REJET du pourvoi formé par :
- la société Fiat Allis France, partie civile,
contre l'arrêt de la cour d'appel d'Agen, chambre correctionnelle, du 22 juin 1989, qui, après avoir relaxé Raymond X... du chef de vol, s'est déclarée incompétente pour se prononcer sur les intérêts civils.
LA COUR,
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le moyen unique de cassation pris de la violation des articles 379 et 381 du Code pénal, 593 du Code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a renvoyé M. X... des fins de la poursuite ;
" aux motifs que si Raymond X... n'a jamais pu se prévaloir d'un droit de propriété sur le matériel litigieux en raison de la clause de réserve de propriété, il reste cependant que les conventions intervenues entre les parties ont conféré au prévenu des attributs d'une telle ampleur qu'il a pu, de bonne foi, non seulement en faire l'usage qu'il en a voulu mais également procéder sur cet engin à des réparations hors de proportion avec celles qu'il aurait effectuées s'il avait eu la certitude de n'en être que détenteur précaire ; que le fait d'avoir conservé par-devers lui ce bulldozer, au mépris de l'injonction de restitution qui lui en a été faite par l'huissier de justice agissant à la requête de la société Fiat Allis France, ne peut être vu, en raison de la conviction de l'intéressé qu'il disposait de pouvoirs assimilables à ceux que lui aurait conférés la qualité de propriétaire, comme constitutif de la volonté d'appropriation caractéristique d'une soustraction frauduleuse ;
" alors que la détention matérielle d'une chose non accompagnée de la remise de la possession n'est pas exclusive de l'appréhension qui constitue l'un des éléments constitutifs du délit de vol ; qu'en l'espèce il résulte des énonciations mêmes de l'arrêt infirmatif attaqué que la clause de réserve de propriété excluait tout droit de propriété de X... sur le bulldozer dont il n'avait reçu que la simple détention précaire ; que le prévenu, en refusant, malgré une injonction, d'exécuter la décision du tribunal de commerce qui, après avoir constaté la qualité de propriétaire de la société Fiat Allis France et avoir ordonné à M. X... de restituer l'engin litigieux, n'a pas été frappée d'appel, a appréhendé frauduleusement le matériel dont il ne pouvait ignorer l'appartenance à autrui ; que faute d'avoir déduit de ces énonciations les conséquences légales qui s'imposaient, la cour d'appel a violé les textes visés au moyen " ;
Attendu qu'il appert de l'arrêt attaqué que Raymond X... a acquis de la société Fiat Allis France un engin de travaux publics, l'acte de vente contenant au profit de la société une clause de réserve de propriété ; qu'il ne s'est acquitté que d'un faible acompte sur le prix au prétexte du mauvais état du matériel sur lequel il a dû faire effectuer des réparations importantes ; qu'il a refusé de restituer ledit engin en dépit du commandement qui lui en avait été fait en exécution d'un jugement du tribunal de commerce devenu définitif ;
Attendu que, saisie, sur plainte avec constitution de partie civile de la venderesse, d'une poursuite pour vol contre Raymond X..., la juridiction du second degré l'a relaxé et s'est déclarée incompétente pour statuer sur l'action civile en relevant que, si le prévenu " n'a jamais pu se prévaloir d'un droit de propriété sur le matériel litigieux ", les conventions entre les parties lui ont conféré " des attributs d'une telle ampleur qu'il a pu, de bonne foi, non seulement en faire l'usage qu'il en a voulu mais également procéder sur cet engin à des réparations hors de proportion avec celles qu'il aurait effectuées s'il avait eu la certitude de n'en être que détenteur précaire " ;
Que les juges ajoutent que son refus de déférer au commandement de restituer " ne peut être vu, en raison de la conviction de l'intéressé qu'il disposait de pouvoirs assimilables à ceux que lui aurait conférés la qualité de propriétaire, comme constitutif de la volonté d'appropriation caractéristique d'une soustraction frauduleuse " ;
Attendu qu'en cet état, abstraction faite de motifs erronés, la cour d'appel a justifié sa décision ; qu'en effet la vente d'un bien mobilier assortie d'une clause de réserve de propriété s'accompagne d'une remise volontaire de la chose, exclusive de toute appréhension frauduleuse du bien par l'acquéreur, même en cas de résolution du contrat ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi.