LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par :
1°) M. Michel Z...,
2°) Mme Josette Y..., épouse Z...,
en cassation d'un arrêt rendu le 25 janvier 1989 par la cour d'appel de Toulouse (2e Chambre), au profit :
1°) de M. X...,
2°) de Mme X...,
demeurant ensemble ... (Gers),
défendeurs à la cassation ; Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ; LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 15 octobre 1991, où étaient présents :
M. Bézard, président, M. Le Dauphin, conseiller référendaire rapporteur, M. Hatoux, conseiller, M. Jeol, avocat général, Mme Arnoux, greffier de chambre ; Sur le rapport de M. Le Dauphin, conseiller référendaire, les observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, avocat des époux Z..., de Me Ryziger, avocat des époux X..., les conclusions de M. Jeol, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ; ! Attendu, selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 25 janvier 1989), que M. et Mme Z... ont créé au début de l'année 1984 un fonds de commerce "d'esthétique et paramédical" à l'enseigne "Cellu Center" ; qu'en septembre de la même année, M. et Mme X... leur ont proposé d'acheter le fonds ; que le 22 novembre 1984 a été établi un acte sous seing privé précisant que la vente était consentie et acceptée sous la condition suspensive de l'obtention d'un prêt par les acquéreurs ; que les époux X..., qui avaient géré le fonds à partir de décembre 1984 avec l'accord des époux Z..., ont informé ces derniers en juin 1985 qu'ils n'avaient pu obtenir le prêt sollicité et qu'ils étaient, de ce fait, dans l'impossibilité de réaliser la vente ; qu'ils ont ensuite demandé au tribunal de constater la caducité de la vente et de condamner les époux Z... à leur payer diverses sommes tandis que ceux-ci, soutenant que la vente était parfaite, demandaient la condamnation des acquéreurs au paiement du prix et de dommages-intérêts ; Sur le premier moyen, pris en ses quatre branches :
Attendu que les époux Z... font grief à l'arrêt d'avoir
accueilli la demande des époux X..., alors, selon le pourvoi, d'une part, qu'il résulte de l'article 12 du nouveau Code de procédure civile que le juge "doit donner ou restituer leur exacte qualification aux faits et actes litigieux sans
s'arrêter à la dénomination que les parties en auraient proposé", si bien qu'en se bornant à constater que les parties avaient utilisé expressément la dénomination "condition suspensive" et en refusant de rechercher la véritable qualification juridique de la clause litigieuse, la cour d'appel a méconnu le texte susvisé ; alors, d'autre part, que les juges du fond ont constaté que les parties avaient la certitude que les acquéreurs obtiendraient le prêt qu'ils sollicitaient et s'étaient comportées comme si la vente était définitive, si bien qu'en se bornant à se référer à la dénomination utilisée par les parties, la cour d'appel n'a pas tiré de ses propres constatations les conséquences légales s'en évinçant nécessairement au regard des articles 1168 et 1134 du Code civil ; alors, de troisième part, qu'il résulte de l'article 1178 du Code civil que "la condition est réputée accomplie lorsque c'est le débiteur, obligé sous cette condition qui en a empêché l'accomplissement" que, selon l'article 1134, alinéa 3, du même code, les conventions "doivent être exécutées de bonne foi", si bien qu'en se bornant à affirmer qu'aucune négligence fautive ne peut être reprochée aux acquéreurs sans préciser, comme l'y invitaient la motivation du jugement entrepris et les conclusions des vendeurs, à quelle date ils avaient entrepris les démarches nécessaires, si celles-ci avaient été effectuées conformément aux prévisions de la convention et si ils avaient informé leurs cocontractants des difficultés éventuellement rencontrées, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des textes susvisés ; et alors, enfin, que le tribunal avait retenu, conformément aux déclarations des parties, à la lettre de la SICAMA du 24 juin 1985 et à celle de M. X... du 25 que le crédit avait été refusé aux acquéreurs en raison de la mauvaise exploitation qu'ils firent du fonds pendant plus de sept mois, si bien qu'en se bornant à affirmer que ce n'est qu'en raison de la modification du prix de vente que l'organisme financier a refusé le concours sans préciser sur quels éléments
de preuve elle se fondait et sans indiquer pour quelles raisons elle écartait ceux retenus et analysés par les premiers juges, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ; Mais attendu, en premier lieu, qu'après avoir retenu de l'analyse des circonstances de la cause, sans s'arrêter à la dénomination donnée par les parties à la
stipulation litigieuse, que leur commune volonté avait été de subordonner la conclusion de la vente à la condition de l'obtention d'un prêt par les époux X..., l'arrêt relève que le comportement de ces derniers ne peut être interprété comme la renonciation implicite au bénéfice de cette condition suspensive ; qu'ainsi, la cour d'appel, qui n'a pas méconnu les conséquences légales de ses propres constatations, a fait la recherche
prétendument omise ; Attendu, en deuxième lieu, que l'arrêt relève que les époux X..., qui avaient vainement pris contact avec deux établissements de crédit, sont entrés en relation avec la société Procrédit laquelle leur a donné un "accord de principe" sur l'octroi du prêt sollicité ; que celui-ci n'ayant pas été obtenu à l'expiration du délai de trois mois initialement fixé pour la réalisation de la condition suspensive, les époux Z... ont, par deux fois, expressément consenti à la prorogation de ce délai mais que l'organisme de crédit a finalement refusé son concours ; que la cour d'appel a ainsi procédé aux recherches invoquées par la troisième branche ; Attendu, enfin, que, motivant sa décision sans se borner à l'affirmation dont fait état la dernière branche, la cour d'appel retient que lai modification du prix avait révélé "la fragilité d'un fonds créé depuis un an pour l'exploitation du laser dans le traitement de la cellulite dont l'efficacité n'est pas avérée" ; que ces éléments ont conduit les organismes financiers à refuser le prêt et qu'il n'est nullement démontré que les époux X... soient intervenus pour provoquer ce refus ; D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ; Et sur le second moyen :
Attendu que les époux Z... font encore grief à l'arrêt d'avoir rejeté leur demande de dommages-intérêts fondée sur le préjudice que leur aurait causé "la mauvaise gestion puis la désertion des époux X...", alors, selon le pourvoi, qu'en s'abstenant d'exposer les motifs de sa décision sur ce point, la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ; Mais attendu que l'arrêt n'énonce dans son dispositif aucune décision concernant cette demande ; qu'il a ainsi omis de statuer sur ce point et que pareille omission, qui n'est susceptible d'être réparée que selon la procédure prévue à l'article 463 du nouveau Code de procédure civile, ne donne pas ouverture à cassation ; qu'il s'ensuit que le moyen est irrecevable ; PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;