Sur le moyen unique, pris en ses trois branches :
Attendu, selon les énonciations des juges du fond, que le 30 avril 1981, M. X..., chauffeur de la société Masson, a, en conduisant l'un des camions de cette société, provoqué un accident ; que le 20 octobre 1981, le tribunal correctionnel l'a condamné pour homicide et blessures par imprudence et a fixé les indemnités à verser aux ayants droit, que ni ceux-ci, ni M. X... n'ont interjeté appel de ce jugement ;
Attendu que la société Masson avait été citée comme civilement responsable, qualité qu'elle n'a jamais contestée ; que le tribunal correctionnel n'a prononcé contre elle aucune condamnation ; qu'elle a cependant fait appel et que le 11 mai 1982, la cour d'appel de Lyon a déclaré cet appel irrecevable au motif que, n'ayant fait l'objet d'aucune condamnation, la société Masson était sans intérêt pour agir ; que cet arrêt a été cassé par la chambre criminelle de la Cour de Cassation pour la raison qu'un civilement responsable, lors même qu'il ne conteste pas cette qualité, a toujours intérêt à contester l'étendue du préjudice au cas où il serait amené à le réparer ; que, statuant le 19 décembre 1984 comme juridiction de renvoi et sur ce seul appel, la cour d'appel de Dijon a réduit les indemnités allouées ;
Attendu que les ayants droit des victimes avaient, entre-temps, en mars 1983, fait commandement à M. X... d'avoir à leur payer les indemnités fixées par le tribunal correctionnel ; que M. X... a appelé en garantie le Groupe Drouot auprès duquel son employeur la société Masson avait assuré le véhicule, ainsi que la société Masson elle-même ; que l'assureur a soutenu n'avoir à régler les indemnités que selon les chiffres plus faibles fixés par la cour d'appel de Dijon ; que par l'arrêt attaqué, la cour d'appel de Lyon a, en statuant sur l'appel de la compagnie d'assurances, relevé que, faute d'appel de M. X... contre le jugement du tribunal correctionnel fixant les indemnités dues par lui aux victimes, l'estimation qui en avait alors été faite était définitive à son encontre et que le Groupe Drouot lui devait sa garantie ; qu'elle a, d'autre part, déclaré irrecevable l'appel de la société Masson ;
Attendu que la société Masson et la compagnie Groupe Drouot font grief à l'arrêt attaqué d'avoir ainsi statué, alors, en premier lieu, que cet arrêt aurait dénaturé leurs conclusions communes en énonçant qu'elles n'auraient pas prétendu que le jugement correctionnel du 20 octobre 1981 leur aurait été inopposable ; alors, en second lieu, que ce même arrêt aurait violé l'autorité de la chose jugée s'attachant tant à l'arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de Cassation du 18 octobre 1983, qui reconnaissait l'intérêt du civilement responsable à agir, qu'à l'arrêt de la cour d'appel de Dijon du 19 décembre 1984 qui fixait autrement les dommages-intérêts ; et alors, enfin, que l'obligation de garantie résultant d'un contrat d'assurance étant limitée à ce qui est convenu entre l'assureur et le souscripteur du contrat, la cour d'appel n'aurait pu retenir contre l'assureur une condamnation d'un montant supérieur à celle prononcée contre ledit souscripteur, civilement responsable ;
Mais attendu qu'en matière d'assurance obligatoire des véhicules terrestres à moteur, le conducteur autorisé a la qualité d'assuré sans qu'il y ait lieu de faire intervenir la garantie accordée au civilement responsable ; que la décision judiciaire condamnant l'assuré à raison de sa responsabilité constitue pour l'assureur de cette responsabilité la réalisation, tant dans son principe que dans son étendue, du risque couvert et lui est, dès lors, opposable à moins de fraude à son encontre ;
Attendu qu'en constatant que M. X..., auquel le Groupe Drouot devait sa garantie en tant que conducteur autorisé, avait été condamné définitivement à certaines indemnités envers les victimes, sans que cet assureur eût jamais invoqué une fraude commise à son encontre, la cour d'appel a justifié sa décision à l'égard de celui-ci ; qu'il importe peu que la condamnation du civilement responsable, chiffrée différemment, lui ait été également déclarée opposable, dès lors que c'est en qualité d'assureur du conducteur autorisé qu'il a été condamné ;
Attendu, d'autre part, que la cour d'appel n'a pas davantage méconnu à l'égard de la société Masson l'autorité de la chose jugée, ni par la chambre criminelle de la Cour de Cassation ni par l'arrêt de la cour d'appel de Dijon, dès lors, ainsi qu'elle l'a relevé, que le montant des dommages-intérêts fixés à son encontre n'était plus en cause devant elle et que le seul problème à juger était de savoir laquelle des deux condamnations du responsable ou de la société Masson serait effectivement prise en charge par le Groupe Drouot ; qu'aucun des griefs du moyen ne peut donc être accueilli ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi