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13/02/1990 | FRANCE | N°88-87275

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 13 février 1990, 88-87275


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice, à PARIS, le treize février mil neuf cent quatre vingt dix, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller MILLEVILLE, les observations de la société civile professionnelle LYON-CAEN, FABIANI et LIARD, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général LECOCQ ;
Statuant sur le pourvoi formé par :

Y... Frida, veuve A..., pris en sa qualité de représentant légal de sa fille mineure Joséphine A..., partie civile,
contre l'

arrêt de la cour d'appel de PAPEETE, chambre correctionnelle, en date du 20 o...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice, à PARIS, le treize février mil neuf cent quatre vingt dix, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller MILLEVILLE, les observations de la société civile professionnelle LYON-CAEN, FABIANI et LIARD, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général LECOCQ ;
Statuant sur le pourvoi formé par :

Y... Frida, veuve A..., pris en sa qualité de représentant légal de sa fille mineure Joséphine A..., partie civile,
contre l'arrêt de la cour d'appel de PAPEETE, chambre correctionnelle, en date du 20 octobre 1988, qui, dans la procédure suivie contre Yvonne X... épouse Z... du chef de blessures involontaires, a constaté l'extinction de l'action publique par amnistie et a prononcé sur les intérêts civils ;
Vu le mémoire produit;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 212-1, R. 213-7 du Code de l'organisation judiciaire, 510, 512 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs,
"en ce qu'en se bornant à mentionner que Calinaud, conseiller à la cour d'appel de Papeete, a présidé les audiences de la cause sans indiquer à quel titre il a remplacé le premier président empêché, l'arrêt attaqué ne met pas la Cour de Cassation en mesure de s'assurer de la légalité de la composition de la juridiction" ;
Attendu que l'arrêt attaqué énonce que la chambre correctionnelle était présidée par "M. Calinaud, conseiller, en remplacement du premier président empêché" ; qu'il s'ensuit que ce magistrat a été régulièrement appelé à présider en l'absence du titulaire ;
Qu'ainsi le moyen doit être écarté ;
Sur le deuxième moyen de cassation pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 400, 512, 592 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs,
"en ce qu'il ne résulte pas de la mention de l'arrêt attaqué selon laquelle il a été prononcé par la cour d'appel, statuant publiquement, que la règle d'ordre public de la publicité ait été respectée à toutes les audiences de la cause et en particulier à celle où elle a été appelée et débattue, de sorte que cette formalité est réputée avoir été omise, en violation des textes susvisés" ;
Attendu qu'il résulte également des mentions de l'arrêt que celui-ci a été rendu par la cour d'appel "statuant publiquement" ; qu'une telle mention implique la publicité, non seulement de l'audience où la décision a été rendue mais aussi de celle à laquelle les débats ont eu lieu ;
Que dès lors, le moyen ne peut qu'être écarté ;
Mais sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 1382 et 1385 du Code civil, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale,
"en ce que l'arrêt attaqué a partagé par moitié la responsabilité des conséquences dommageables de la morsure du chien appartenant à Mme X... ;
"aux motifs que la jeune Joséphine A..., âgée de 7 ans, passant en courant près d'un chien Pitt-Bull a été mordue par celui-ci ; que le chien était tenu à l'attache par une chaîne d'environ 130 cm mais qu'il était impossible, compte tenu de l'étroitesse du chemin de passer devant lui sans être mordu ; qu'il s'agissait d'un animal féroce ; que les faits se sont passés dans un quartier populeux où jouent de nombreux enfants et sur une propriété privée mais non entièrement clôturée et non munie, à l'époque, de portail ni de panneau signalant le danger ; qu'il ressort que la prévenue a commis une faute en ne prenant pas toutes les précautions que nécessitait la possession d'un animal dangereux ; qu'il en ressort toutefois également une faute d'imprudence de la victime ;
"alors que, d'une part, le fait de passer en courant près d'un animal familier ne constituant pas en lui-même une faute d'imprudence à charge de quiconque et moins encore d'une enfant de 7 ans, la cour d'appel, après avoir relevé que le propriétaire du chien n'avait pas pris toutes les précautions pour parer la férocité de l'animal reconnu dangereux, ne pouvait en l'état de ses seules énonciations desquelles ne résultait aucune autre circonstance permettant d'affirmer que la jeune Joséphine A..., gravement blessée par la morsure de l'animal aurait insuffisamment veillé à sa propre sécurité, exonérer ledit propriétaire de la moitié de sa responsabilité civile en qualité de gardien, sans violer les textes visés au moyen ;
"alors que, d'autre part, ne peut être imputé la faute à quiconque et moins encore à une enfant de 7 ans de ne pas prévoir qu'un chien se trouvant dans une propriété non close ne comportant aucun panneau signalant le danger dans un quartier populeux attaché à une chaîne lui laissant la liberté d'aller et venir dans un rayon de 1,30 mètre, en particulier sur un chemin de servitude, va bondir et mordre avec une extrême férocité ; qu'en opérant un égal partage de responsabilité entre le propriétaire du chien et la victime en retenant à la charge de cette dernière non une faute d'imprudence qui lui soit imputable mais seulement de ne pas avoir tenu compte de l'infraction que pouvait commettre le propriétaire du chien en ne prenant pas toutes les précautions que nécessitait la possession d'un animal dangereux, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision ;
"alors qu'enfin et en toute hypothèse, la Cour qui ne pouvait se borner à énoncer que la victime avait commis une faute d'imprudence en passant près d'un chien sans indiquer en quoi le comportement de l'enfant aurait été en relation de causalité directe avec la grave morsure du chien dont elle a été victime, dès lors qu'elle constate par ailleurs la férocité de l'animal et encore qu'il était impossible même de passer simplement devant lui sans être mordu, n'a pas caractérisé l'existence d'un lien de causalité entre la faute imputée à la victime et le préjudice qu'elle a subi et partant n'a pas légalement justifié sa décision" ;
Vu lesdits articles ;
Attendu que tout jugement ou arrêt doit contenir les motifs propres à justifier la décision ; que l'insuffisance ou la contradiction de motifs équivaut à leur absence ;
Attendu que, pour infirmer le jugement entrepris sur l'action civile et laisser à la charge de la victime la réparation d'une partie de son préjudice, la cour d'appel, après s'être expliquée sur le comportement fautif de la prévenue, énonce "qu'il en ressort également (de l'enquête et des débats) une faute d'imprudence de la victime" entraînant un partage des réponsabilité par moitié ;
Mais attendu qu'en se bornant ainsi à affirmer l'existence d'une faute de la victime sans préciser en quoi consistait cette faute et sans rechercher si celle-ci présentait un lien de causalité avec le dommage, les juges ont méconnu le principe ci-dessus rappelé ;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs,
CASSE ET ANNULE l'arrêt de la cour d'appel de Papeete en date du 20 octobre 1988, en ses dispositions civiles,
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Nouméa, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil,
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Papeete et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Où étaient présents : M. Berthiau conseiller doyen faisant fonctions de président en remplacement du président empêché, M. Milleville conseiller rapporteur, MM. Zambeaux, Dardel, Dumont, Fontaine, Alphand, Carlioz conseillers de la chambre, Mme Guirimand conseiller référendaire, M. Lecocq avocat général, Mme Gautier greffier de chambre ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 88-87275
Date de la décision : 13/02/1990
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Papeete, chambre correctionnelle, 20 octobre 1988


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 13 fév. 1990, pourvoi n°88-87275


Composition du Tribunal
Président : M. Berthiau conseiller doyen faisant fonctions de président

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1990:88.87275
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