Attendu qu'il résulte des énonciations de l'arrêt attaqué (Douai, 12 février 1988) que M. X... s'est porté caution solidaire de la société Domani, en garantie du paiement des loyers et accessoires dus au bailleur du local commercial, la société Pierre Bernard ; que la société Domani a été mise en liquidation des biens le 1er octobre 1984 et que le syndic désigné a décidé de ne pas continuer le bail au-delà du 5 décembre suivant, date à laquelle les locaux ont été remis à la disposition du bailleur ; que ce dernier a assigné la caution en paiement des sommes restant dues ;
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de l'avoir condamné au paiement des sommes afférentes au quatrième trimestre 1984 alors que le jugement ouvrant une procédure collective prend effet le jour de son prononcé à la première heure ; que la masse des créanciers se forme de plein droit et obligatoirement à ce moment ; que le syndic doit payer les loyers échus à cette date, loyers constituant une dette de masse ; qu'en considérant que la liquidation des biens intervenue le 1er octobre 1984 était sans effet sur l'étendue de l'engagement de la caution, laquelle était redevable du loyer du quatrième trimestre, l'arrêt a violé par fausse application l'article 13, alinéa 1er, de la loi du 13 juillet 1967 ;
Mais attendu que les effets de la continuation du bail par le syndic de la procédure collective se produisent dans le patrimoine du débiteur et que le bailleur, tout en bénéficiant d'un droit de préférence sur les créanciers dans la masse, n'en demeure pas moins créancier du débiteur, de sorte que la caution solidaire de celui-ci est tenue au paiement ; que, dès lors, c'est à bon droit que la cour d'appel a retenu que l'ouverture de la procédure collective était sans effet sur l'étendue de l'engagement de M. X... ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur la recevabilité de la seconde branche du moyen, contestée par le défendeur au pourvoi :
Attendu que le grief concerne l'argumentation nouvelle par laquelle la cour d'appel a infirmé sur ce point la décision de première instance, favorable au demandeur au pourvoi ; qu'étant ainsi né de la décision attaquée, il peut être invoqué pour la première fois devant la Cour de Cassation ;
Et sur la seconde branche du moyen :
Vu les articles 1289 du Code civil et 13, alinéa 2, de la loi du 13 juillet 1967 ;
Attendu que, pour refuser à M. X... le bénéfice de la compensation entre la dette de loyer et le dépôt de garantie remis au bailleur, la cour d'appel a retenu que la caution ne pouvait opposer la compensation dès lors que la société Domani, en liquidation des biens, ne le pouvait elle-même ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que les règles de la procédure collective ne font pas obstacle à la compensation de créances réciproques unies par un lien de connexité comme étant nées du même contrat, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans la limite du moyen, l'arrêt rendu le 12 février 1988, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Amiens