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12/11/1991 | FRANCE | N°88-14062

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 12 novembre 1991, 88-14062


Attendu, selon l'arrêt attaqué (Agen, 3 mars 1988), que la société Compagnie des eaux et de l'ozone (la Compagnie des eaux), chargée par le syndicat intercommunal à vocation multiple de la région Est d'Agen de l'exploitation du service public d'assainissement des eaux usées, a obtenu une ordonnance enjoignant à la société des Etablissements Vétillard (la société Vétillard), entreprise de conserverie raccordée au réseau d'assainissement, de lui verser le montant des redevances échues du 30 juin 1975 au 1er juillet 1981 ; que la société Vétillard a fait opposition à cette o

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Attendu, selon l'arrêt attaqué (Agen, 3 mars 1988), que la société Compagnie des eaux et de l'ozone (la Compagnie des eaux), chargée par le syndicat intercommunal à vocation multiple de la région Est d'Agen de l'exploitation du service public d'assainissement des eaux usées, a obtenu une ordonnance enjoignant à la société des Etablissements Vétillard (la société Vétillard), entreprise de conserverie raccordée au réseau d'assainissement, de lui verser le montant des redevances échues du 30 juin 1975 au 1er juillet 1981 ; que la société Vétillard a fait opposition à cette ordonnance ; qu'en cause d'appel, la Compagnie des eaux a formé une demande additionnelle tendant au paiement des redevances échues du deuxième semestre 1981 au premier semestre 1987 ;.

Sur le premier moyen, pris en ses quatre branches :

Attendu que la Compagnie des eaux fait grief à l'arrêt de l'avoir déboutée de sa demande portant sur les redevances échues du 30 juin 1975 au 1er juillet 1981, alors, selon le pourvoi, d'une part, qu'aux termes de l'article R. 372-6 du Code des communes, tout service public d'assainissement donne lieu à perception de redevances et qu'en vertu de l'article R. 372-8 du même Code, la redevance d'assainissement est assise sur le volume d'eau prélevé par l'usager du service ; que si l'article R. 372-12 permet, dans le cas des entreprises industrielles, commerciales ou artisanales, de corriger ce volume en hausse ou en baisse pour tenir compte des charges particulières imposées au service, c'est à la condition que le coefficient de correction soit fixé par arrêté préfectoral ; qu'il résulte de la combinaison des dispositions susvisées du Code des communes qu'à défaut d'intervention de l'arrêté préfectoral prévu à l'article R. 372-12, la dérogation qu'autorise cet article ne peut être mise en oeuvre ; qu'en conséquence, et dès lors que tout usager doit acquitter la redevance d'assainissement, il y a lieu d'appliquer la règle générale fixée à l'article R. 372-8 selon laquelle cette redevance est assise sur le volume d'eau prélevé par l'usager ; qu'en refusant en l'espèce d'appliquer la règle générale au seul motif que l'exception aurait pu jouer et en exonérant de la sorte la société Vétillard de toute redevance, bien qu'elle fût usager du service et que l'arrêt eût constaté qu'elle était redevable, la cour d'appel a violé, par refus d'application, les articles R. 372-6 et R. 372-8 du Code des communes et, par fausse interprétation, l'article R. 372-12 du même Code ; alors que, d'autre part, il appartient à l'entreprise industrielle qui, par application de l'article R. 372-12 du Code des communes, entend bénéficier d'une dérogation à l'article R. 372-8 du même Code qui asseoit la redevance sur le volume d'eau prélevé par l'usager, de solliciter du préfet l'arrêté corrigeant à son seul profit le nombre de mètre cubes prélevés servant de base à la redevance ; qu'en omettant de rechercher si la société Vétillard avait demandé une correction de l'assiette de la redevance ou si, au contraire, elle s'était contentée d'opposer devant les juges du fond à la demande de paiement de la redevance fixée conformément au droit commun de l'article R. 372-8 une hypothétique correction à son profit de l'assiette de la redevance, qu'elle n'avait jamais, en fait, sollicitée de l'autorité compétente, la cour d'appel a entaché sa

