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25/06/1991 | FRANCE | N°90-13849

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 25 juin 1991, 90-13849


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Attendu que, par acte en date à Genève du 23 décembre 1982, M. X..., viticulteur à Beaune, a emprunté à Extraco Anstalt, établissement de droit liechtensteinois, la somme de 610 000 francs suisses, pour une durée de 3 ans et au taux annuel de 8 % ; que l'acte prévoyait que les fonds étaient virés à un compte ouvert à un établissement intermédiaire agréé et que tout remboursement serait soumis à l'autorisation préalable de la direction du Trésor ; que, le même jour, un intérêt supplémentaire de 2 % a été stipulé par acte séparé ; que l'arrêt confirmatif at

taqué (Dijon, 28 février 1990) a condamné M. X... à payer à Extraco Anstalt la cont...

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Attendu que, par acte en date à Genève du 23 décembre 1982, M. X..., viticulteur à Beaune, a emprunté à Extraco Anstalt, établissement de droit liechtensteinois, la somme de 610 000 francs suisses, pour une durée de 3 ans et au taux annuel de 8 % ; que l'acte prévoyait que les fonds étaient virés à un compte ouvert à un établissement intermédiaire agréé et que tout remboursement serait soumis à l'autorisation préalable de la direction du Trésor ; que, le même jour, un intérêt supplémentaire de 2 % a été stipulé par acte séparé ; que l'arrêt confirmatif attaqué (Dijon, 28 février 1990) a condamné M. X... à payer à Extraco Anstalt la contre-valeur en francs français du capital emprunté et des intérêts au taux de 8 % l'an depuis 1984 ;

Sur le premier moyen, pris en ses trois branches :

Attendu que M. X... fait grief à cet arrêt d'avoir reconnu à Extraco Anstalt la capacité d'ester en justice en France en application des dispositions combinées des articles 6 et 14 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des articles 1 et 5 de son premier protocole additionnel, alors, selon le moyen, d'une part, qu'en se substituant au gouvernement français qui, seul, pouvait prendre la décision de reconnaître, soit par décret, en application de la loi du 11 juin 1857, soit par traité, la personnalité morale aux sociétés étrangères de capitaux, la cour d'appel a excédé ses pouvoirs ; alors, d'autre part, qu'en considérant que la Convention précitée garantissait de façon générale la reconnaissance de la personnalité des sociétés étrangères sans rechercher si la protection de l'intérêt général ne permettait pas de refuser cette reconnaissance aux sociétés d'un Etat qui encourage la création, sur son territoire, de sociétés masquant l'identité de ceux qui les contrôlent, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision au regard de l'article 1er, alinéa 2, du protocole additionnel susmentionné ; alors, enfin, que l'arrêt a violé le décret des 20 juin et 8 juillet 1868 en considérant que la représentation diplomatique de la Principauté du Liechtenstein par l'empire austro-hongrois avait eu pour effet d'attribuer aux sociétés du premier Etat le droit d'ester en justice accordé par ce texte à celles du second ;

Mais attendu que c'est sans empiéter sur l'action réglementaire ou diplomatique du Gouvernement et sans avoir à prendre en considération les dispositions, inopérantes en la cause, de l'article 1er, alinéa 2, du protocole précité, mais en se fondant sur l'autorité, supérieure à la loi du 11 juin 1857, des dispositions de la Convention européenne et de son protocole additionnel que la cour d'appel a décidé que toute personne morale, quelle que soit sa nationalité, pouvait agir en justice en France pour la protection de ses biens et intérêts ; qu'ainsi, le moyen, dont la troisième branche s'attaque à des motifs, non adoptés, des premiers juges, n'est fondé en aucune de ses deux premières branches ;

Sur le second moyen :

Attendu qu'il est encore reproché à la cour d'appel de n'avoir pas justifié sa décision au regard de l'article 6 du décret du 22 janvier 1967 fixant les modalités d'application de la loi du 28 décembre 1966 relative aux relations financières avec l'étranger en ce qu'elle a déclaré régulier le contrat de prêt, sans rechercher si l'avenant stipulant un taux d'intérêt supplémentaire n'avait pas pour but de faire échec à la règle d'ordre public de ce texte, sanctionnée par la nullité de l'opération, soumettant à autorisation préalable certains emprunts à l'étranger ;

Mais attendu que la réglementation relative au contrôle des changes, alors applicable, ne prévoyait pas la nullité des conventions non déclarées ou non autorisées mais subordonnait seulement leur exécution à l'obtention des autorisations nécessaires pour transférer les fonds à l'étranger ; que le moyen est donc inopérant ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 90-13849
Date de la décision : 25/06/1991
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

1° CONVENTION EUROPEENNE DES DROITS DE L'HOMME - Premier protocole additionnel - Action en justice - Qualité - Personne morale.

1° ACTION EN JUSTICE - Qualité - Personne morale - Nationalité étrangère - Droit d'ester en justice reconnu par la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales avec son premier protocole additionnel 1° CONVENTIONS INTERNATIONALES - Principes généraux - Autorité des conventions - Autorité supérieure à la loi interne - Action en justice - Droit d'ester en justice des personnes morales - Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales avec son premier protocole additionnel - Autorité supérieure à la loi du 11 juin 1857.

1° C'est sans empiéter sur l'action réglementaire ou diplomatique du Gouvernement et sans avoir à prendre en considération les dispositions, inopérantes en la cause, de l'article 1er, alinéa 2, du premier protocole additionnel de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, mais en se fondant sur l'autorité, supérieure à la loi du 11 juin 1857, des dispositions de la Convention européenne et de son protocole additionnel, qu'une cour d'appel décide que toute personne morale, quelle que soit sa nationalité, peut agir en justice en France pour la protection de ses biens et intérêts.

2° DOUANES - Changes - Réglementation - Relations financières avec l'étranger - Autorisation préalable - Absence - Portée - Nullité de la convention - Contrats dont les effets ne sont qu'éventuels (non).

2° La réglementation relative au contrôle des changes, telle qu'elle résulte de la loi du 28 décembre 1966 et du décret du 27 janvier 1967, applicable en la cause, ne prévoit pas la nullité des conventions non déclarées ou non autorisées, mais subordonne seulement leur exécution à l'obtention des autorisations nécessaires pour transférer les fonds à l'étranger.


Références :

Décret 67-78 du 27 janvier 1967
Loi du 11 juin 1857
Loi 66-1010 du 28 décembre 1966

Décision attaquée : Cour d'appel de Dijon, 28 février 1990

DANS LE MEME SENS : (2°). Chambre commerciale, 1983-11-22 , Bulletin 1983, n° 316, p. 273 (rejet)

arrêt cité. A RAPPROCHER : (1°). Chambre civile 1, 1963-05-28 , Bulletin 1963, I, n° 284 (1), p. 242 (rejet) ; Chambre criminelle, 1990-11-12 , Bulletin criminel 1990, n° 377, p. 447 (cassation partielle).


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 25 jui. 1991, pourvoi n°90-13849, Bull. civ. 1991 I N° 207 p. 136
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1991 I N° 207 p. 136

Composition du Tribunal
Président : Président :M. Massip, conseiller doyen faisant fonction
Avocat général : Avocat général :Mme Flipo
Rapporteur ?: Rapporteur :M. Lemontey
Avocat(s) : Avocats :M. Cossa, la SCP Waquet, Farge et Hazan.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1991:90.13849
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