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12/05/1992 | FRANCE | N°90-16307

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 12 mai 1992, 90-16307


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par la société Coopérative agricole Vienne-Loire dite "CAVL", venant aux droits et obligations de la société Coopérative agricole des producteurs de la région de Chatellerault (SCAC) (à la suite de la fusion absorption de la Coopérative agricole du Nord de la Vienne :

Vienor), dont le siège social est à Ingrandes-sur-Vienne (Vienne),

en cassation d'un arrêt rendu le 18 avril 1990 par la cour d'appel de Poitiers (chambre civile, 1ère section), a

u profit de M. Antoine F..., agissant ès qualités de liquidateur de M. Jean-Paul...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par la société Coopérative agricole Vienne-Loire dite "CAVL", venant aux droits et obligations de la société Coopérative agricole des producteurs de la région de Chatellerault (SCAC) (à la suite de la fusion absorption de la Coopérative agricole du Nord de la Vienne :

Vienor), dont le siège social est à Ingrandes-sur-Vienne (Vienne),

en cassation d'un arrêt rendu le 18 avril 1990 par la cour d'appel de Poitiers (chambre civile, 1ère section), au profit de M. Antoine F..., agissant ès qualités de liquidateur de M. Jean-Paul D..., demeurant en cette qualité ...,

défendeur à la cassation ; La demanderesse invoque à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt :

LA COUR, en l'audience publique du 17 mars 1992, où étaient présents :

M. Bézard, président, Mme Pasturel, conseiller rapporteur, MM. B..., G..., Z..., A..., X..., E...
Y..., MM. Lassalle, Tricot, conseillers, MM. C..., Rémery, conseillers référendaires, M. Curti, avocat général, Mme Arnoux, greffier de chambre ; Sur le rapport de Mme le conseiller Pasturel, les observations de la SCP Desaché et Gatineau, avocat de la société Coopérative agricole Vienne-Loire, de la SCP Boré et Xavier, avocat de M. F..., ès qualités, les conclusions de M. Curti, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ; ! - Attendu, selon l'arrêt attaqué (Poitiers, 18 avril 1990) qu'après la mise en redressement puis en liquidation judiciaires de M. D..., le liquidateur, invoquant l'existence d'une société créée de fait entre le débiteur et la société Coopérative Agricole des Producteurs de la région de Chatellerault, aux droits de laquelle se trouve la société Coopérative Vienne-Loire (la Coopérative), a demandé l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire à l'égard de cette dernière ; qu'après avoir estimé que les éléments nécessaires à l'existence d'une société créée de fait n'étaient pas réunis en l'espèce, le tribunal de commerce se fondant sur le soutien abusif apporté à M. D... par la Coopérative, l'a condamnée à payer la totalité du passif vérifié et admis du débiteur ; que la cour d'appel, statuant en application des dispositions de l'article 79 du nouveau Code de procédure civile après avoir dit qu'en l'absence d'existence d'une société créée de fait le tribunal de grande instance était compétent pour connaître d'une action en responsabilité contre la Coopérative, a décidé que celle-ci serait tenue de payer la totalité du passif vérifié et admis de M. D... ;

Sur le premier moyen ; Attendu que la Coopérative fait grief à l'arrêt d'avoir déclaré recevable en cause d'appel la demande du liquidateur tendant à obtenir la condamnation de la Coopérative à supporter le passif du débiteur, alors, selon le pourvoi, qu'une action en responsabilité civile exercée par un syndic contre un

créancier n'a ni la même cause, ni les même fins, qu'une action tendant à voir ouvrir contre ce dernier

une procédure de redressement judiciaire, non pas en raison de ses fautes, mais de sa seule qualité d'associé d'une prétendue société de fait qui aurait existé entre ce créancier et le débiteur ; qu'en l'espèce, sans faire état dans son assignation d'une faute quelconque de la Coopérative, le liquidateur s'est borné à réclamer l'ouverture d'une procédure judiciaire contre cette dernière, en sa seule qualité d'associée de la société de fait qui aurait existé entre elle et M. D... ; qu'en déclarant néanmoins que son action en responsabilité exercée en cause d'appel contre la Coopérative ne constituait pas une prétention nouvelle, la cour d'appel a violé les articles 564 et suivants du nouveau Code de procédure civile ; Mais attendu que le liquidateur ayant fait valoir dans les motifs de l'assignation que, loin de se comporter comme un fournisseur ordinaire, la Coopérative avait imposé à M. D... des conditions d'exploitation tellement exorbitantes qu'elle ne pouvait qu'avoir gravement engagé sa responsabilité dans la situation de liquidation judiciaire du débiteur, c'est à bon droit que la cour d'appel a décidé que la demande fondée en cause d'appel sur la faute de la Coopérative et tendant à faire supporter par celle-ci à titre de réparation la totalité du passif était virtuellement comprise dans la prétention initiale et ne constituait pas une demande nouvelle ; que le moyen n'est pas fondé ; Et sur le second moyen, pris en ses cinq branches ; Attendu que la Coopérative reproche aussi à l'arrêt de l'avoir condamnée à payer la totalité du passif vérifié et admis de M. D..., alors, selon le pourvoi, d'une part, que ne commet aucune faute de nature à engager sa responsabilité le créancier qui renonce à réclamer sa créance exigible en accordant des délais à son débiteur en difficulté, fût-ce dans le seul but de maintenir du crédit à ce dernier et d'augmenter ainsi ses chances d'obtenir à terme le remboursement de la totalité de sa créance ; qu'en l'espèce, rien ne pouvait empêcher le Crédit Agricole, seul créancier auquel l'arrêt attaqué a prétendu que la