décision d'un défaut de base légale au regard des articles R. 372-7 et R. 372-12 du Code des communes ; alors que, de troisième part, c'est à l'entreprise qui invoque à son profit la modification de l'assiette de la redevance prévue à l'article R. 372-12 du Code des communes, pour refuser le paiement de la redevance fixée conformément à l'article R. 372-8 du même Code, qu'il appartient de démontrer que le degré de pollution et les éléments objectifs visés à l'article R. 372-12 justifient une révision de l'assiette de la redevance ; qu'en ne recherchant pas si la société Vétillard prouvait, ni même offrait de prouver, que ces éléments étaient de nature à permettre une correction à son profit de l'assiette de la redevance, la cour d'appel a, de plus fort, entaché sa décision d'un défaut de base légale au regard des articles R. 372-8 et R. 372-12 du Code des communes ; et alors, enfin, que la cour d'appel ne pouvait, sans contradiction, déclarer que " s'agissant d'une conserverie et ainsi qu'il résulte des pièces communiquées et soumises à la libre discussion des parties, la société Vétillard ne peut sérieusement contester le caractère pollué des eaux qu'elle rejette " et " qu'elle conteste toute pollution et qu'il n'est pas possible de prendre en considération les documents figurant au dossier de la Compagnie des eaux en raison du fait qu'ils concernent une période postérieure à celle sur laquelle la cour d'appel statue ", méconnaissant par là même les exigences de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu, en premier lieu, que c'est sans contradiction que la cour d'appel a énoncé, d'un côté, que le caractère pollué des eaux rejetées ne pouvait être contesté, et, d'un autre côté, que les documents produits ne permettaient pas d'évaluer le degré ou la forme de cette pollution ;

Attendu, en second lieu, que selon l'article R. 372-6 du Code des communes, tout service public d'assainissement, quel que soit son mode d'exploitation, donne lieu à la perception de redevances établies dans les conditions fixées par les articles R. 372-7 à R. 372-18 du même Code ; qu'en vertu de l'article R. 372-8, la redevance est assise sur le volume d'eau prélevé par l'usager du service d'assainissement sur le réseau public de distribution ou sur toute autre source ; que ce volume est calculé dans les conditions définies aux articles R. 372-9 à R. 372-12 ; qu'aux termes de ce dernier texte, lorsqu'une entreprise industrielle, commerciale ou artisanale prélève annuellement une quantité d'eau supérieure à un nombre de mètres cube d'eau fixé par arrêté interministériel, le nombre de mètres cube prélevés qui sert de base à la redevance d'assainissement est corrigé en hausse ou en baisse pour tenir compte des charges particulières imposées au service de l'assainissement, notamment par le degré ou la forme de la pollution créée par cette entreprise ; que le coefficient de correction est fixé pour chaque redevable par arrêté préfectoral, à partir notamment des éléments objectifs résultant des constatations faites lors de la procédure d'autorisation de déversement ; que l'arrêt relève que, bien que le nombre de mètres cube prélevés par la société Vétillard soit supérieur à celui à partir duquel l'assiette de la redevance d'assainissement est corrigée en hausse ou en baisse, aucun arrêté préfectoral n'a été pris ; qu'en l'absence d'un tel arrêté, qui seul

aurait permis de déterminer, en application de l'article R. 372-12 précité, l'assiette des redevances dues par la société Vétillard, la cour d'appel, qui n'avait pas à rechercher si cette société avait ou non sollicité l'intervention préfectorale, ou s'il existait des éléments de nature à permettre une correction, a décidé exactement que la Compagnie des eaux ne justifiait pas d'une créance envers la société Vétillard ;

D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

Et sur le second moyen : (sans intérêt) ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 88-14062
Date de la décision : 12/11/1991
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

EAUX - Distribution - Service municipal - Service public - Caractère industriel et commercial - Usagers - Usagers d'un réseau d'assainissement - Redevances dues à une compagnie des eaux - Coefficient de correction pour pollution - Absence d'arrêté préfectoral le fixant - Portée

Se trouve justifié l'arrêt qui déboute une compagnie des eaux chargée de l'exploitation du service public d'assainissement des eaux usées de sa demande en paiement des redevances dues par une entreprise industrielle, commerciale ou artisanale raccordée au réseau d'assainissement, en retenant, qu'en l'absence de l'arrêté préfectoral permettant de déterminer, par application de l'article R. 372-12 du Code des communes, le coefficient de correction applicable à cette entreprise en raison du degré et de la forme de la pollution qu'elle crée, cette compagnie des eaux ne justifie pas d'une créance envers cette société.


Références :

Code des communes R372-12

Décision attaquée : Cour d'appel d'Agen, 03 mars 1988


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 12 nov. 1991, pourvoi n°88-14062, Bull. civ. 1991 IV N° 341 p. 237
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1991 IV N° 341 p. 237

Composition du Tribunal
Président : Président :M. Bézard
Avocat général : Avocat général :M. Curti
Rapporteur ?: Rapporteur :M. Edin
Avocat(s) : Avocats :la SCP Vier et Barthélemy, la SCP Peignot et Garreau.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1991:88.14062
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