La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

05/01/1989 | FRANCE | N°88-81217

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 05 janvier 1989, 88-81217


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique, tenue au Palais de Justice, à PARIS, le cinq janvier mil neuf cent quatre vingt neuf, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire BREGEON, les observations de Me CONSOLO, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général PERFETTI ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- Y... Victor,

contre l'arrêt de la cour d'appel de RENNES, chambre correctionnelle, en date du 5 février 1988, qui, dans la procédure suivie contre lu

i des chefs d'abus de biens sociaux et abus de pouvoir, a prononcé sur les réparations ...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique, tenue au Palais de Justice, à PARIS, le cinq janvier mil neuf cent quatre vingt neuf, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire BREGEON, les observations de Me CONSOLO, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général PERFETTI ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- Y... Victor,

contre l'arrêt de la cour d'appel de RENNES, chambre correctionnelle, en date du 5 février 1988, qui, dans la procédure suivie contre lui des chefs d'abus de biens sociaux et abus de pouvoir, a prononcé sur les réparations civiles ;

Vu le mémoire produit ;

Sur le premier moyen de cassation pris de la violation des articles 510, 593 du Code de procédure pénale, R. 213-6, R. 213-7 du Code de l'organisation judiciaire, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué mentionne : "la cause ayant été débattue à l'audience publique du 19 novembre 1987... devant M. Roy, conseiller, présidant l'audience, à ce désigné par ordonnance de M. le premier président, en date du 29 décembre 1987 pour remplacer le président de la chambre titulaire, empêché, M. Mantei et Mme Arin, conseillers, qui en ont délibéré conformément à la loi" ;

"alors qu'il résulte des dispositions combinées des articles R. 213-6 et R. 213-7 du Code de l'organisation judiciaire que les présidents de chambre sont, en cas d'empêchement, remplacés pour le service de l'audience par un magistrat du siège désigné par ordonnance du premier président prise dans la première quinzaine du mois qui précède l'année judiciaire ; que lorsque cette ordonnance n'existe pas, le président de chambre empêché doit être remplacé par le magistrat du siège présent le plus ancien dans l'ordre des nominations ; qu'en la cause, l'ordonnance du premier président de la cour de Rennes du 29 décembre 1987 ne pouvait légalement désigner M. Roy, pour remplacer le président de chambre empêché que pour l'année 1988 et non, rétroactivement, pour l'année 1987 ; qu'ainsi donc, M. Roy ayant présidé l'audience des débats du 19 novembre 1987 en vertu d'une ordonnance postérieure du premier président en date du 29 décembre 1987, l'arrêt attaqué encourt la cassation pour violation des articles R. 213-6 et R. 213-7 du Code de l'organisation judiciaire" ;

Attendu que l'arrêt attaqué énonce que la chambre des appels correctionnels était présidée par M. le conseiller Roy en remplacement du président de chambre titulaire empêché ; qu'il se déduit de ces mentions, abstraction faite d'une erreur purement matérielle que ce conseiller a été régulièrement appelé à présider l'audience ;

D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;

Sur le deuxième moyen de cassation pris de la violation des articles 2, 3, 475-1 et 593 du Code de procédure pénale, 1382 et 1383 du Code civil, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt confirmatif attaqué a condamné M. Y... à payer à Me Berthelot es qualités, compte tenu de la provision de 1 370 843 francs déjà versée, une somme de 883 121,15 francs à titre de dommages-intérêts, soit au total 2 253 964,15 francs (comprenant notamment 110 467 francs au titre de la consommation de fuel), et l'a condamné en outre tant aux dépens de première instance et d'appel qu'à payer à Me Berthelot 10 000 francs plus 7 000 francs au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale ;

"aux motifs que "l'expert désigné, après avoir relevé l'imprécision du libellé des bons de livraison du fournisseur de fuel, a néanmoins par recoupement établi un relevé des consommations à partir des explications qu'il a recueillies, puis a soumis un pré-rapport au prévenu qui a fait valoir ses observations au terme desquelles les montants estimés ont été sensiblement diminués, et son accord intervenu pour une livraison à son domicile de Rennes de 53 600 litres au lieu de 61 032 litres et sur sa résidence de Montfort de 22 865 litres, représentant une facturation totale de 110 467 francs, somme retenue par les premiers juges ; que l'appelant n'apporte donc aucun élément nouveau de nature à contredire les évaluations de l'expert auxquelles il a donné son accord et permettant de remettre en cause les conclusions de son rapport" ;