Coopérative avait causé un préjudice, de s'opposer à ce qu'un crédit soit artificiellement consenti au débiteur, soit en refusant de prêter des fonds à M. D..., soit en provoquant son dépôt de bilan ; qu'en faisant supporter cette carence de la banque par la Coopérative, laquelle n'avait fait qu'exercer ses droits et préserver ses intérêts, sans commettre de faute, la cour d'appel a violé l'article 1382 du Code civil ; alors, d'autre part, que ne commet aucune faute le créancier qui procure du crédit à un commerçant, qui bien que connaissant des

difficultés financières, ne se trouve pas dans une situation irrémédiablement compromise ; qu'en affirmant par un motif d'ordre général que M. D... se trouvait "à l'évidence dans un état de cessation de paiements" au jour de la signature du protocole litigieux, sans justifier en fait de l'impossibilité pour le débiteur de faire face à son passif exigible avec son actif disponible, au jour de ce protocole ou dans un avenir prévisible, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du Code civil, alors encore, qu'il résultait des relevés bancaires de M. D... en date des 4 et 14 janvier 1978, et donc antérieurs à la signature du protocole, qu'une ouverture de crédit d'un montant de 248 000 francs lui avait déjà été consentie par le Crédit Agricole ; que son compte présentait alors un solde débiteur qui s'élevait à un montant de 150 000 francs ; qu'en déclarant que le protocole litigieux avait aggravé la situation de M. D... par les conditions de remboursement d'un prêt et d'une prise d'hypothèque sur ses biens, sans rechercher si ce prêt n'avait pas été consenti par le Crédit agricole antérieurement à la signature de ce protocole, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du Code civil ; alors, en outre, qu'en condamnant la Coopérative à supporter la totalité du passif de M. D..., sans justifier, ni même constater, que ce passif correspondait effectivement au préjudice causé par la faute de cette dernière, la cour d'appel n'a pas mis la Cour de Cassation en mesure d'exercer son contrôle sur le lien de causalité entre la faute et le préjudice, et a privé sa décision de base légale au regard des dispositions de l'article 1382 du Code civil ; et alors, enfin, que les dispositions de l'article 180 de la loi du 25 janvier 1985, autorisant le tribunal à mettre à la charge d'un dirigeant de fait ou de droit l'insuffisance d'actif du débiteur, ne peuvent recevoir

application qu'en cas de redressement ou de liquidation judiciaires d'une personne morale ; qu'en faisant application de ces dispositions à l'encontre d'un créancier d'une personne physique en liquidation judiciaire, la cour d'appel a violé par fausse application le texte susvisé ; Mais attendu, en premier lieu, que le jugement entrepris ayant d'un côté relevé que lors de la signature du protocole du 19 janvier 1978 par lequel la Coopérative s'était arrogé un véritable pouvoir de contrôle et de décision sur la gestion de l'entreprise, M. D... se trouvait en état de cessation des paiements, et d'un autre côté condamné la Coopérative à payer la totalité du passif vérifié et admis du débiteur incluant la créance du Crédit Agricole, il ne résulte ni de ses conclusions ni de l'arrêt que la Coopérative ait soutenu devant la cour d'appel l'argumentation dont font état les deuxième et quatrième branches ainsi que l'argumentation de la première branche en tant qu'elle se fonde sur la carence du Crédit Agricole ; Attendu, en second lieu, que dans ses conclusions d'appel, la

Coopérative avait précisé qu'une ouverture de crédit à hauteur de 216 000 francs avait été consentie par le Crédit Agricole "parallèlement" à la conclusion du protocole ; que, dès lors, elle n'est pas recevable à présenter un grief incompatible avec ses propres écritures ; Attendu, enfin, que l'arrêt retient que, visant à l'apurement de la dette de M. D..., le protocole avait été établi au profit immédiat de la Coopérative qui ne prenait en contrepartie aucun risque et que celle-ci, en permettant la poursuite d'une activité qu'elle savait déficitaire, avait à la fois aggravé la situation du débiteur par les conditions de remboursement d'un prêt que le Crédit Agricole ne lui aurait pas autrement consenti et causé un préjudice aux tiers, le Crédit Agricole restant créancier lors de l'ouverture de la procédure collective d'une somme de 100 000 francs ; que de ces constatations et appréciations, la cour d'appel a pu déduire l'existence d'une faute de la Coopérative, sans faire application à celle-ci du texte visé à la cinquième branche ; D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli en aucune de ses branches ; PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 90-16307
Date de la décision : 12/05/1992
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

(pour le 1er moyen) APPEL CIVIL - Demande nouvelle - Définition - Recevabilité - Demande virtuellement comprise dans les prétentions initiales - Constatations suffisantes.


Références :

Nouveau Code de procédure civile 565

Décision attaquée : Cour d'appel de Poitiers, 18 avril 1990


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 12 mai. 1992, pourvoi n°90-16307


Composition du Tribunal
Président : Président : M. BEZARD

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1992:90.16307
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