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19/02/1991 | FRANCE | N°89-14418

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 19 février 1991, 89-14418


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Attendu que M. Emmanuel X..., né le 3 mai 1938, a assigné le 13 novembre 1987 M. Modesto X... et Mme Eloise X..., ses père et mère, pour faire déterminer, au moyen d'une mesure d'instruction, l'usage qu'ils avaient fait de ses salaires, perçus par eux durant sa minorité et jusqu'à ce qu'il ait atteint l'âge de 31 ans ; que les époux X... ont invoqué la prescription trentenaire ; que l'arrêt attaqué, considérant qu'il s'agissait d'une action en reddition de compte et l'estimant partiellement prescrite, a débouté M. Emmanuel X... ;

Sur le premier moyen, pris en sa

seconde branche :

Vu l'article 475 du Code civil ;

Attendu que la prescr...

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Attendu que M. Emmanuel X..., né le 3 mai 1938, a assigné le 13 novembre 1987 M. Modesto X... et Mme Eloise X..., ses père et mère, pour faire déterminer, au moyen d'une mesure d'instruction, l'usage qu'ils avaient fait de ses salaires, perçus par eux durant sa minorité et jusqu'à ce qu'il ait atteint l'âge de 31 ans ; que les époux X... ont invoqué la prescription trentenaire ; que l'arrêt attaqué, considérant qu'il s'agissait d'une action en reddition de compte et l'estimant partiellement prescrite, a débouté M. Emmanuel X... ;

Sur le premier moyen, pris en sa seconde branche :

Vu l'article 475 du Code civil ;

Attendu que la prescription quinquennale de l'action en reddition de compte du mineur contre le tuteur a, en principe, pour point de départ, la fin de la tutelle ; que, toutefois, lorsque le tuteur a continué de gérer, en cette qualité, les biens de son pupille après la majorité de celui-ci, elle ne court qu'à partir du jour où cette administration a cessé ;

Attendu que, pour débouter M. Emmanuel X... de sa demande en reddition de compte, l'arrêt attaqué énonce " qu'en application de l'article 2262 du Code civil, les actions personnelles se prescrivent par 30 ans et que, l'assignation datant du 6 mai 1988, M. Emmanuel X... n'était pas fondé à réclamer en deçà du 6 mai 1958 " ;

Attendu cependant qu'il résulte de l'arrêt que les époux X... ont, après la majorité de leur fils, intervenue le 3 mai 1959, continué à administrer les biens de celui-ci pendant plusieurs années et sans qu'aucune reddition de compte ait eu lieu ; qu'il s'ensuit que la prescription n'a couru que du jour où M. Emmanuel X... a commencé de gérer lui-même ses biens ; que dès lors, en statuant comme elle a fait, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Sur le deuxième moyen, pris en ses deux premières branches :

Vu les articles 1315 et 469 du Code civil ;

Attendu que, pour débouter M. Emmanuel X..., la cour d'appel a retenu que les époux X... prétendaient que celles des rémunérations de leur fils qu'ils avaient reçues avaient été en partie utilisées pour son entretien, le reste étant placé dans son intérêt, et que M. Modesto X... avait acquis un terrain pour son compte ; qu'elle a ajouté que M. Emmanuel X... n'établissait pas la " consistance " des sommes qu'il réclamait ;

Attendu qu'en se fondant ainsi, d'une part, sur les seules allégations des époux X... et, d'autre part, sur le fait que M. Emmanuel X... ne faisait pas la preuve du montant des sommes qui lui étaient dues, alors que la reddition de compte incombait à son père, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Sur le deuxième moyen, pris en sa quatrième branche :

Vu l'article 1134 du Code civil ;

Attendu qu'ayant encore retenu que M. Emmanuel X... avait attendu 25 ans pour agir et que sa concubine avait, en 1984 et 1985, emprunté de l'argent aux époux X..., ce qui est incompatible avec l'existence d'une dette de leur part, la cour d'appel en a implicitement déduit que M. Emmanuel X... avait renoncé à demander des comptes à ses parents ;

