LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par :
1°) la Société française de production cinématographique (SFPC), dont le siège social est sis à Paris (17e), ...,
2°) la Société française de production et de création audiovisuelles (SFP), dont le siège social est sis à Paris (19e), ...,
en cassation d'un arrêt rendu le 18 mars 1987 par la cour d'appel de Paris (1re Chambre A), au profit :
1°) de la société Groupement des éditeurs de films (GEF), dont le siège social est sis à Lille (Nord), ...,
2°) de M. A..., demeurant à Paris (1er), ..., pris en sa qualité de syndic du règlement judiciaire de la société GEF,
3°) de M. Michel X..., demeurant à Paris (3e), ... du Temple, pris en sa qualité de liquidateur amiable du GEF,
défendeurs à la cassation ; Les demanderesses invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ; LA COUR, en l'audience publique du 3 juillet 1990, où étaient présents :
M. Jouhaud, président, M. Viennois, rapporteur, MM. Z..., Lesec, Kuhnmunch, Fouret, Pinochet, Mabilat, Mme Lescure, conseillers, Mme Y..., M. Charruault, conseillers référendaires, M. Charbonnier, avocat général, Mlle Ydrac, greffier de chambre ; Sur le rapport de M. le conseiller Viennois, les observations de Me Choucroy, avocat des sociétés SFPC et SFP, de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de la société GEF, de M. A... ès qualités et de M. X... ès qualités, les conclusions de M. Charbonnier, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ; ! Sur le moyen unique, pris en ses deux branches :
Attendu, selon les énonciations des juges du fond, que, par acte sous seing privé du 8 septembre 1981, la Société française de production cinématographique (SFPC) et la Société française de production et de création audiovisuelle (SFP) sont convenues avec le Groupement des éditions de films (GEF) de réaliser et de produire un film de long métrage et une série de télévision ; que le devis global, la durée du tournage et les différents apports étaient fixés dans l'acte, celui du GEF devant être de 51 % et ceux de la SFPC et de la SFP de 49 % ; que cette convention stipulait également que les dépassements s'imputeraient par moitié sur chacune des deux oeuvres et seraient assumés dans les mêmes proportions précisées ci-dessus par les parties à l'acte ; que, le même jour, par un autre acte sous seing privé, intitulé "additif n° 1", la SFP et la SFPC se sont engagées à prendre à leur charge tous les dépassements de coût du film et de la série, la contribution totale du GEF, soit 11 985 millions de francs, constituant un maximum, et à garantir le GEF de toute réclamation ou action tendant à augmenter directement ou indirectement sa
contribution maximale, cette prise en charge ne pouvant, en aucun cas, modifier le partage des recettes et le montant de la
contribution du GEF ; que les prévisions initiales ayant été largement dépassées, les SFP et SFPC ont assigné le GEF pour faire déclarer nulles et non
avenues les dispositions de l'additif n° 1 et pour faire enjoindre au GEF de rendre les comptes prévus au contrat ; que le tribunal de grande instance a fait droit à ces demandes, en se fondant notamment sur l'article 1844-1 du Code civil ; Attendu que la SFPC et la SFP reprochent à l'arrêt attaqué (Paris, 18 mars 1987) d'avoir infirmé le jugement en ce qu'il avait déclaré nulles et non avenues les dispositions de l'additif n° 1, alors, selon le moyen, d'une part, qu'en application de l'article 1844-1 du Code civil est nulle non seulement la stipulation donnant à l'un des associés la quasi-totalité des bénéfices ou l'affranchissant de toute contribution aux pertes, mais également toute clause dont les conséquences directes ou indirectes auraient pour effet de limiter les chances de profit ou les risques de perte ; qu'ayant constaté que les seuls risques de perte pour les associés consistaient dans des dépassements non prévisibles au budget initial que le protocole d'accord avait expressément répartis dans la même proportion que leurs apports respectifs, mais qui ont été mis à la charge exclusive de la SFP et de la SFPC par l'additif, la clause de cet additif avait nécessairement pour effet de rendre nuls ou très faibles les risques de perte du GEF, assuré de surcroît, de récupérer la quasi-totalité de ses apports par un remboursement prioritaire de son investissement dont ses coassociés étaient privés du fait que leur remboursementt ne pouvait se faire que sur les dépassements, de telle sorte que la cour d'appel a violé le texte précité ; et alors, d'autre part, que le GEF ayant, selon l'additif, la qualité de producteur délégué majoritaire et étant seul chargé de la comptabilité générale de l'opération dont il devait rendre compte, la cour d'appel aurait dû rechercher si la convention avait été exécutée de bonne foi au sens de l'article 1134, alinéa 3, du Code civil ; Mais attendu, d'abord, qu'après avoir exactement énoncé que l'article 1844-1 du Code civil n'interdit pas aux associés de fixer un partage des bénéfices et des pertes dans une proportion différente des apports, la cour d'appel retient que l'additif, en limitant le risque du GEF à une certaine somme, n'a pas prévu une exonération quasi-totale des pertes et ne lui a pas conféré une vocation quasi-exclusive aux bénéfices, contrairement aux prétentions de la SFP et de la SFPC, la régularité du contrat de société devant s'apprécier au jour de sa formation ; que, sans violer le texte invoqué, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ; Attendu, ensuite, que la SFP et la SFPC n'ont pas prétendu devant les juges du second degré que le GEF n'avait pas exécuté de bonne foi la convention les liant ; que, pris en sa seconde branche, le moyen est nouveau, mélangé de fait et de droit et, partant, irrecevable ; d'où il suit qu'en aucune de ses branches, le moyen ne peut être
accueilli ; PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;