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05/11/1991 | FRANCE | N°89-21114

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 05 novembre 1991, 89-21114


Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... a commandé à la société Exportcom des marchandises qui devaient être livrées à Cotonou (Bénin) ; que le vendeur et l'acheteur sont convenus de ce que le prix serait réglé au moyen d'un crédit documentaire irrévocable domicilié à la Banque internationale pour l'Afrique occidentale (la BIAO) ; que Mme X... a demandé à la Banque commerciale du Bénin (la BCB) d'ouvrir le crédit et lui a précisé les documents au vu desquels le paiement devrait être effectué ; que la BCB, par l'intermédiaire de la Banque internationale arabe (la B

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Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... a commandé à la société Exportcom des marchandises qui devaient être livrées à Cotonou (Bénin) ; que le vendeur et l'acheteur sont convenus de ce que le prix serait réglé au moyen d'un crédit documentaire irrévocable domicilié à la Banque internationale pour l'Afrique occidentale (la BIAO) ; que Mme X... a demandé à la Banque commerciale du Bénin (la BCB) d'ouvrir le crédit et lui a précisé les documents au vu desquels le paiement devrait être effectué ; que la BCB, par l'intermédiaire de la Banque internationale arabe (la BIA), qui a confirmé le crédit, a donné instruction à la BIAO de notifier l'accréditif à l'exportateur et de réaliser le crédit ; que la BIAO, après s'être fait remettre les fonds par la BIA, a payé le montant du crédit à la société Exportcom ; que les marchandises n'ont pas été livrées ; que Mme X... a engagé, à l'encontre de la société Exportcom et de son dirigeant, des procédures civiles et pénales qui n'ont pas été suivies d'effet ; qu'ultérieurement, invoquant les fautes commises par la BIAO et la BCB, elle a assigné ces banques en remboursement de la somme versée au titre du crédit documentaire, outre intérêts et dommages-intérêts ; que la cour d'appel a décidé que la BCB avait commis une faute contractuelle et la BIAO une faute quasi délictuelle et a prononcé, à l'encontre de ces deux banques, une condamnation in solidum ;.

Sur le premier moyen du pourvoi incident de la BCB, pris en ses deux branches :

Attendu que la BCB fait grief à l'arrêt de l'avoir condamnée à payer à Mme X... des sommes déterminées, alors, selon le pourvoi, d'une part, qu'en s'abstenant de rechercher si la fourniture d'un certificat d'assurance d'une vente CAF (coût-assurance-fret), que la cour d'appel reproche aux banques de ne pas avoir exigé, aurait permis d'éviter le dommage causé à Mme X... qui avait exercé en vain un recours sur le fondement de la police d'assurance maritime souscrite effectivement en l'espèce et sans préciser en quoi une assurance de risques du transport aurait permis de couvrir l'escroquerie des dirigeants de la société Exportcom qui n'avaient même pas procédé à l'expédition des marchandises, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du Code civil ; et alors, d'autre part, que, selon l'article L. 172-13 du Code des assurances applicable au litige, l'assureur ne répond pas des fautes intentionnelles ou lourdes de l'assuré ; qu'en énonçant que l'assurance des marchandises vendues CAF à Mme X... aurait permis d'obtenir le remboursement de leur prix, tout en relevant que les dirigeants de la société Exportcom avaient commis une escroquerie à son égard, que la juridiction répressive a condamné du chef de faux documents d'expédition qui ont été remis pour obtenir le versement du crédit documentaire, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations au regard du texte susvisé ;

Mais attendu que la BCB, qui prétendait, dans ses conclusions d'appel, que son obligation devait être soigneusement distinguée du rapport fondamental, que son engagement était étranger au contrat de vente négocié et conclu par Mme X..., qu'il devait être exclusivement analysé au regard du processus de paiement et que le tribunal de commerce avait erré en liant l'engagement des banquiers au défaut de livraison des marchandises, ne peut soutenir devant la Cour de Cassation un moyen qui, en tant qu'il invoque des circonstances tenant à l'inexécution du contrat de base pour dénier tout effet à une police d'assurance qui aurait couvert le transport des marchandises vendues, est incompatible avec la thèse qu'elle a développée devant les juges du second degré ; d'où il suit que le moyen n'est recevable ni en l'une ni en l'autre de ses branches ;