"alors que, loin de constater l'accord de Y... pour une livraison à son domicile de Rennes de 53 600 litres de fuel et au Manoir de Montfort de 22 865 litres, l'expert, dans son rapport du 19 juin 1986 versé aux débats, mentionnait qu'"à la suite du pré-rapport, Y... m'a fait remarquer des consommations qui lui paraissent excessives, certaines sur Rennes ; il serait d'accord pour 53 600 litres ; compte tenu de l'imprécision des lieux de livraison sur les bons, je retiendrai cette quantité" (et 22 865 litres pour Montfort) ; qu'ainsi l'expert n'avait constaté l'accord de Y... ni sur 53 600 litres de fuel, ni surtout sur l'affectation de ces litres au seul domicile de Rennes, ni évidemment l'accord du demandeur sur 22 865 litres pour le manoir de Montfort ; que Y... soutenait, dans ses conclusions d'appel, que le rapport de l'expert était imprécis et donc inexploitable et reconnaissait seulement être débiteur de 72 000 francs ; qu'en répondant comme ils l'ont fait en dénaturant le rapport d'expertise, les juges du fond ont entaché leur arrêt d'une insuffisance de

motifs équivalant à leur absence, en violation de l'article 593 du Code de procédure pénale, ce qui entraîne la cassation totale de l'arrêt attaqué" ;

Attendu que le moyen, en ce qu'il revient à remettre en discussion devant la Cour de Cassation des éléments de fait contradictoirement débattus devant les juges du fond et souverainement appréciés par eux, ne peut qu'être écarté ;

Sur le troisième moyen de cassation pris de la violation des articles 2, 3, 475-1 et 593 du Code de procédure pénale, 1382 et 1383 du Code civil, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt confirmatif attaqué a condamné M. Y... à payer à Me Berthelot es qualités, compte tenu de la provision de 1 370 843 francs déjà versée, une somme de 883 121,15 francs à titre de dommages-intérêts, soit au total 2 253 964,15 francs (comprenant notamment 793 553,27 francs au titre de "créances SOTRACO sur SMC"), et l'a condamné en outre tant aux dépens de première instance et d'appel qu'à payer à Me Berthelot 10 000 francs plus 7 000 francs au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale ;

"aux motifs propres et adoptés que le tribunal de commerce de Rennes, saisi du règlement judiciaire, puis de la liquidation des biens de la SOTRACO, a retenu comme certaine la créance due par la SMC après vérification à hauteur de 793 553,27 francs, décision confirmée par la cour d'appel de Rennes ;

"alors que Y... soutenait dans ses conclusions d'appel que, de la somme de 793 553,27 francs, devait être déduite celle de 648 832 francs correspondant à des facturations injustifiées que la SOTRACO avait opérées auprès de clients de la SMC en qualité de sous-traitante de cette dernière et que la SOTRACO avait réclamées en trop à la SMC ; que la cour d'appel n'a rien répondu à ces conclusions péremptoires, en violation de l'article 593 du Code de procédure pénale ; qu'ainsi l'arrêt attaqué encourt derechef une cassation totale" ;

Sur le quatrième moyen de cassation pris de la violation des articles 2, 3, 427, 475-1 et 593 du Code de procédure pénale, 1382 et 1383 du Code civil, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt confirmatif attaqué a condamné Y... à payer à Me Berthelot es qualités, compte tenu de la provision de 1 370 843 francs déjà versée, une somme de 883 121,75 francs à titre de dommages-intérêts, soit au total 2 253 964,15 francs (comprenant notamment 349 943,88 francs au titre de "créances SOTRACO sur MDB"), et l'a condamné en outre tant aux dépens de première instance et d'appel qu'à payer à Me Berthelot 10 000 francs plus 7 000 francs au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale ;

"aux motifs propres et adoptés que "le tribunal de commerce de Rennes, amené par le syndic de la liquidation des biens de la SOTRACO, à se prononcer sur le bien-fondé des créances dues par la société MDB, a désigné à cette fin un expert qui a procédé à l'examen des factures et conclu :

