aucun des cas prévus par les contrats, qu'en l'état de ces constatations et appréciations, abstraction faite du motif surabondant, relatif au seul défaut de justification de la caution, elle a légalement justifié sa décision ; d'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ; Sur le second moyen, pris en ses deux branches :

Attendu que les sociétés Distribution Chardonnet et André Y... font grief à l'arrêt de les avoir condamnées à payer à la société Auto Delta la somme de 642 312 francs avec intérêts au taux légal à compter du 23 novembre 1987 et d'avoir, confirmant à cet égard le jugement entrepris, condamné la société Distribution Chardonnet à payer à la société Auto Delta une somme de 150 000 francs contre reprise d'un stock de pièces détachées, alors, selon le pourvoi, d'une part, que si la réparation d'un dommage doit être intégrale, elle ne saurait en tout cas excéder le

montant du préjudice réellement subi ; qu'ayant alloué en l'espèce à la société Auto Delta une somme globale de 153 328 francs au titre du préjudice ayant découlé de pertes sur les ventes de pièces détachées et pertes sur les primes d'objectifs afférents à ces ventes, la cour d'appel n'avait pas à ordonner en sus, fût-ce à titre de "complément d'indemnisation" la reprise desdites pièces détachées contre remboursement ; qu'en réparant ainsi deux fois le même préjudice elle a violé l'article 1147 du Code civil ; et alors, d'autre part, qu'en tout état de cause, à supposer que la reprise des pièces détachées ait pu être ordonnée, cette reprise ne

pouvait se faire qu'aux conditions contractuellement prévues à l'article 8 de la convention, stipulant que la reprise "ne pourra pas dépasser en valeur le montant des achats HT effectués par le concessionnaire au concédant pendant les six mois précédant la date d'expiration du contrat de concession..." et que "le prix d'achat par le concédant sera celui du tarif client en vigueur... diminué de 60 %... ; " qu'en refusant d'appliquer ces stipulations claires et précises, la cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil ; Mais attendu qu'après avoir constaté que l'inventaire des pièces détachées faisait ressortir leur prix d'achat consenti au concessionnaire à la somme de 158 335,54 francs HT arrondi à 160 000 francs HT, que c'est par la faute de la société Chardonnet Distribution que la société Auto Delta n'avait pu les écouler au cours de l'année 1987, la cour d'appel a fait l'exacte application de l'article 1149 du Code civil, en décidant que les dispositions contractuelles sur la détermination du prix de reprise du stock devaient être écartées, que les pièces détachées devaient être reprises au prix figurant à l'inventaire, et que la somme ainsi calculée est distincte de l'indemnisation du préjudice relatif aux pertes sur les ventes de pièces détachées ; d'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses deux branches ; Sur la demande présentée au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile :

Attendu que la société Auto Delta sollicite, sur le fondement de ce texte, l'allocation d'une somme de 10 000 francs ; qu'il serait inéquitable d'accueillir cette demande ; PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ; Rejette la demande présentée par la société Auto Delta sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 90-16650
Date de la décision : 23/06/1992
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

VENTE - Vente commerciale - Exclusivité - Concession exclusive de vente - Rupture - Contrat à durée indéterminée - Faux prétexte à résiliation de la part du concédant.

VENTE - Vente commerciale - Exclusivité - Concession exclusive de vente - Reprise d'un stock de pièces détachées - Prix figurant à l'inventaire - Indemnisation du préjudice résultant d'une résiliation.


Références :

Code civil 1134 et 1147

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 29 mars 1990


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 23 jui. 1992, pourvoi n°90-16650


Composition du Tribunal
Président : Président : M. BEZARD

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1992:90.16650
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