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09/07/1991 | FRANCE | N°89-13940

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 09 juillet 1991, 89-13940


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Attendu, selon les énonciations des juges du fond, que les époux X... ont été domiciliés à Douala (Cameroun) jusqu'en 1983, époque à laquelle Mme X... est venue résider séparément à Toulon après un accouchement ; que, sur requête en divorce de M. X..., signifiée au parquet le 12 février 1986, le président du tribunal de Douala a rendu, par défaut, le 20 février 1986, une ordonnance de non-conciliation qui a condamné le mari à payer une pension alimentaire à sa femme ; que, par jugement du 1er septembre 1986, le Tribunal a rejeté diverses exceptions soulevées pa

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Attendu, selon les énonciations des juges du fond, que les époux X... ont été domiciliés à Douala (Cameroun) jusqu'en 1983, époque à laquelle Mme X... est venue résider séparément à Toulon après un accouchement ; que, sur requête en divorce de M. X..., signifiée au parquet le 12 février 1986, le président du tribunal de Douala a rendu, par défaut, le 20 février 1986, une ordonnance de non-conciliation qui a condamné le mari à payer une pension alimentaire à sa femme ; que, par jugement du 1er septembre 1986, le Tribunal a rejeté diverses exceptions soulevées par Mme X... et prononcé le divorce aux torts de celle-ci ; que le tribunal d'instance de Toulon, saisi le 13 mars 1986 par Mme X..., a condamné, le 9 septembre 1986, M. X... au titre de sa contribution aux charges du mariage ; que, sur requête en divorce pour faute présentée par la femme, le 29 avril 1986, le juge aux affaires matrimoniales de Toulon a rendu, le 23 octobre 1986, une ordonnance de non-conciliation condamnant M. X... à payer des pensions alimentaires pour sa femme et sa fille ; que l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 2 février 1989) a confirmé ces deux décisions ;

Sur le premier moyen, pris en ses deux premières branches, et le troisième moyen, pris en sa première branche :

Attendu que M. X... fait grief à la cour d'appel d'avoir déclaré recevable la demande en divorce et de l'avoir condamné à contribuer aux charges du mariage malgré le jugement camerounais de divorce alors qu'il avait fait valoir l'opposabilité en France de cette décision sur le fondement de la jurisprudence française de sorte que la cour d'appel, en décidant qu'était invoquée la Convention franco-camerounaise du 21 février 1974, laquelle n'est applicable qu'à l'exequatur, aurait dénaturé ses conclusions et violé les articles 34 et 35 de la Convention précitée ;

Mais attendu qu'en appréciant l'opposabilité de la décision camerounaise au regard des conditions posées par l'article 34 de l'accord franco-camerounais du 21 février 1974 dont l'examen s'imposait à elle et qui régissent tant la reconnaissance que l'exécution des décisions, la cour d'appel n'a pas dénaturé les conclusions de M. X... qui invoquaient l'opposabilité en France du jugement camerounais ; que les griefs ne sont donc pas fondés ;

Sur les deux autres branches du premier moyen, le deuxième moyen, pris en ses deux branches, et le troisième moyen, pris en ses deux dernières branches :

Attendu qu'il est encore reproché à la cour d'appel d'avoir déclaré recevable la demande en divorce de Mme X... alors, selon le premier moyen et, d'une part, qu'en retenant la date d'introduction de la requête et non celle de l'assignation en divorce pour apprécier la recevabilité d'une demande en divorce introduite en France en présence d'un jugement étranger, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 123 et 125 du nouveau Code de procédure civile ; alors, d'autre part, qu'en affirmant que le juge aux affaires matrimoniales de Toulon était seul compétent en matière de divorce, la cour d'appel a violé l'article 1070 du même Code ; qu'en un deuxième moyen, M. X... reproche aussi à la cour d'appel, d'une part, d'avoir violé l'article 238 du Code civil en se prononçant sur la régularité d'un jugement étranger alors qu'elle statuait en appel d'une ordonnance du juge conciliateur et, d'autre part, d'avoir privé sa décision de base légale au regard des articles 16 et 1070 du nouveau Code de procédure civile en constatant l'irrégularité de la citation de la femme devant le juge camerounais sans se prononcer sur le terrain de la fraude et sans établir que Mme X... avait été empêchée de défendre valablement ses droits ; qu'en troisième lieu, M. X... fait encore grief à l'arrêt attaqué de l'avoir condamné à contribuer aux charges du mariage alors, selon ce moyen, d'une part, qu'en se situant sur le terrain de " décisions rendues au Cameroun " pour rejeter l'exception de litispendance, il manque de base légale au regard de l'article 100 du nouveau Code de procédure civile et alors, d'autre part, qu'il n'a pas répondu aux conclusions invoquant l'irrecevabilité résultant du prononcé du divorce ;