Sur le deuxième moyen du pourvoi incident de la BCB, pris en ses deux branches et sur le troisième moyen : (sans intérêt) ;

Mais sur le premier moyen du pourvoi principal de la BIAO, pris en ses deux branches :

Vu l'article 1383 du Code civil, ensemble les articles 7 et 9 des règles et usances uniformes relatives aux crédits documentaires, dans leur rédaction résultant de la révision de 1974, et applicables en la cause ;

Attendu que, pour décider que la BIAO avait commis une faute quasi délictuelle à l'égard de Mme X..., la cour d'appel, après avoir énoncé que le banquier chargé de la réalisation du crédit a l'obligation de vérifier avec un soin raisonnable la conformité des documents présentés par le vendeur avec ceux énumérés dans l'accréditif, qu'en effectuant sa vérification de façon purement passive il n'agit pas avec le soin raisonnable attendu de lui et qu'une telle vérification, dès lors qu'elle ne relève pas une irrégularité ou une omission grossières, engage sa responsabilité, retient qu'en l'espèce, quand bien même la BCB n'avait pas retransmis l'instruction du donneur d'ordre relative à l'assurance, la BIAO ne pouvait pas ne pas remarquer l'anomalie dangereuse que constituait l'absence de tout document d'assurance dans une opération de cette nature, alors que la vente était conclue CAF (coût-assurance-fret), qu'en la circonstance, il entrait dans sa mission de reporter la levée des documents et d'en référer à la banque émettrice et qu'en s'abstenant de le faire, elle avait commis une faute de négligence ;

Attendu qu'en statuant ainsi, alors que la BIAO, banque notificatrice, chargée en outre de la réalisation du crédit, devait notifier au bénéficiaire l'accréditif, tel qu'établi par la banque émettrice, et vérifier, avant de payer, si les documents présentés étaient conformes à ceux énumérés, mais n'était tenue d'aucune autre diligence, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales qui résultaient de ses propres constatations ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le second moyen du pourvoi principal de la BIAO :

REJETTE le pourvoi incident de la BCB ;

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a retenu le responsabilité quasi délictuelle de la BIAO et a prononcé une condamnation à l'encontre de cette banque, l'arrêt rendu le 19 septembre 1989, entre les parties, quant à ce, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 89-21114
Date de la décision : 05/11/1991
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

1° CASSATION - Moyen - Moyen contraire aux conclusions prises devant les juges du fond.

1° Est irrecevable, devant la Cour de Cassation, un moyen qui est incompatible avec la thèse développée par l'auteur du pourvoi devant les juges du second degré.

2° BANQUE - Crédit documentaire - Obligations du banquier - Paiement - Conditions - Notification de l'accréditif tel qu'établi par la banque émettrice - Documents conformes aux conditions du crédit.

2° La banque notificatrice d'un crédit documentaire, chargée en outre de la réalisation de ce crédit, doit notifier au bénéficiaire l'accréditif tel qu'établi par la banque émettrice, et vérifier, avant de payer, si les documents présentés sont conformes à ceux énumérés ; elle n'est tenue d'aucune autre diligence.


Références :

Code civil 1383

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 19 septembre 1989

A RAPPROCHER : (1°). Chambre civile 1, 1990-03-06 , Bulletin 1990, I, n° 90, p. 59 (rejet)

arrêt cité. (2°). Chambre commerciale, 1987-11-24 , Bulletin 1987, IV, n° 246, p. 183 (cassation)

arrêt cité.


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 05 nov. 1991, pourvoi n°89-21114, Bull. civ. 1991 IV N° 328 p. 228
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1991 IV N° 328 p. 228

Composition du Tribunal
Président : Président :M. Bézard
Avocat général : Avocat général :M. Raynaud
Rapporteur ?: Rapporteur :M. Dumas
Avocat(s) : Avocats :la SCP Le Prado, la SCP Piwnica et Molinié, M. Choucroy.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1991:89.21114
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