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25/02/1992 | FRANCE | N°89-18440

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 25 février 1992, 89-18440


LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

I Sur le pourvoi n° H/89-18.440 formé par la compagnie Préservatrice Foncière, société anonyme d'assurances dont le siège est Cours Michelet, à La Défense 10, Puteaux (Hauts-de-Seine),

CONTRE :

1°) la société Cofidep, aux droits de la société française Duco, dont le siège est ... (Seine-Saint-Denis),

2°) la société Bruno Z..., dont le siège est ... (Hauts-de-Seine),

3°) la société Construire, dont le siège est ... (Loir-et-Cher),

4°) le Groupe d'assurance

s mutuelles de France Y..., société d'assurances à forme mutuelle, dont le siège est ... (8ème),

II Sur le p...

LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

I Sur le pourvoi n° H/89-18.440 formé par la compagnie Préservatrice Foncière, société anonyme d'assurances dont le siège est Cours Michelet, à La Défense 10, Puteaux (Hauts-de-Seine),

CONTRE :

1°) la société Cofidep, aux droits de la société française Duco, dont le siège est ... (Seine-Saint-Denis),

2°) la société Bruno Z..., dont le siège est ... (Hauts-de-Seine),

3°) la société Construire, dont le siège est ... (Loir-et-Cher),

4°) le Groupe d'assurances mutuelles de France Y..., société d'assurances à forme mutuelle, dont le siège est ... (8ème),

II Sur le pourvoi n° C/89-18.827 formé par :

1°) la société Bruno Z...,

2°) la société Construire,

CONTRE :

1°) la société Cofidep,

2°) la compagnie Préservatrice Foncière,

III Sur le pourvoi n° X/89-19.650 formé par la société Cofidep,

CONTRE :

1°) la société Bruno Z...,

2°) la société Construire,

3°) la compagnie Préservatrice Foncière,

4°) le Groupe d'assurances mutelles de France Y...,

en cassation de l'arrêt rendu le 29 juin 1989 par la cour d'appel de Versailles (12ème chambre).

La société Cofidep a formé un pourvoi incident dans le pourvoi n° H/89-18.440 contre le même arrêt ; La compagnie Préservatrice Foncière, demanderesse au pourvoi principal n° H/89-18.440, invoque, à l'appui de son recours les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt ; La société Cofidep, demanderesse au pourvoi incident, invoque, à l'appui de son recours, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ; Les sociétés Bruno Z... et Construire, demanderesses au pourvoi n° C/89-18.827, invoquent, à l'appui de leur recours, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ; La société Cofidep, demanderesse au pourvoi n° X/89-19.650, invoque, à l'appui de son recours, les deux moyens de cassation également annexés au présent arrêt ; LA COUR, en l'audience publique du 15 janvier 1992, où étaient présents :

M. Jouhaud, président, Mme Lescure, conseiller rapporteur, MM. Viennois, Kuhnmunch, Fouret, Pinochet, Mme Delaroche, conseillers, Mme X..., M. Charruault, conseillers référendaires, M. Lupi, avocat général, Mlle Ydrac, greffier de chambre ; Sur le rapport de Mme le conseiller Lescure, les observations de la SCP Coutard et Mayer, avocat de la compagnie Préservatrice Foncière, de la SCP Mattei-Dawance, avocat de la société Cofidep, de la SCP Delaporte et Briard, avocat des sociétés Bruno Z... et Construire, de Me Vuitton, avocat du Y..., les conclusions de M. Lupi, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ; Vu leur connexité, joint les pourvois n° H/89-18.440, C/89-18.827 et X/89-19.650 ; Statuant tant sur le pourvoi incident de la société Cofidep que sur les pourvois principaux formés par la même société, la société Construire et la compagnie Préservatrice Foncière ; Attendu, que la société Duco, aux droits de laquelle se trouve la société Cofidep, a vendu à la société Bruno Z..., constructeur de maisons individuelles, de la peinture pour revêtement extérieur, dont l'application a entraîné des désordres d'ordre esthétique ;

qu'assignée en paiement du solde de cette fourniture, la société Bruno Z..., aux droits de laquelle se présente la société Construire, a formé une demande reconventionnelle en remboursement des frais par elle engagés pour la reprise des désordres et en indemnisation de son préjudice commercial ; que la société Cofidep a appelé en garantie ses assureurs, la société Groupe d'assurances mutuelles de France (Y...), aujourd'hui Groupe Azur et la compagnie d'assurance Préservatrice Foncière ; que par un premier arrêt, aujourd'hui irrévocable, la cour d'appel a fait droit à la demande en paiement de la société Cofidep à hauteur de la somme de 484 273,51 francs, a dit que les dommages causés par les produits livrés seraient pris en charge dans la proportion des deux tiers par la société Cofidep, a ordonné une expertise avant dire droit sur le préjudice subi par la société Construire, lui a alloué une indemnité provisionnelle d'un montant égal à celui de la condamnation prononcée au profit de la société Cofidep et a ordonné compensation entre les créances respectives de ces deux parties ; que l'arrêt attaqué (Versailles, 29 juin 1989), a condamné la société Cofidep au paiement d'un solde de dommages-intérêts au profit de la société Construire, a retenu la garantie de la compagnie Préservatrice Foncière, a mis hors de cause le Y... et a "débouté les parties du surplus de leurs demandes" ; Sur le premier moyen du pourvoi de la société Cofidep, pris en ses trois branches :

Attendu que la société Cofidep fait d'abord grief à l'arrêt attaqué de l'avoir condamnée à réparer le préjudice subi par la société Construire résultant du noircissement des joints, sans répondre au moyen soulevé dans ses conclusions, selon lequel ce préjudice d'ordre esthétique ne pouvait, par nature, être mis à sa charge, dès lors qu'elle n'avait pris à cet égard aucun engagement ; qu'elle reproche encore à l'arrêt une contradiction entre les motifs qui énoncent que le préjudice réparable ne doit pas comprendre la réparation des fissurations et ceux mettant à sa charge la réparation du dommage subi par les pavillons "affectés de noircissement, plus des fissures entraînant une reprise complémentaire de peinture" ; qu'elle soutient enfin que la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations en la condamnant à une indemnité correspondant à un dommage qu'elle ne devait pas réparer et a ainsi violé l'article 1147 du Code civil ; Mais attendu qu'en énonçant que le principe de la responsabilité de la société Cofidep avait été définitivement retenu par son précédent arrêt du 12 février 1986 et qu'il restait seulement à déterminer l'étendue du préjudice subi par la société Construire, lequel comprenait tous les travaux de reprise de peinture, "y compris sur les fissurations", mais non la réparation de ces fissurations elles-mêmes, non concernées par la qualité de la peinture, la cour d'appel a ainsi répondu aux conclusions invoquées et a, sans se contredire, légalement justifié sa décision ; d'où il suit que le moyen est fondé en aucune de ses branches ; Sur le premier moyen du pourvoi de la société Construire, pris en ses deux branches :

Attendu que la société Construire fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir refusé de l'indemniser de son préjudice commercial résultant de la vente de peinture

défectueuse par la société Cofidep, alors, selon le moyen, que, d'une part, en statuant ainsi la cour d'appel a méconnu l'autorité de chose jugée de son premier arrêt, qui avait admis le principe de l'existence d'un préjudice commercial subi par cette société et désigné un expert pour en chiffrer le montant ; et alors, d'autre part, qu'ayant relevé que le chiffre d'affaires de la société Construire avait baissé durant les années qui avaient suivi le sinistre, les juges du second degré ne pouvaient refuser d'indemniser le préjudice commercial de ladite société au motif que les chiffres d'affaires des autres constructeurs avaient aussi baissé, sans rechercher si la baisse du chiffre d'affaires de la société Construire n'était pas due au désordre esthétique engendré par la société Cofidep et qu'ils ont ainsi privé leur décision de base légale au regard des articles 1147 et 1149 du Code civil ; Mais attendu que la cour d'appel, qui a relevé que les pertes de parts de marché alléguées par la société Bruno Z... (Construire) n'étaient pas liées au litige qui opposait les parties et qui a décidé, dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation, que cette société ne rapportait pas la preuve de l'existence d'un préjudice commercial, n'a pas, en statuant ainsi, méconnu l'autorité de la chose jugée par son précédent arrêt, qui s'était borné, avant dire droit sur le préjudice de la société Bruno Z... (Construire), à ordonner une expertise ; que par ces énonciations elle a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est donc fondé en aucune de ses branches ; Sur le moyen unique du pourvoi incident de la société Cofidep, pris en ses diverses branches :

Attendu que la société Cofidep fait grief à l'arrêt attaqué de l'avoir déboutée de son action en garantie contre le Y... alors que, selon le moyen, la cour d'appel a privé sa décision de base légale en ne

précisant pas la cause de cette exclusion ; alors, d'autre part, qu'il n'a pas été répondu à ses conclusions qui mettaient en cause la garantie de cette société en invoquant en particulier les articles CP 7 et CP 8 de la police et de l'avenant conclus le 12 novembre 1981, et qui soutenaient, en outre, que la nature du sinistre excluait la mise en oeuvre de la "police fabricant" ; et alors enfin que, la compagnie Préservatrice Foncière contestant sa garantie, le Y... ne pouvait être dégagé de la sienne

aux motifs que sa mise en oeuvre n'avait pu intervenir qu'au delà du plafond de la police de la compagnie Préservatrice foncière et qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les articles 1134 du Code civil et 455 du nouveau Code de procédure civile ; Mais attendu que, pour exclure la garantie de la société Y... en ce qui concerne les désordres d'ordre esthétique causés par la peinture défectueuse, fournie par la société Cofidep et seuls retenus, la cour d'appel a énoncé que cette compagnie d'assurance n'avait consenti

qu'une garantie de "bonne tenue" laquelle n'était pas en cause, dès lors que cette garantie visait exclusivement "l'absence de décollement, écaillages, farinages, cloquages, tous éléments susceptibles d'altérer les propriétés de protection du revêtement" ; que, répondant par là-même aux conclusions dont elle était saisie, elle a, par ce seul motif, légalement justifié sa décision ; que le moyen ne peut être accueilli en aucune de ses branches ; Sur le premier moyen du pourvoi principal de la compagnie Préservatrice Foncière, pris en ses deuxième et troisième branches :

Attendu que la compagnie Préservatrice Foncière fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir retenu, pour la condamner à garantir la société Cofidep, que ses moyens de non-assurance et de déchéance étaient irrecevables comme ayant été, d'une part, présentés pour la première fois avant l'audience d'appel, d'autre part, invoqués tardivement, après qu'elle avait comparu à la procédure

et aux opérations de première expertise sans formuler aucune réserve précise quant aux conditions de sa garantie, alors que, en premier lieu, ces moyens, constituant des défenses au fond, pouvaient être proposés en tout état de cause et alors, en second lieu, que la renonciation à un droit ne se présume pas et doit nécessairement résulter d'un acte positif et non d'une abstention ; Mais attendu que, pour statuer comme elle a fait, la cour d'appel ne s'est fondée ni sur le moyen de procédure invoqué, ni sur la renonciation de la compagnie d'assurance à ses moyens de défense ; que ce premier moyen pris en ses deux dernières branches manque en fait et doit donc être rejeté ; Mais sur le premier moyen du pourvoi principal de la compagnie Préservatrice Foncière, pris en sa première branche :