Attendu qu'en se déterminant ainsi, alors que la renonciation à un droit ne se présume pas et ne peut résulter que d'actes manifestant sans équivoque la volonté d'y renoncer, laquelle ne peut se déduire ni de l'inaction de M. Emmanuel X..., ni du comportement de sa concubine, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la première branche du premier moyen, la troisième branche du deuxième moyen et le troisième moyen :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 8 février 1989, entre les parties, par la cour d'appel de Pau ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Toulouse


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 89-14418
Date de la décision : 19/02/1991
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Analyses

1° PRESCRIPTION CIVILE - Prescription quinquennale - Mineur - Tutelle - Tuteur - Reddition de comptes - Point de départ - Majorité - Exception - Continuation de la gestion par le tuteur.

1° MINEUR - Tutelle - Tuteur - Reddition de comptes - Prescription - Point de départ - Majorité - Exception - Continuation de la gestion par le tuteur.

1° La prescription quinquennale de l'action en reddition de compte du mineur contre le tuteur a, en principe, pour point de départ, la fin de la tutelle. Toutefois, lorsque le tuteur a continué de gérer, en cette qualité, les biens de son pupille après la majorité de celui-ci, elle ne court qu'à partir du jour où cette administration a cessé.

2° MINEUR - Tutelle - Tuteur - Reddition de comptes - Gestion des biens du mineur - Preuve - Charge.

2° REDDITION DE COMPTES - Action en reddition - Gestion des biens du mineur - Preuve - Charge 2° PREUVE (règles générales) - Charge - Applications diverses - Mineur - Tutelle - Tuteur - Reddition de comptes.

2° La reddition de compte incombant au tuteur, viole les articles 1315 et 469 du Code civil, la cour d'appel qui, pour rejeter une demande en reddition de comptes, se fonde sur le fait que le demandeur ne fait pas la preuve du montant des sommes qui lui étaient dues.

3° MINEUR - Tutelle - Tuteur - Reddition de comptes - Renonciation - Manifestation sans équivoque de l'intention de renoncer - Condition.

3° RENONCIATION - Définition - Manifestation sans équivoque de l'intention de renoncer.

3° La renonciation à un droit ne se présume pas et ne peut résulter que d'actes manifestant sans équivoque la volonté de renoncer. Dès lors, ne justifie pas sa décision la cour d'appel, qui pour débouter le demandeur à une action en reddition de comptes, estime qu'il peut être considéré comme ayant renoncé à les demander à ses parents, en raison de son inaction pendant de nombreuses années, et de l'existence d'un emprunt contracté auprès de ceux-ci par sa concubine.


Références :

Code civil 1315, 1134, 469
Code civil 475

Décision attaquée : Cour d'appel de Pau, 08 février 1989

DANS LE MEME SENS : (1°). Chambre civile 1, 1973-02-15 , Bulletin 1973, I, n° 61 (5), p. 56 (rejet), et les arrêts cités. A RAPPROCHER : (1°). Chambre civile 1, 1988-12-06 , Bulletin 1988, I, n° 350, p. 237 (rejet)

arrêt cité. (3°). Chambre civile 1, 1989-07-05 , Bulletin 1989, I, n° 281 (2), p. 186 (cassation), et les arrêts cités.


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 19 fév. 1991, pourvoi n°89-14418, Bull. civ. 1991 I N° 66 p. 42
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1991 I N° 66 p. 42

Composition du Tribunal
Président : Président :M. Massip, conseiller doyen faisant fonction
Avocat général : Avocat général :Mme Flipo
Rapporteur ?: Rapporteur :M. Gélineau-Larrivet
Avocat(s) : Avocats :la SCP Waquet, Farge et Hazan, la SCP Vier et Barthélemy.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1991:89.14418
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