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19/11/1991 | FRANCE | N°89-17619

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 19 novembre 1991, 89-17619


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par la société des Etablissements Carel, société anonyme, dont le siège social est sis à Paris (2ème), ...,

en cassation d'un arrêt rendu le 1er juin 1989 par la cour d'appel de Paris (4ème chambre section B), au profit :

1°) de la société S 13, société à responsabilité limitée, dont le siège social est sis à Marseille (11ème), ...,

2°) de la société anonyme Prisunic, dont le siège social est sis à Paris (9ème), ...,

défenderesses à la cassation ; La société Prisunic défenderesse au pourvoi principal a formé un pourvoi p...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par la société des Etablissements Carel, société anonyme, dont le siège social est sis à Paris (2ème), ...,

en cassation d'un arrêt rendu le 1er juin 1989 par la cour d'appel de Paris (4ème chambre section B), au profit :

1°) de la société S 13, société à responsabilité limitée, dont le siège social est sis à Marseille (11ème), ...,

2°) de la société anonyme Prisunic, dont le siège social est sis à Paris (9ème), ...,

défenderesses à la cassation ; La société Prisunic défenderesse au pourvoi principal a formé un pourvoi provoqué contre le même arrêt ; La demanderesse au pourvoi principal, invoque, à l'appui de son recours, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt ; La demanderesse au pourvoi provoqué, invoque, à l'appui de son recours, un moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ; LA COUR, composée selon l'article L. 131-1, alinéa 2, du Code de procédure civile, en l'audience publique du 8 octobre 1991, où étaient présents :

M. Bézard, président, M. Gomez, conseiller rapporteur, M. Hatoux, conseiller, M. Raynaud, avocat général, Mme Arnoux, greffier de chambre ; Sur le rapport de M. le conseiller Gomez, les observations de Me Choucroy, avocat de la société des Etablissements Carel, de la SCP Riché et Thomas-Raquin, avocat de la société S 13, de Me Garaud, avocat de la société Prisunic, les conclusions de M. Raynaud, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ; Attendu que selon l'arrêt attaqué (Paris 1er juin 1989) la société S 13, titulaire de la marque complexe Poivre X... déposée le 2 avril 1984, enregistrée sous le n° 1 274 653 pour désigner notamment des vêtements dont des "Tee-shirts" dans les classes 5 à 35 et faisant valoir des droits sur deux modèles de dessins destinés à figurer sur des vêtements, a demandé la condamnation des sociétés Etablissements Carel (société Carel) et Prisunic pour contrefaçon des modèles, imitation illicite de la marque et concurrence déloyale due au prix réduit de vente des produits argués de contrefaçon ou d'imitation illicite ; Sur les trois moyens réunis du pourvoi principal de la société Carel, repris par la société Prisunic :

Attendu que ces sociétés font grief à l'arrêt d'avoir déclaré recevable l'action en contrefaçon des modèles et d'avoir jugé que la

marque avait été "contrefaite" et que des actes de concurrence déloyale avaient été commis, alors que, selon le pourvoi, d'une part, dès lors que la cour d'appel reconnaissait

ellemême que les deux dessins constituaient des modèles figurant sur des vêtements, elle ne pouvait juger en même temps qu'ils étaient protégeables par la loi du 11 mars 1957 ; qu'en effet, s'agissant de dessins et modèles commerciaux figurant sur des marchandises destinées à la vente, leur protection est régie par la loi du 14 juillet 1909, dont les dispositions exigent que le dessin ou le modèle soit déposé pour bénéficier de la protection ; qu'ainsi, en estimant que les modèles litigieux étaient protégeables par la loi du 11 mars 1957, alors que seules les dispositions des articles ler à 4 de la loi du 14 juillet 1909 étaient applicables, la cour d'appel a violé les textes susvisés ; alors que d'autre part si, s'agissant d'une marque complexe, la reproduction de l'un des éléments suffit à caractériser la contrefaçon, encore faut-il que les éléments reproduits ne soient pas banaux, comme le sont une figure géométrique et des points noirs représentant du poivre ; que, dès lors en l'espèce, la présence sur les vêtements fabriqués par la société Carel d'un triangle et de points représentant des grains de sable, d'ailleurs tous à l'intérieur du triangle, contrairement à la marque déposée, sans que soit reproduite la dénomination poivre blanc, élément essentiel de la marque, ne pouvait induire en erreur la clientèle, même d'attention moyenne, et ne pouvait être assimilée à une contrefaçon de marque ; qu'en en jugeant autrement, la cour d'appel a violé les dispositions des articles 422-1 l° du Code pénal et 28 de la loi du 31 décembre 1964 et alors enfin que, dans ses conclusions d'appel, la société Carel avait fait valoir que, d'après S. 13 ellemême, ses produits s'adressaient à une clientèle de luxe, tandis qu'elle-même s'adresse à une clientèle désireuse d'acquérir des vêtements d'enfants à un prix serré ; qu'il appartenait dès lors aux juges du fond de rechercher si les clientèles démarchées par les deux sociétés étaient bien les mêmes ou si, tout au contraire, elles n'étaient pas totalement différentes, l'action en concurrence déloyale ne pouvait prospérer qu'en cas d'identité de clientèle ; qu'en se contentant d'affirmer qu'une partie de la clientèle de S. 13 était attirée par le prix anormalement bas des articles fabriqués par la société Carel et vendus par Prisunic,