Vu l'article L. 114-1 du Code des assurances ; Attendu que la prescription biennale édictée par ce texte n'atteint que l'action dérivant du contrat d'assurance ; qu'elle ne peut atteindre un moyen de défense opposé à une telle action ; Attendu que pour déclarer irrecevables les moyens de non-assurance et de déchéance opposés pour la première fois avant l'audience d'appel par la compagnie Préservatrice Foncière la cour d'appel a retenu qu'à cette date la prescription biennale prévue par l'article L. 114-1 du Code des assurances se trouvait acquise, l'assureur, appelé dans la cause depuis le 15 novembre 1982, soit depuis plus de deux ans, ayant comparu à la procédure et aux opérations de la première expertise sans formuler aucune réserve quant aux conditions de sa garantie ; Attendu qu'en statuant ainsi, elle a violé le texte susvisé ; Et sur le deuxième moyen du pourvoi principal de la compagnie Préservatrice Foncière :

Vu l'article 1964 du Code civil et L. 121-15 du Code des assurances ; Attendu qu'il résulte de ces textes que le contrat d'assurance ne

peut valablement porter sur un risque que l'on sait déjà réalisé ; Attendu que pour condamner la compagnie Préservatrice à garantir la société CODIFEP de la condamnation, prononcée à son encontre au profit de la société Construire, la cour d'appel a retenu que cette compagnie ne rapportait pas la preuve qui lui incombait qu'en juin 1980, au moment de la négociation de la police "R.C. fabricant" et le 7 novembre 1980, date de sa signature, la société Cofidep était informée de l'existence de sinistres importants (affectant l'application de la peinture Duco garantie) qu'elle aurait dissimulés à l'assureur, les réclamations limitées présentées à cette date par l'applicateur ne touchant que huit pavillons ; Attendu cependant, qu'en statuant ainsi, alors qu'il ressort de ces énonciations que la société Cofidep, même si elle n'était saisie que d'un nombre limité de réclamations avant la signature du contrat, savait à cette date, le risque déjà réalisé, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a méconnu les textes susvisés ; Sur le second moyen du pourvoi de la société Construire pris en sa seconde branche et sur le second moyen du pourvoi de la société Cofidep, pris en sa première branche :

Vu l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ; Attendu que, respectivement saisie par les sociétés Cofidep et Construire de demandes tendant, pour la première, à voir assortir le montant de sa créance en principal, des intérêts au taux légal

avec anatocisme, et pour la seconde, à obtenir les intérêts au taux légal de sa créance indemnitaire pour reprise des désordres à compter du jour de sa demande reconventionnelle, la cour d'appel, qui a retenu que par son précédent arrêt du 12 février 1986, elle avait définitivement fixé la créance de la société Cofidep pour sa livraison de peinture, a débouté les parties de leurs prétentions, sans répondre par aucun motif à leurs conclusions de ces chefs ; qu'en statuant ainsi, elle n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ; Et attendu qu'eu égard aux circonstances de la cause, il n'y a pas lieu de faire application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ; PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le troisième moyen de la compagnie Préservatrice Foncière, ni sur la seconde branche du second moyen de la société Cofidep et la première branche du second moyen de la société Construire :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a condamné la société Préservatrice Foncière à relever et garantir intégralement la société Cofidep du montant de la condamnation prononcée au profit de la société Construire, et en ce qu'il a débouté la société Cofidep de ses demandes d'intérêts et d'anatocisme et la société Construire de sa demande d'intérêts, l'arrêt rendu le 29 juin 1989, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris ;

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ; Condamne la société Cofidep aux dépens du pourvoi n° H/89-18.440 à l'égard de la compagnie Préservatrice Foncière et aux dépens du pourvoi incident dirigée contre le Y... et aux frais d'exécution du présent arrêt ; Laisse aux sociétés Cofidep et Construire la charge de leurs dépens respectifs dans les pourvois n°s C/89-18.827 et X/89-19.650 ; Ordonne qu'à la diligence de M. le procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit sur les registres de la cour d'appel de Versailles, en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par M. le président en son audience publique du vingt cinq février mil neuf cent quatre vingt douze.


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