LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par Mme Djema Y... épouse séparée de biens de M. Z..., demeurant ... (Lot-et-Garonne),
en cassation d'un arrêt rendu le 29 avril 1987 par la cour d'appel d'Agen (1ère chambre), au profit de la société d'assurance à forme mutuelle, La Mutuelle de Poitiers, dont le siège social est ...,
défenderesse à la cassation ; La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ; LA COUR, en l'audience publique du 19 décembre 1989, où étaient présents :
M. Jouhaud, président, Mme Crédeville, rapporteur, MM. X... Bernard, Massip, Viennois, Zennaro, Kuhnmunch, Fouret, Bernard de Saint-Affrique, Pinochet,
Mabilat, conseillers, M. Savatier, conseiller référendaire, M. Dontenwille, avocat général, Mlle Ydrac, greffier de chambre ; Sur le rapport de Mme Crédeville, conseiller référendaire, les observations de la SCP Piwnica-Molinié, avocat de Mme Z... et de la SCP Nicolay, avocat de la Mutuelle de Poitiers, les conclusions de M. Dontenwille, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ; Sur le premier moyen :
Vu l'article 7 de la loi n° 70-9 du 2 janvier 1970 ; Attendu, selon l'arrêt attaqué, que par acte sous seing privé du 28 mai 1986, Mme Z... a donné à l'agence Fargue un "mandat de vente" portant sur un immeuble lui appartenant, moyennant un prix de 1 254 450 francs ; qu'à la rubrique "Durée" l'acte portait une mention manuscrite "huit jours" qui a fait l'objet d'une rature non approuvée pour être remplacée par "un mois" soit jusqu'au "7 juillet 1986 inclus" ; que l'agence Fargue a fait part de cette offre à la société d'assurance "La Mutuelle de Poitiers" qui l'a acceptée ; que, sur sommation de cette société, Mme Z... a comparu le 4 juillet 1986 chez un notaire mais a refusé de signer à moins que la Mutuelle de Poitiers ne l'autorise à poursuivre, moyennant un loyer à convenir, l'exploitation du commerce qu'elle exerçait au rez-de-chaussée de l'immeuble litigieux ; que "La Mutuelle de Poitiers" s'y étant refusée, a assigné Mme Z... pour faire constater que la vente était parfaite entre les parties ; que le tribunal a accueilli cette demande ; qu'en cause d'appel, Mme Z... a soutenu que le mandat de vendre était nul en raison du défaut d'approbation par elle de la rature
concernant la durée du mandat et de ce qu'à l'expiration de la période de huit jours initialement prévue, un nouveau mandat aurait dû être rédigé et inscrit sur le registre des mandats sous un nouveau numéro ; Attendu que pour estimer le mandat valable la cour d'appel a énoncé que les imperfections de cet acte, pour regrettables qu'elles soient tenaient à l'impropriété de l'imprimé utilisé qui a été maladroitement corrigé par des personnes en relation habituelle et peu exigeantes sur la forme et qu'elles n'affectaient pas de ce fait, la validité de l'expression de la volonté de Mme Z..., dès lors que d'après un "dire" du notaire, elle aurait confirmé le mandat donné à l'agence Fargue en se déclarant prête à signer "le compromis de vente" sous condition qu'elle puisse continuer à occuper le rez-de-chaussée avec un bail commercial et ce, sans avoir fait allusion à la rature litigieuse ; Attendu cependant que la formalité prévue par l'article 7 de la loi est exigée pour la validité même du mandat ; Qu'en l'état d'une rature non approuvée, la durée du mandat ne pouvait pas être déterminée et le mandat ne satisfaisait pas aux exigences du texte susvisé ; PAR CES MOTIFS :
et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le second moyen ; CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 29 avril 1987, entre les parties, par la cour d'appel d'Agen ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Toulouse ; Condamne La Mutuelle de Poitiers, envers Mme Z..., aux dépens liquidés à la somme de cent soixante six francs dix sept centimes et aux frais d'exécution du présent arrêt ; Ordonne qu'à la diligence de M. le procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit sur les registres de la cour d'appel d'Agen, en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par M. le président en son audience publique du trente et un janvier mil neuf cent quatre vingt dix.