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05/12/1989 | FRANCE | N°88-14174

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 05 décembre 1989, 88-14174


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par la société CONTRACTING AND ENGINEERING ENTERPRISES (CEE), société de droit des Emirats Arabes Unis, dont le siège est à Ras El Kheimah (Umiratd Arabes Unis) PO Box 756,

en cassation d'un arrêt rendu le 16 mars 1988 par la cour d'appel de Paris (1re Chambre civile, Section A), au profit :

1°) de la BANQUE DE LA MEDITERRANEE FRANCE (BMF), société anonyme, dont le siège est à Paris (9e), ...,

2°) de la BANQUE COMMERCIALE DU QATAR (BCQ),

société de droit des Emirats Arabes Unis, dont le siège est à E...
J... Doha, Qatar, ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par la société CONTRACTING AND ENGINEERING ENTERPRISES (CEE), société de droit des Emirats Arabes Unis, dont le siège est à Ras El Kheimah (Umiratd Arabes Unis) PO Box 756,

en cassation d'un arrêt rendu le 16 mars 1988 par la cour d'appel de Paris (1re Chambre civile, Section A), au profit :

1°) de la BANQUE DE LA MEDITERRANEE FRANCE (BMF), société anonyme, dont le siège est à Paris (9e), ...,

2°) de la BANQUE COMMERCIALE DU QATAR (BCQ), société de droit des Emirats Arabes Unis, dont le siège est à E...
J... Doha, Qatar, PO Box,

défenderesses à la cassation ; La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt ; LA COUR, en l'audience publique du 7 novembre 1989, où étaient présents :

M. Defontaine, président, M. Peyrat, rapporteur, MM. B..., H..., Z..., F..., I..., D...
G..., MM. Vigneron, Edin, Grimaldi, conseillers, Mme A..., MM. C..., Le Dauphin, conseillers référendaires, M. Raynaud, avocat général, Mme Arnoux, greffier de chambre ; Sur le rapport de M. le conseiller Peyrat, les observations de la SCP Célice et Blancpain, avocat de la société CEE, de Me Choucroy, avocat de la Banque commerciale du Qatar, les conclusions de M. Raynaud, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ; ! Attendu qu'il résulte des énonciations de l'arrêt attaqué (Paris, 16 mars 1988) que le sheikh Khalid Y...
X... (le maître de l'ouvrage) a conclu avec la société Contracting and engineering enterprises (société CEE) un contrat portant sur la construction d'immeubles au Qatar ; que, sur les instructions de la société CEE, la Banque de la Méditerranée France (la BMF) a demandé à la Banque commerciale du Qatar (la BCQ) d'émettre au bénéfice du maître de l'ouvrage une garantie de restitution d'acomptes, la BMF s'engageant à contre-garantir la BCQ ; que cette garantie a été fournie ; que la garantie et la contre-garantie ont été appelées ; que la société CEE a assigné en référé la BMF et la BCQ pour qu'il leur soit fait défense de payer jusqu'à ce qu'il ait été statué au fond sur le litige l'opposant au maître de l'ouvrage ; que le juge des référés a accueilli cette demande ; qu'ultérieurement, la BCQ a assigné la BMF en paiement de la somme due au titre de la contre-garantie ; que la société CEE est intervenue volontairement en cause d'appel ;

Sur le premier moyen, pris en ses trois branches :

Attendu que la société CEE fait grief à l'arrêt d'avoir déclaré non fondée la fin de non-recevoir qu'elle avait opposée à l'action de la BCQ alors, selon le pourvoi, d'une part, que la société CEE ayant, dans ses conclusions, opposé à l'action de la BCQ une fin de non-recevoir tirée de "la loi du 30 mai 1857 qui définit toujours actuellement le droit pour les sociétés anonymes étrangères de saisir les juridictions françaises" avait nécessairement allégué que la BCQ était une société de capitaux, la cour d'appel a ainsi dénaturé les termes clairs et précis de ces conclusions au mépris de l'article 4 du nouveau Code de procédure civile ; alors, d'autre part, qu'en fondant sa décision sur l'incertitude de la qualification de société de capitaux de la BCQ que celle-ci n'avait jamais contestée, produisant au contraire des documents démontrant qu'elle était une société anonyme, la cour d'appel a violé tout à la fois les articles 4, 5, 6 et 9 du nouveau Code de procédure civile, ainsi que la loi du 30 mai 1857 par refus d'application ; et alors, enfin, qu'il incombe à celui qui agit en justice de démontrer qu'il remplit les conditions de la recevabilité, expressément contestée, de son action ; qu'ainsi, l'arrêt a violé les articles 1315 du Code civil et 32 du nouveau Code de procédure civile et la loi du 30 mai 1857 ; Mais attendu qu'il résulte de l'arrêt que la société CEE qui, se qualifiant elle-même de "société de droit des Emirats arabes unis", avait assigné la BCQ en référé puis était intervenue volontairement en cause d'appel dans l'instance engagée par cette dernière, n'était pas recevable à dénier à son adversaire, qui se présentait en la même qualité, le droit d'ester en justice, en invoquant le fait qu'il s'agissait d'une société étrangère n'ayant pas la personnalité morale en France ; que, par ce motif de pur droit substitué à celui retenu par la cour d'appel, la décision se trouve justifiée du chef critiqué ; que le moyen ne peut être accueilli en aucune de ses branches ; Sur les deuxième et troisième moyens réunis, pris en leurs diverses branches :