Mais attendu, d'abord, que le contrôle, à titre incident, de la régularité internationale d'un jugement étranger peut être opéré par tout juge devant lequel ce jugement est invoqué à l'appui d'une fin de non-recevoir ; que la première branche du deuxième moyen n'est donc pas fondée ;

Attendu, ensuite, qu'il résulte des productions que Mme X..., sans se défendre au fond, a excipé de sa nationalité française et revendiqué l'application de la loi française devant le tribunal de Douala dont elle a décliné la compétence au profit de celui de Toulon ; que, devant la cour d'appel, elle a précisé qu'elle s'était ainsi réservée de se fonder sur l'article 15 du Code civil ; que la décision invoquée par M. X... n'émanait donc pas d'une juridiction compétente selon l'article 34 d de l'accord de 1974 précité ; qu'ainsi, par ce motif de droit et abstraction faite de ceux critiqués par les autres griefs du pourvoi, l'arrêt se trouve légalement justifié ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 89-13940
Date de la décision : 09/07/1991
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

1° CONVENTIONS INTERNATIONALES - Accord franco-camerounais du 21 février 1974 - Reconnaissance et exécution des décisions judiciaires - Opposabilité en France d'un jugement camerounais - Conditions posées par l'article 34 - Caractère impératif.

1° L'opposabilité en France d'un jugement camerounais s'apprécie au regard des conditions qui, posées par l'article 34 de l'Accord franco-camerounais du 21 février 1974, dont l'examen s'impose à la juridiction saisie, régissent tant la reconnaissance que l'exécution des décisions.

2° CONFLIT DE JURIDICTIONS - Effets internationaux des jugements - Contrôle des jugements non soumis à l'exequatur - Jugement invoqué à l'appui d'une fin de non-recevoir - Contrôle à titre incident de sa régularité - Contrôle possible par tout juge.

2° Le contrôle, à titre incident, de la régularité internationale d'un jugement étranger peut être opéré par tout juge devant lequel ce jugement est invoqué à l'appui d'une fin de non-recevoir.

3° CONVENTIONS INTERNATIONALES - Accord franco-camerounais du 21 février 1974 - Reconnaissance et exécution des décisions judiciaires - Juridiction compétente au sens de l'article 34 d - Définition.

3° CONFLIT DE JURIDICTIONS - Effets internationaux des jugements - Contrôle des jugements non soumis à l'exequatur - Accord franco-camerounais du 21 février 1974 - Juridiction compétente au sens de l'article 34 d - Définition 3° DIVORCE - SEPARATION DE CORPS - Compétence - Compétence territoriale - Conflit de juridictions - Effets internationaux des jugements - Contrôle des jugements non soumis à l'exequatur - Accord franco-camerounais du 21 février 1974 - Juridiction compétente au sens de l'article 34 d - Définition.

3° Dès lors que, sans se défendre au fond, une épouse a excipé de sa nationalité française et a revendiqué l'application de la loi française devant un tribunal camerounais dont elle a décliné la compétence pour connaître de la demande de divorce formée par son mari, et que, devant la juridiction française, elle a prétendu qu'elle s'était ainsi réservé de se fonder sur l'article 15 du Code civil, le jugement de divorce rendu par le tribunal camerounais n'émane pas d'une juridiction compétente selon l'article 34 d de l'Accord franco-camerounais du 21 février 1974.


Références :

Accord franco-camerounais du 21 février 1974 art. 34 d
Code civil 15

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 02 février 1989


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 09 jui. 1991, pourvoi n°89-13940, Bull. civ. 1991 I N° 236 p. 155
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1991 I N° 236 p. 155

Composition du Tribunal
Président : Président :M. Massip, conseiller doyen faisant fonction
Avocat général : Avocat général :M. Lupi
Rapporteur ?: Rapporteur :M. Lemontey
Avocat(s) : Avocats :MM. Roger, Choucroy.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1991:89.13940
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