LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par la banque San Paolo, anciennement dénommée banque Vernes et commerciale de Paris, dont le siège social est à Paris (8e), ...,
en cassation d'un arrêt rendu le 22 mai 1990 par la cour d'appel de Paris (15e chambre, section A), au profit de M. Henri X..., demeurant à Paris (5e), ...,
défendeur à la cassation ; La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ; LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 28 janvier 1992, où étaient présents :
M. Jouhaud, président, Mme Delaroche, conseiller rapporteur, M. Viennois, conseiller, Mme Flipo, avocat général, Mlle Ydrac, greffier de chambre ; Sur le rapport de Mme le conseiller Delaroche, les observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, avocat de la banque San Paolo, les conclusions de Mme Flipo, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ; Sur le moyen unique, pris en ses deux branches :
Attendu, selon les énonciations des juges du fond, que par acte sous seing privé du 31 mars 1982, M. Henri X... a donné à la banque Vernes et commerciale de Paris, devenue banque San Paolo, (la banque) sa caution personnelle et solidaire pour le remboursement de toutes les sommes qui peuvent ou pourront lui être dues par la société "l'Abbaye" pour quelque cause que ce soit et quel qu'en soit le montant ; que la mention manuscrite "tous engagements" figurait après ces termes ; qu'à la fin de l'acte figurait également la mention manuscrite "Bon pour cautionnement solidaire et indivisible à concurrence de tous engagements", "je dis indivisible", suivie de la signature ; que pour s'opposer à la demande de la banque qui lui réclamait paiement de la somme de 1 280 157,98 francs, montant de sa créance produite au passif de la liquidation des biens de la société "l'Abbaye", M. X... a invoqué la nullité de son engagement ; que la cour d'appel (Paris, 22 mai 1990), a annulé l'acte du 31 mars 1982 ; Attendu que la banque San Paolo reproche à l'arrêt d'avoir ainsi statué alors, selon le moyen, d'une part, qu'une mention manuscrite exprimant sous une forme quelconque mais de façon explicite et non équivoque, la connaissance que la caution a de la nature et de l'étendue de l'obligation contractée suffit à la validité de l'acte de cautionnement pour une somme non chiffrée ;
qu'en décidant que les formules "illimité" ou "sans limitation de montant" sont seules suffisamment explicites pour faire prendre conscience au souscripteur de la gravité de l'obligation qu'il accepte de prendre, la cour d'appel a violé les articles 1326 et 2015 du Code civil par l'exigence d'une condition que ces textes ne comportent pas ; alors, d'autre part, qu'en ne recherchant pas, comme elle y était invitée, si M. X... n'avait pas, par son comportement, manifesté des liens étroits l'attachant à la société "l'Abbaye", révélateurs d'une
nécessaire connaissance de la situation de celle-ci de nature à suppléer à l'éventuel laconisme de l'acte de cautionnement, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ; Mais attendu, en premier lieu, qu'appréciant souverainement le sens et la portée des mentions manuscrites, les juges du second degré ont estimé que le terme "indivisible" n'était qu'une redondance du caractère solidaire du cautionnement et ne qualifiait en aucun cas le montant de l'engagement ; que, de même, ils ont estimé que l'expression répétée deux fois "à concurrence de tous engagements" ne concernait que la diversité des causes juridiques d'obligation ; qu'ils en ont déduit qu'à défaut de termes plus explicites M. X... n'avait pu avoir pleine conscience des obligations qu'il prenait en qualité de caution solidaire ; que par ces motifs et sans ajouter aux exigences des articles 1326 et 2015 du Code civil, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ; qu'en second lieu la banque San Paolo s'est bornée, dans ses conclusions à affirmer l'existence de liens étroits entre M. X... et la société "l'Abbaye" ; que les juges, qui n'ont pas à suppléer à la carence d'une partie dans l'administration de la preuve, ont relevé que M. X... agissait comme simple particulier et que la banque n'établissait pas qu'il avait un intérêt quelconque dans la gestion de la société ou qu'il en contrôlait le fonctionnement ; D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ; PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;