- "sur les factures de 234 024 francs et de 82 024 francs, relatives aux quotes-parts de participation de la société MDB aux frais de structures du groupe, qu'elles étaient régulières en la forme, que les écritures adéquates avaient été passées dans les livres comptables de SOTRACO et de MDB et ce sans réserves à l'époque,

- "sur la facture de 41 842,08 francs, qu'elle était également formellement régulière, mais qu'il convenait d'en déduire un excédent de 9 962,40 francs représentant une double imputation,

- "qu'il existait une quatrième facture datée du 30 octobre 1983 d'un montant de 2 016,20 francs non contestée par les parties ;

que l'expert a rejeté les contestations de Y... relatives aux salaires du directeur financier après examen des documents produits ; que les premiers juges ont ainsi retenu le total de la créance due comme certaine à 234 024 + 82 024 + 31 879,68 + 2 016,20 =

349 943,88 francs ; que Y..., pour contester cette créance, se borne à reprendre les éléments déjà soulevés devant la juridiction commerciale et analysés par l'expert qui a écarté les objections présentées et vérifié les factures, sans apporter aucun élément nouveau de nature à en contredire les résultats" ;

"alors que s'il n'est pas interdit au juge de fonder sa conviction sur les éléments d'une autre procédure, c'est à la condition que les documents produits aient été soumis à la libre discussion des parties ; qu'en se fondant sur un rapport d'expertise ordonné par le tribunal de commerce de Rennes dans le cadre de la procédure collective concernant la SOTRACO, alors qu'il ne résulte ni du dossier de procédure, ni des écritures des parties, ni des constatations de l'arrêt attaqué que le rapport d'expertise susvisé ait été soumis à la libre discussion des parties, la cour d'appel a violé l'article 427 du Code de procédure pénale, ce qui entraîne encore une cassation totale" ;

Les moyens étant réunis ;

Attendu qu'il appert des énonciations de l'arrêt attaqué que par jugement en date du 9 mai 1985, devenu définitif, le tribunal correctionnel a déclaré Victor Y..., en sa qualité de directeur général de la société anonyme "SOTRACO", coupable d'abus de pouvoirs pour avoir sciemment omis de recouvrer ou de faire recouvrer des créances dues à celle-ci par la société "SMC" pour un montant de 833 000 francs et par la société "MDB" pour un montant de 357 000 francs, ainsi que d'abus de biens sociaux ; que, prononçant sur l'action civile, le même jugement a déclaré recevable la constitution de partie civile du syndic à la liquidation des biens de la société "SOTRACO", ordonné une expertise comptable et condamné le prévenu au versement d'une provision à la partie civile ; que par jugement, en date du 15 juillet 1987, le tribunal correctionnel a fixé le montant des réparations civiles ; que seule cette dernière décision a été frappée d'appel ;

Attendu qu'en condamnant Victor Y... à payer à titre de dommages-intérêts 793 553,27 francs à raison des créances de "SOTRACO" non recouvrées sur "SMC" et 349 943,88 francs à raison de celles non recouvrées sur "MDB", la cour d'appel n'a nullement encouru les griefs allégués aux moyens, les juges de répression appréciant souverainement, dans les limites des conclusions de la partie civile, l'indemnité qui lui est allouée sans qu'ils soient tenus de spécifier sur quelle base ils ont évalué le montant de celle-ci ;

D'où il suit que les moyens, en ce qu'ils reviennent à critiquer les dispositions du jugement précité du 9 mai 1985 ayant acquis autorité de la chose jugée, sont irrecevables ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

Condamne le demandeur aux dépens ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Où étaient présents : M. Le Gunehec président, Mme Bregeon conseiller référendaire rapporteur, MM. Tacchella, Souppe, Gondre, Hébrard, Hecquard, Guilloux, Blin conseillers de la chambre, M. Bayet conseiller référendaire, M. Perfetti avocat général, Mme Patin greffier de chambre ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 88-81217
Date de la décision : 05/01/1989
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes, chambre correctionnelle, 05 février 1988


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 05 jan. 1989, pourvoi n°88-81217


Composition du Tribunal
Président : M

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1989:88.81217
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award