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05/11/1991 | FRANCE | N°89-13506

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 05 novembre 1991, 89-13506


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par la société anonyme Chapp's, dont le siège social est sis à Paris (2e), ...,

en cassation d'un arrêt rendu le 5 janvier 1989 par la cour d'appel de Paris (4e chambre B), au profit de la société Flash (anciennement société à responsabilité limitée Chana's), dont le siège est à Paris (2e), ...,

défenderesse à la cassation ; La société Flash (anciennement société Chana's), défenderesse au pourvoi principal a formé un pourvoi incident

contre le même arrêt ; La demanderesse au pourvoi principal, invoque, à l'appui de son re...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par la société anonyme Chapp's, dont le siège social est sis à Paris (2e), ...,

en cassation d'un arrêt rendu le 5 janvier 1989 par la cour d'appel de Paris (4e chambre B), au profit de la société Flash (anciennement société à responsabilité limitée Chana's), dont le siège est à Paris (2e), ...,

défenderesse à la cassation ; La société Flash (anciennement société Chana's), défenderesse au pourvoi principal a formé un pourvoi incident contre le même arrêt ; La demanderesse au pourvoi principal, invoque, à l'appui de son recours, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ; La demanderesse au pourvoi incident, invoque, à l'appui de son recours, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ; LA COUR, en l'audience publique du 17 juillet 1991, où étaient présents :

M. Bézard, président, M. Leonnet, conseiller rapporteur, M. Y..., Mme A..., MM. Vigneron, Leclercq, Dumas, Gomez, conseillers, M. Z..., Mme Geerssen, conseillers référendaires, M. Raynaud, avocat général, Mme Arnoux, greffier de chambre ; Sur le rapport de M. le conseiller Leonnet, les observations de Me Choucroy, avocat de la société Chapp's, de Me Baraduc-Benabent, avocat de la société Flash (anciennement société Chana's), les conclusions de M. Raynaud, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ; Sur le premier moyen du pourvoi principal, pris en ses deux branches :

Attendu qu'il résulte des énonciations de l'arrêt attaqué (Paris, 5 janvier 1989) que les consorts X... ont créé en 1983 à Paris, avec d'autres associés, la société Chapp's ayant pour objet la commercialisation de vêtements et de tous articles textiles dont ils détenaient un tiers des actions ; qu'entre le 26 novembre 1985 et le 10 janvier 1986 quatre salariés quittèrent la société pour entrer dans une entreprise concurrente, la société Chana's constituée le 26 novembre 1985 par M. Bruno X... nommé gérant de cette société deux jours plus tard et avant que sa démission de la précédente n'ait été acceptée ; que le représentant légal de la société Chapp's estimant que les agissements de la société Chana's étaient constitutifs de concurrence déloyale tant au regard de la date de constitution de l'entreprise Chana's, de la nomination de son gérant, de la raison sociale utilisée, de son implantation, du débauchage du personnel, que de l'adoption d'un logo très proche et d'un système de référence similaire, a saisi la juridiction consulaire en vue d'obtenir sa condamnation au paiement de dommages et intérêts ; Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt, qui a partiellement accueilli la demande de la société Chapp's, de l'avoir déclarée mal fondée à reprocher à la société Chana's d'avoir désigné M. Bruno X... en qualité de gérant statutaire à une période où il était encore salarié, alors, d'une part, selon le pourvoi, que ces moyens soulevés par les juges du fond n'avaient pas été invoqués par la

société Chana's et que la cour d'appel ne pouvait donc les retenir d'office sans

inviter auparavant les parties à s'expliquer ; qu'en statuant ainsi, l'arrêt attaqué a méconnu les droits de la défense et violé l'article 16 du nouveau Code de procédure civile ; alors, d'autre part, ainsi que le jugement entrepris, dont la société Chapp's demandait la confirmation l'avait relevé, le salarié, pendant toute la durée de son contrat de travail, est tenu envers son employeur d'une obligation de non-concurrence, que, dès lors, la société Chana's ne pouvait, sans méconnaître cette obligation, nommer M. Bruno X... en qualité de gérant alors que celui-ci était encore salarié de la société Chapp's ; que, dès lors, l'arrêt attaqué, qui a relevé que M. Bruno X... avait été nommé gérant de la société Chana's le 28 novembre 1985 et n'avait démissionné que le 13 décembre 1985, ne pouvait, sans tirer de ses propres constatations les conclusions qui s'imposaient, et sans dénaturer les éléments du débat, estimer que cette nomination ne constituait pas un acte de concurrence déloyale aux motifs que le salarié n'était tenu, à l'expiration de son contrat de travail, d'aucune clause de non-concurrence ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les articles 1382 du Code civil, 455 et 458 du nouveau Code de procédure civile ; Mais attendu que les éléments retenus par l'arrêt pour débouter la société Chapp's de sa demande avaient été exposés dans les conclusions de la société Chana's et se trouvaient donc dans le débat ; qu'en relevant que la société Chapp's n'établissait pas que la constitution de la société concurrente avait été effectuée "pendant le temps de travail qu'il devait à son employeur jusqu'à la date de sa démission", ce qui implique que celui-ci n'avait commencé à exercer ses fonctions de gérant que postérieurement à cette démission acceptée par son ancien employeur, la cour d'appel a pu décider que ces faits ne constituaient pas une faute ; que le moyen n'est pas fondé ; Sur le second moyen du pourvoi principal, pris en ses deux branches :

Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt de s'être fondé, pour déterminer le montant du préjudice, sur les seuls faits déloyaux établis à l'encontre de la société Chana's, alors, d'une part, selon le pourvoi, que le montant du préjudice subi par un commerçant victime d'actes de concurrence déloyale n'est pas proportionnel au nombre de faits déloyaux retenus, mais est représenté par les pertes subies et établies ; qu'ainsi, en retenant parmi les éléments d'appréciation du préjudice de la société Chapp's les seuls faits déloyaux déclarés établis, l'arrêt attaqué a violé l'article 1382 du Code civil ; et alors, d'autre part, que celle-ci avait fait valoir, dans ses conclusions d'appel, que sa cessation d'activité était exclusivement dûe aux agissements déloyaux de la société Chana's qui avaient rendu la continuation de l'exploitation impossible ; qu'en prenant en compte cette cessation d'activité pour minorer le préjudice subi par la société sans rechercher, comme elle y était

invitée, si cette cessation d'activité résultait de la concurrence déloyale de la société Chana's, la cour d'appel n'a pas répondu aux conclusions dont elle était saisie, affectant ainsi sa décision d'un manque de base légale par violation des articles 455 et 458 du nouveau Code de procédure civile ; Mais attendu que la cour d'appel, après avoir examiné les éléments de preuve soumis à son appréciation a, par une décision motivée, constaté que les faits déloyaux commis par la société Chana's avaient causé à la société Chapp's un préjudice et a ainsi répondu aux conclusions invoquées ; que le moyen n'est donc pas fondé ; Et sur le moyen unique du pourvoi incident, pris en ses deux branches :

Attendu que la société Chana's reproche à l'arrêt de l'avoir condamnée à des dommages-intérêts

pour concurrence déloyale à l'égard de la société Chapp's pour avoir débauché le tiers de son personnel et pour avoir adopté un système de référence et un logo similaires à ceux de la société Chapp's, alors que, d'une part, constitue seul un acte de concurrence déloyale le débauchage massif du personnel d'une société passé au service de la société concurrente ; qu'en relevant que seulement trois salariés avaient quitté la société Chapp's pour entrer au service de la société Chana's tandis que deux autres avaient quitté la société Chapp's sans être en définitive engagés par la société Chana's tout en déduisant qu'un tiers du personnel de la société Chapp's était passé au service de la société Chana's, la cour d'appel n'a pas déduit de ses propres constatations les conséquences légales qui s'imposaient au regard de l'article 1382 du Code civil ; et alors que, d'autre part, la cour d'appel ne pouvait retenir des actes de concurrence déloyale sans répondre aux conclusions de la société Chana's

signifiées le 7 mai 1987 faisant valoir qu'il est d'usage constant que les mêmes références soient utilisées en raison de leur multitude, dans les affaires analogues du Sentier pour simplifier les relations commerciales et que les logos des deux sociétés n'ont ni la même forme ni la même configuration ni la même couleur ; qu'ainsi la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ; Mais attendu, d'une part, qu'ayant constaté que, sur les seize salariés que comptait la société Chapp's, trois l'avaient quitté pour entrer au service de la société Chana's et que deux autres avaient donné leur démission à la suite d'offres d'engagement qui leur avaient été faites par cette dernière, la cour d'appel, relevant que la société Chana's avait provoqué une désorganisation de la société Chapp's qui avait ainsi perdu une équipe de travail complète représentant le tiers de son personnel, a pu décider que ces faits étaient constitutifs de concurrence déloyale ; Attendu, d'autre part, qu'après avoir constaté, par motifs propres et adoptés, la similitude existant entre le système de référence adopté par la société Chana's et celui de la société Chapp's,

similitude qui ne pouvait être fortuite, compte tenu de la complexité du système, et qui ne s'expliquait ni par la banalité de ce système, ni par les seules réminiscences des salariés, mais qui était le résultat d'un comportement volontaire, l'arrêt a souverainement apprécié la ressemblance existant dans la présentation des documents commerciaux des deux sociétés tenant, non seulement à l'emplacement, à la dimension et à la nuance du logo, mais aussi à l'impression sur les factures, au même endroit et dans les mêmes couleurs, de conditions de vente totalement identiques ; que la cour d'appel a ainsi répondu aux conclusions invoquées ; Que le moyen n'est donc fondé en aucune de ses branches ; PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois tant principal qu'incident ; Laisse à chaque partie la charge de ses dépens respectifs ; Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par M. le président en son audience publique du cinq novembre mil neuf cent quatre vingt onze.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 89-13506
Date de la décision : 05/11/1991
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

(pour la reprise du pourvoi incident seulement) CONCURRENCE DELOYALE OU ILLICITE - Faute - Confusion créée - Ressemblance des documents commerciaux - Identité des conditions de vente.

CONCURRENCE DELOYALE OU ILLICITE - Embauchage de l'employé d'un concurrent - Débauchage du personnel - Désorganisation de l'entreprise rivale - Constatations suffisantes.


Références :

Code civil 1382

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 05 janvier 1989


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 05 nov. 1991, pourvoi n°89-13506


Composition du Tribunal
Président : Président : M. BEZARD

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1991:89.13506
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