Attendu que la société CEE reproche encore à l'arrêt d'avoir accueilli la demande de la BCQ, alors, selon le pourvoi, d'une part, que les engagements de la BCQ à l'égard du maître de l'ouvrage et de la BMF à l'égard de la BCQ dépendant expressément dans leur étendue de l'état d'avancement des travaux accomplis en exécution du contrat d'entreprise liant la société CEE, entrepreneur, au maître d'ouvrage, la cour d'appel ne pouvait les qualifier de garantie à première demande sans violer l'article 2011 du Code civil, par refus d'application ; alors, d'autre part, -et à supposer même que l'engagement de la BCQ dût être considéré comme une garantie à première demande- que la cour d'appel ne pouvait déduire la nature de l'engagement de la BMF des termes de l'acte liant la BCQ au maître de l'ouvrage sans méconnaître

le principe de l'indépendance des garanties et la volonté des parties en violation de l'article 1134 du Code civil ; alors, aussi, que la lettre de garantie, comme la lettre de contre-garantie, stipulant que "la garantie sera réduite partiellement et progressivement de la valeur des travaux exécutés et sur présentation des situations" et sollicitant du bénéficiaire qu'il avise le garant de toutes les réductions, la cour d'appel ne pouvait déclarer que n'étaient pas déterminées les modalités de mise en oeuvre de la réduction de garantie sans dénaturer les termes clairs et précis des conventions au mépris des dispositions de l'article 1134 du Code civil ; alors, encore, qu'ayant constaté tout à la fois l'existence de la clause de réduction progressive de la garantie sur présentation des situations et le devoir du bénéficiaire d'aviser le garant de la réduction, la cour d'appel ne pouvait refuser de considérer comme obligatoire le réajustement de l'étendue de la garantie au motif inopérant que le maître de l'ouvrage, à qui incombait pourtant l'obligation contractuelle d'établir le montant de sa créance par la production des situations, ne l'avait pas remplie violant de plus fort l'article 1134 du Code civil ; alors, en outre, -et à supposer même que le mécanisme d'ajustement de la garantie n'eût pas été stipulé en termes suffisamment clairs et précis- qu'il appartenait aux juges du fond, constatant la volonté non équivoque des parties de réduire progressivement l'objet même de l'obligation de garantie, de rechercher quelle avait été leur intention réelle au regard des simples modalités de mise en oeuvre de l'ajustement pour vérifier la régularité de l'appel de la garantie ; qu'en s'abstenant de procéder à cette recherche, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de base légale au regard de l'article 1134 du Code civil ; alors, au surplus, que la cour d'appel aurait dû rechercher si la BCQ avait eu connaissance de ces documents établissant l'abus non contesté du bénéficiaire dans l'appel de la garantie, avant le paiement fait par elle et non avant l'appel de la garantie par le bénéficiaire ; qu'ainsi, l'arrêt a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du Code civil et du principe fraus omnia corrumpit ; et alors, enfin, que la cour d'appel aurait dû encore rechercher si, en s'abstenant de réclamer du maître de l'ouvrage la moindre justification de l'état

de restitution des acomptes par la production des situations malgré l'obligation découlant de l'acte de garantie et les avertissements répétés qui lui avaient été donnés, avant paiement au bénéficiaire, des contestations de la société CEE, la BCQ n'avait pas, par une précipitation blâmable, consciemment favorisé le bénéficiaire qui a appelé abusivement la garantie pour un montant de 3 426 450 QR dont les 9/10e lui avaient déjà été restitués par la société CEE selon les situations approuvées par ses propres vérificateurs ; qu'en s'abstenant de procéder à cette vérification, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de base légale au regard de l'article 1134 du Code civil et du principe fraus omnia corrumpit ;

Mais attendu, en premier lieu, que l'arrêt relève que la BCQ s'était engagée en faveur du maître de l'ouvrage à payer la somme mentionnée à première demande de celui-ci, nonobstant toute contestation du donneur d'ordre, et que la BMF, après avoir reçu photocopie de la lettre de garantie, en avait accusé réception et avait remercié sa correspondante ; qu'ainsi, sans méconnaître le principe de l'indépendance des garanties, dès lors que c'est de l'approbation donnée par la BMF aux termes de l'acte par lequel la BCQ s'était obligée envers le maître de l'ouvrage qu'elle a déduit le contenu de l'engagement de la BMF à l'égard de la BCQ, la cour d'appel a pu retenir que la BMF avait conféré à son engagement la nature et l'étendue de la garantie de premier rang ; Attendu, en deuxième lieu, que la cour d'appel, en énonçant que, malgré son défaut d'automaticité, la clause de réduction n'écartait pas l'autonomie attachée à la garantie comme à la contre-garantie, a fait ressortir à juste titre, excluant l'existence d'un cautionnement, qu'une telle clause n'enlevait pas à ces engagements leur caractère de garanties payables à première demande ; Attendu, enfin, qu'ayant relevé que la lettre de garantie invitait le bénéficiaire à aviser la banque garante de premier rang de toute réduction du montant de la garantie et que le maître de l'ouvrage n'avait jamais donné un tel avis, c'est hors toute dénaturation des conventions invoquées et sans avoir à procéder aux recherches prétendument omises, dès lors que, concernant l'application de la clause d'ajustement, aucune obligation n'incombait à la banque garante et

que la société CEE n'avait pas établi la véracité de ses allégations selon lesquelles la BCQ aurait eu connaissance du caractère manifestement abusif de l'appel de la garantie, que la cour d'appel a décidé à bon droit que la garantie avait été régulièrement appelée et que la BCQ était fondée à appeler la contre-garantie ; D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ; PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;


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