.
Sur le moyen unique pris en ses trois branches :
Attendu, selon les énonciations des juges du fond, que, par contrat du 11 août 1983, intitulé " convention pour la production et la commercialisation des veaux de boucherie " et destiné à se substituer à tout contrat antérieur, Mme X... et M. Y..., négociant, ont convenu que l'éleveur n'utiliserait dans son exploitation que les aliments fournis par la maison Guillemot, laquelle garantissait en contre-partie un prix minimum de reprises des veaux ; qu'il était prévu que Mme X... achèterait les veaux au fournisseur de son choix, qu'elle demeurerait responsable de leur élevage, et qu'elle vendrait les animaux engraissés à l'abattoir de son choix ; que ce premier contrat a été complété par une " convention de prêt de matériel ", aux termes de laquelle M. Y... mettait à la disposition de Mme X... un ensemble silo et trémie peseuse, l'éleveur s'engageant, en compensation de son utilisation, à acheter 170 tonnes par an d'aliment d'allaitement ; qu'enfin, Mme X... a adhéré à un Fonds de garantie créé par le groupement des éleveurs de veaux (GEV) du Carentoir, financé à 50 % par M. Y..., qui imposait à l'éleveur de vendre ses veaux, soit par l'intermédiaire de ce groupement, soit par le canal de M. Y... lui-même, en cas de mise en règlement judiciaire de l'abattoir, acquéreur des veaux ; qu'en exécution du contrat du 11 août 1983, Mme X... s'est approvisionnée en fournitures auprès de M. Y... qui a tiré 6 traites, dont 5 ont été acceptées par l'éleveur ; que, toutefois, Mme X... a refusé de régler ces traites, lors de leur présentation ; que l'arrêt infirmatif attaqué (Rennes, 5 avril 1990) a estimé que les conventions conclues en 1983 entre Mme X... et M. Y... constituaient des contrats d'intégration, et en a prononcé la nullité ;
Attendu que M. Y... fait grief à l'arrêt d'avoir ainsi statué, alors, selon le moyen, d'une part, qu'en matière d'élevage, le contrat d'intégration se caractérise par la réunion d'obligations à la charge de l'éleveur, qui doit notamment s'engager à se conformer à des règles relatives à la conduite de l'élevage, à l'approvisionnement en moyens de production ou à l'écoulement des produits finis ; qu'en affirmant que l'article 17-1 bis de la loi du 6 juillet 1964 modifiée instaure une présomption légale d'intégration fondée sur une dépendance économique tirée soit des méthodes d'élevage, soit de la fourniture des moyens de production, soit de la commercialisation des produits, la cour d'appel a violé, par fausse application, le texte susvisé ; alors, d'autre part, que la liberté de l'éleveur dans l'achat des veaux et dans la conduite de son élevage constitue une donnée incompatible avec l'existence d'un contrat d'intégration, qui suppose à tout le moins que l'éleveur ait à se conformer à des règles en ce qui concerne cette conduite de l'élevage ; qu'en jugeant différemment, l'arrêt attaqué a, de nouveau, violé la loi du 6 juillet 1964 modifiée ; et alors, enfin, que la cour d'appel se devait de s'expliquer, en l'état de la clause figurant dans le contrat signé le 11 août 1983, relative à la totale liberté du choix de l'éleveur en ce qui concerne la vente des veaux, sur la nature et l'intensité des obligations dudit éleveur ayant
seulement adhéré au Fonds de garantie d'un groupement d'éleveurs, et au regard de l'obligation de revendre les animaux en passant par le canal de groupements largement financés par le fournisseur d'aliments, en indiquant en quoi il y avait dans les faits, eu égard aux façons de procéder de l'éleveur, dépendance économique sur ce chapitre à l'endroit dudit fournisseur ; qu'en s'abstenant de procéder à cette recherche, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du même texte ;
Mais attendu qu'en vertu de l'article 17-1 bis de la loi du 6 juillet 1964 modifiée, la liberté consentie à l'agriculteur dans la conduite de son élevage n'est pas exclusive de l'existence d'un contrat d'intégration, dès lors que l'éleveur se trouve en état de dépendance économique, soit en matière d'approvisionnement en moyens de production, soit dans le domaine de la commercialisation et de l'écoulement des produits finis ; qu'ayant relevé que Mme X... était tenue de n'utiliser dans son exploitation que les aliments fournis par la maison Guillemot, dont elle devait acheter une quantité minima, la cour d'appel a, par ce seul motif et abstraction faite des énonciations surabondantes critiquées par la troisième branche du moyen, légalement justifié sa décision ;
Qu'il s'ensuit que le moyen ne peut être retenu en aucune de ses trois branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi