LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par la société anonyme LE GRAND GARAGE MEDITERRANEEN, dont le siège social est ... (1er) (Bouches-du-Rhône),
en cassation d'un arrêt rendu le 13 novembre 1987 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (2e chambre), au profit de la société à responsabilité limitée Etablissements Jacques BATOT, dont le siège social est ... (10e),
défenderesse à la cassation ; La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt ; LA COUR, en l'audience publique du 16 janvier 1990, où étaient présents :
M. Jouhaud, président, M. Pinochet, rapporteur, MM. Y..., Grégoire, Lesec, Mabilat, Gélineau-Larrivet, conseillers, Mme X..., M. Charruault, conseillers référendaires, M. Dontenwille, avocat général, Mlle Ydrac, greffier de chambre ; Sur le rapport de M. le conseiller Pinochet, les observations de la SCP Waquet et Farge, avocat de la société Le Grand Garage méditerranéen, de la SCP Célice et Blancpain, avocat de la société des Etablissements Jacques Batot, les conclusions de M. Dontenwille, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ; Attendu, selon les énonciations des juges du fond, que le véhicule automobile appartenant à la société Batot, entreposé par le représentant de celle-ci dans les locaux du Grand Garage méditerranéen (le garage), ayant été dérobé par des individus se faisant passer pour mandataires du déposant, la société Batot a demandé au garage l'indemnisation de la perte des marchandises dérobées en même temps que le véhicule ; que l'arrêt partiellement confirmatif attaqué (Aix-en-Provence, 13 novembre 1987), après avoir retenu contre le garage une faute lourde équipollente au dol et une faute d'imprudence contre la société Batot, a partagé la responsabilité par moitié entre les parties et condamné dans cette proportion la première à réparer le préjudice résultant pour la seconde du vol des marchandises ; Sur le premier moyen :
Attendu que le garage reproche à l'arrêt attaqué d'avoir admis la réalité du préjudice allégué par la société Batot au vu des seules pièces émanant de celle-ci ; Mais attendu que la cour d'appel a souverainement estimé le montant du préjudice de la société Batot en appréciant la valeur probante des documents qui lui étaient soumis ; Que le moyen ne peut donc être accueilli ;
Sur le deuxième moyen, pris en ses quatre branches :
Attendu qu'il est encore fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir statué comme il a fait, alors que, de première part, le seul fait de ne pas avoir demandé le ticket de parking aux individus qui se sont présentés comme mandataires du déposant pour prendre le véhicule en l'ouvrant avec des clés ne pouvait être constitutif
de faute ; alors que, de deuxième part, l'autorisation de sortie donnée dans ces conditions ne pouvait être qualifiée de faute lourde ; alors que, de troisième part, la faute retenue par l'arrêt contre le déposant était de nature à ôter à la faute retenue contre le garage le caractère de faute lourde ; alors que, enfin, le préjudice résultant du vol des marchandises n'était pas la conséquence directe de la faute qui avait entraîné le vol du véhicule ; Mais attendu, d'abord, que l'arrêt attaqué a retenu que le gardien du garage avait laissé sortir le véhicule par d'autres que le déposant sans procéder à aucune vérification, notamment sans demander la présentation du ticket de parking et la carte grise ; que, de ces constatations, la cour d'appel a pu déduire que le garage, dépositaire salarié, avait commis une faute lourde, sans qu'en l'espèce, la faute retenue contre le déposant ait eu d'incidence sur le caractère de celle-ci ; Attendu, ensuite, que les juges du second degré ont pu estimer que le préjudice résultant de la perte des marchandises contenues dans le véhicule dérobé était la conséquence directe du vol de ce véhicule ; D'où il suit qu'en aucune de ses quatre branches le moyen n'est fondé ; Et sur le troisième moyen, pris en ses deux branches :
Attendu qu'il est enfin reproché à l'arrêt attaqué d'avoir écarté l'application d'une clause exonérant le garage de toute responsabilité pour les vols commis dans les véhicules, alors que, d'une part, en se bornant à énoncer que cette clause paraissait avoir été apposée sur le ticket de parking postérieurement au vol, la cour d'appel aurait statué par un motif hypothétique, et alors que, d'autre part, en toute hypothèse, le dépositaire ne pouvait être responsable du vol des objets contenus dans le véhicule parce qu'il ne les avait pas sous sa garde ; Mais attendu que l'arrêt attaqué a retenu que la clause s'appliquait au vol des marchandises dans un véhicule en stationnement, non au cas de vol du véhicule, et que le garage ne pouvait s'exonérer de sa faute lourde ; que, par ces seuls motifs, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ; D'où il suit que le troisième moyen n'est pas mieux fondé que les
précédents ; PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;