Sur le moyen unique, pris en ses cinq branches :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Lyon, 20 mars 1986), que la société le Crédit général industriel (CGI) a accordé à M. Y... un crédit pour l'achat d'un matériel de restauration ; qu'un chèque du montant du crédit accordé portant la mention " règlement suivant détail et modalités du bordereau-souche ci-dessus dont le bénéficiaire vérifiera la conformité avant utilisation du présent chèque " a été émis par le CGI à l'ordre de M. X..., vendeur du matériel ; que M. Y... ayant été mis en règlement judiciaire sans avoir effectué le remboursement des mensualités à sa charge, le CGI, estimant que M. X... avait encaissé le chèque sans respecter les conditions auxquelles était subordonnée son utilisation, l'a assigné en paiement de dommages-intérêts ;
Attendu que le CGI fait grief à la cour d'appel de l'avoir débouté de sa demande alors, selon le pourvoi, d'une part, qu'aux termes de l'article 16 du nouveau Code de procédure civile, le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'en l'espèce, pour rejeter la demande en dommages-intérêts du CGI à l'encontre du vendeur, la cour d'appel a relevé d'office le moyen d'inopposabilité de la clause litigieuse tiré de ce que celle-ci ne figurait pas de façon suffisamment apparente sur le chèque, sans que les parties aient été invitées à présenter leurs observations et donc sans qu'il en ait été débattu contradictoirement ; qu'en statuant ainsi, elle a méconnu le principe du contradictoire et les droits de la défense, et violé le texte susvisé, alors, d'autre part, que le vendeur du matériel, M. X..., qui dans ses conclusions d'appel relevait l'existence sur le chèque de la mention " règlement suivant détail et modalités du bordereau-souche ci-dessus dont le bénéficiaire vérifiera la conformité avant l'utilisation du présent chèque " n'a jamais contesté avoir eu connaissance, lorsqu'il a reçu le chèque, de cette mention attirant son attention sur la nécessité de se reporter, avant utilisation du chèque, au bordereau-souche précisant le détail et les modalités du règlement ; qu'il s'est borné à soutenir, en première instance comme en appel, qu'il n'avait jamais été en possession de la lettre-chèque et qu'il n'avait donc pu connaître les conditions d'utilisation qui y figuraient ; qu'en statuant comme elle l'a fait, alors que M. X... invoquait l'inopposabilité des stipulations de la lettre-chèque et non de celles du chèque lui-même, ainsi d'ailleurs que le CGI l'avait souligné dans ses conclusions d'appel, la cour d'appel a méconnu les conclusions et prétentions des parties et excédé les limites du litige, et violé les articles 1134 du Code civil et 4 du nouveau Code de procédure civile, alors, en outre, que, par là-même, elle a violé les articles 1134 et 1147 du Code civil ; qu'en effet, d'une part, le tireur du chèque conserve le droit de demander le remboursement des sommes perçues par le bénéficiaire lorsque ce dernier a méconnu les obligations contractuelles qui étaient la contrepartie du paiement et qu'il a acceptées en recevant ce paiement sans émettre aucune réserve, et que, d'autre part, commet une faute l'obligeant au paiement des réparations prévues le bénéficiaire qui, ayant eu connaissance de l'existence de conditions spéciales du prêt, néglige de s'informer plus amplement quant à ces
conditions, alors, au surplus, que la cour d'appel n'a pu, sans dénaturer le chèque litigieux, affirmer que la mention précitée n'était pas de nature à retenir l'attention du bénéficiaire ; qu'en effet, ladite mention était imprimée au recto du chèque et en plein milieu de celui-ci, en caractères clairs et apparents, tenant toute la largeur du chèque, sous l'indication de la somme à payer et au-dessus du nom du bénéficiaire ; qu'ainsi celui-ci, professionnel avisé des choses du commerce, ne pouvait ignorer à la simple lecture de l'effet dont le tireur était un établissement de crédit, que le règlement était soumis à des conditions particulières ; d'où il suit qu'en en décidant autrement, l'arrêt attaqué a dénaturé le chèque et violé l'article 1134 du Code civil et alors, enfin, que le CGI se prévalait de surcroît, dans ses conclusions, d'une autre clause suivant laquelle " en cas de contestation, la présente pièce de règlement doit être retournée sans délai directement à notre siège après avoir revêtu le chèque de la mention " annulé ", et faisait valoir qu'en négligeant, malgré l'existence de cette seconde mention s'ajoutant à celle faisant référence au " bordereau-souche ci-joint ", de s'informer plus amplement sur les conditions spéciales d'utilisation, la société venderesse avait commis une faute l'obligeant aux réparations prévues ; que la cour d'appel n'a pas répondu à ce moyen et ainsi violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu, en premier lieu, que le CGI ayant objecté au moyen par lequel M. X... faisait valoir qu'il n'avait pas été informé des conditions d'utilisation du chèque litigieux faute d'avoir reçu la lettre devant l'accompagner, que le chèque portait une mention très apparente stipulant qu'il ne devait pas être utilisé si le financement n'était pas conforme aux conditions énoncées par la lettre, que cette mention inhabituelle aurait dû attirer l'attention d'un commerçant qui doit lire avec le plus grand soin les lettres ou documents qui lui sont adressés, de sorte que toutes les clauses et conditions d'utilisation du chèque étaient opposables à M. X..., c'est sans méconnaître les limites du litige ni violer le principe de la contradiction que la cour d'appel a répondu à ce moyen du CGI ;
Attendu, en second lieu, que c'est dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation des éléments de preuve versés aux débats que la cour d'appel a considéré que M. X... n'avait pas été mis en mesure de connaître l'obligation constituant prétendument la contrepartie de l'émission par le CGI à son ordre du chèque litigieux ; qu'ayant déduit de ces constatations que M. X... n'avait pu, dès lors, méconnaître cette obligation, la cour d'appel, hors toute dénaturation et répondant aux conclusions invoquées, a légalement justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi