LA COUR DE CASSATION, TROISIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par :
1°) Madame G...
J..., née D..., demeurant ... (Loire-Atlantique),
2°) Monsieur Guy J..., demeurant ... (Loire-Atlantique) Carquefou,
3°) Monsieur Claude J..., demeurant ... (Loire-Atlantique) Carquefou,
4°) Madame Nicole M..., demeurant ... (Loire-Atlantique),
en cassation d'un arrêt rendu le 12 février 1988 par la cour d'appel de Rennes (chambre des expropriations), au profit :
1°) de la commune de THOUARE-SUR-LOIRE, représentée par son maire en exercice, domicilié en cette qualité à l'Hôtel de ville de Thouare-sur-Loire (Loire-Atlantique), à Carquefou,
2°) de la société d'Equipement de Loire-Atlantique (SELA), dont le siège est ... (Loire-Atlantique),
3°) de l'ETAT FRANCAIS, représenté par le directeur divisionnaire des Impôts,
défendeurs à la cassation.
La commune de Thouare-sur-Loire a formé un pourvoi incident, par mémoire déposé au greffe.
Les consorts J... exposent deux moyens de cassation.
La commune de Thouare-sur-Loire invoque à l'appui de son pourvoi un moyen unique de cassation.
LA COUR, en l'audience publique du 6 juin 1989, où étaient présents :
M. Francon, président, M. Didier, rapporteur, MM. K..., A..., L..., Z..., F..., Y..., X..., E..., C..., I...
H..., M. Aydalot, conseillers, Mme B..., M. Chapron, conseillers référendaires, M. Vernette, avocat général, Mme Prax, greffier de chambre ; Sur le rapport de M. le conseiller Didier, les observations de Me Goutet, avocat de l'Etat français, les conclusions de M. Vernette, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ; Sur les deux moyens réunis du pourvoi principal :
Attendu que les consorts J... font grief à l'arrêt attaqué (Rennes, 12 février 1988) d'avoir refusé d'assortir d'une indemnité de remploi le prix des terrains transférés, après délaissement, à la commune de Thouare-sur-Loire, alors, selon le moyen, "que l'indemnité de remploi était offerte par ladite commune et expressément réclamée, que le juge ne pouvait que prendre acte de l'accord des parties et ne pouvait d'office refuser d'accorder cette indemnité, violant ainsi l'article R. 13-35 du Code de l'expropriation et alors qu'à tort le juge a retenu que les biens étaient notoirement destinés à la vente, violant ainsi l'article R. 13-46 du même Code" ;
Mais attendu qu'après avoir relevé que la commune concluait à la confirmation et avoir constaté que les consorts J... avaient clairement manifesté leur intention de vendre les terrains en sollicitant l'autorisation de lotir, et que la non-réalisation de cette vente résultait d'obstacles indépendants de leur volonté tenant à un refus du préfet, la cour d'appel a pu retenir que les biens avaient été notoirement destinés à la vente et refuser ainsi d'accorder une indemnité de remploi ; D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ; Mais, sur le moyen unique du pourvoi incident :
Vu l'article L. 11-7 du Code de l'expropriation ; Attendu que pour condamner la commune de Thouare-sur-Loire à payer aux consorts J... une indemnité de cent mille francs pour perte de frais engagés par ceux-ci pour les études d'un lotissement sur les terrains expropriés, l'arrêt se borne à énoncer "que si le refus originaire d'autorisation de lotir n'est pas imputable à la commune, l'impossibilité pour les propriétaires de remettre en oeuvre leur projet de lotissement, après annulation de ce refus, résulte de la déclaration d'utilité publique prononcée au bénéfice de cette commune" ; Qu'en statuant par cette simple affirmation qui ne caractérise pas le lien de causalité entre l'expropriation au bénéfice de la commune et l'impossibilité pour les consorts J... de réaliser leur projet de lotissement, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ; PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qui concerne l'indemnité de cent mille francs allouée aux consorts J... pour perte de frais d'études de lotissement, l'arrêt rendu le 12 février 1988, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Caen ;