ce dont la société S. 13 n'a d'ailleurs jamais justifié, et pour cause, la cour d'appel, qui n'a pas répondu aux conclusions dont elle était saisie, n'a pas donné de base légale à sa décision et violé les articles 1382 du Code civil et 455 du nouveau Code de procédure civile ; Mais attendu, d'une part, que le créateur d'un dessin ou modèle pouvant fonder son action cumulativement ou alternativement sur la loi du 14 juillet 1909 et sur celle du 11 mars 1957 qui concerne notamment les arts appliqués, la cour d'appel, qui a, par une appréciation souveraine concrètement motivée, retenu que les modèles

invoqués portaient la marque de la personnalité de leur auteur, a légalement justifié sa décision quant à la contrefaçon des modèles ; Attendu, d'autre part, qu'après avoir décrit la marque complexe dénominative et figurative invoquée ainsi que le modèle Superwave incriminé de la société Carel, la cour d'appel, pour retenir une imitation illicite de la marque et non une contrefaçon comme il est allégué par le pourvoi, a relevé que les éléments figuratifs caractéristiques de la marque étaient reproduits et qu'il existait un risque de confusion ; qu'elle a ainsi légalement justifié sa décision du chef critiqué ; Attendu, enfin, que si la vente d'un produit à un prix inférieur à celui pratiqué par un concurrent, n'est pas en ellemême constitutive d'une faute, il peut en être différemment si cette situation est favorisée par le profit tiré des efforts ou investissements du titulaire d'un modèle contrefait ou d'une marque illicitement imitée ; qu'après avoir relevé ces contrefaçons et imitations et constaté que toutes les sociétés en litige vendaient des "Tee-shirts", la cour d'appel a retenu qu'une partie de la clientèle était attirée par ce prix anormalement bas pour un article ressemblant à l'article original et croyait à tort faire ainsi une "bonne affaire" ; que le caractère exclusif des modèles justifiait la pratique

de prix élevés et que la marque imitée sur des articles vendus à bas prix, tendait à perdre son caractère attractif ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations la cour d'appel, répondant ainsi en les écartant aux conclusions invoquées, a pu retenir que ces agissements étaient constitutifs d'une faute ; D'où il suit qu'aucun des moyens n'est fondé ; Et sur le moyen supplémentaire du pourvoi provoqué de la société Prisunic :

Attendu qu'il est également fait grief à l'arrêt d'avoir prononcé diverses condamnations pour "contrefaçon de modèles, de marque et concurrence déloyale" alors que, selon le pourvoi, les modèles "le Surfeur dans le Triangle" et "Le Golfeur dans le Triangle" constituant des articles de l'habillement dont la protection spécifique est asurée par le dépôt qui en est fait, conformément aux dispositions des lois du 14 juillet 1909 et 12 mars 1952, et la preuve de ce dépôt n'ayant été ni rapportée ni offerte par la société S 13, la protection comme oeuvres de l'esprit au titre de la loi du 11 mars 1957, des dessins dont ces modèles d'habillement étaient les supports, ne pouvait se concevoir sans que la société S 13 ne rapporte la preuve de l'antériorité de la divulgation de ces supports par rapport à la mise en fabrication suivie de la mise en vente des modèles d'habillement constituant les supports des dessins soidisant imités ; qu'il résulte des énonciations de l'arrêt attaqué que loin de rapporter ou d'offrir de rapporter la preuve d'une antériorité de cette nature, la société S 13 s'est bornée à alléguer et la cour d'appel à constater que les deux Teeshirts supports des dessins litigieux, étaient au nombre des modèles d'habillement présentés dans un catalogue de l'année 1986, sans préciser ni rechercher si, de par sa

date de parution, cette publication unique avait permis aux sociétés défenderesses de lancer, puis de commercialiser une fabrication de modèles d'habillement constituant les supports des dessins, soidisant imités ; à défaut de quoi, les contrefaçons

et la concurrence déloyale reprochée n'étaient pas possibles ; qu'ainsi, en statuant comme elle a fait, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision par violation des dispositions de la loi du 11 mars 1957 déclarée applicable, ensemble violation de l'article 1382 du Code civil ; Mais attendu que la cour d'appel, par une appréciation souveraine des éléments de preuve soumis aux débats, a retenu que "d'après les factures et le catalogue Matos... les modèles invoqués avaient été commercialisés dès maijuin 1986 sous la marque Poivre X...", que la société Carel produisait "une facture d'achat des droits de reproduction datée du 29 septembre 1986" et que la société Prisunic avait "commandé les articles contrefaisants à une date encore bien postérieure" ; qu'ainsi elle a légalement justifié sa décision du chef critiqué ; d'où il suit que le moyen n'est pas fondé ; PAR CES MOTIFS :

REJETTE tant le pourvoi principal que le pourvoi provoqué ;


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