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13/09/1988 | FRANCE | N°88-82297

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 13 septembre 1988, 88-82297


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique, tenue au Palais de Justice, à PARIS, le treize septembre mil neuf cent quatre vingt huit, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller GONDRE, les observations de la société civile professionnelle Philippe et Claire WAQUET, et Hélène FARGE, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général GALAND ; Statuant sur les pourvois formés par :

- A... Paul,

- E... Louis,
contre un arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel d'AIX-EN-PROVENCE, en date du 10 février

1988, qui, les a renvoyés devant la cour d'assises du département des Alpes-Ma...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique, tenue au Palais de Justice, à PARIS, le treize septembre mil neuf cent quatre vingt huit, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller GONDRE, les observations de la société civile professionnelle Philippe et Claire WAQUET, et Hélène FARGE, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général GALAND ; Statuant sur les pourvois formés par :

- A... Paul,

- E... Louis,
contre un arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel d'AIX-EN-PROVENCE, en date du 10 février 1988, qui, les a renvoyés devant la cour d'assises du département des Alpes-Maritimes, A... Paul sous l'accusation de vols avec armes et pour délits connexes de détention d'armes, coups et violences volontaires avec arme, E... Louis sous l'accusation de vols avec armes et pour délit connexe de détention d'armes ; Vu les arrêts de la chambre criminelle, en date du 28 juin 1988, décidant de surseoir à statuer sur les pourvois, et ordonnant la transmission et le dépôt du dossier de la procédure au greffe de la Cour de Cassation ; Joignant les pourvois en raison de la connexité ; Vu le mémoire produit commun aux deux demandeurs ; Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 191, 192 et 199 du Code de procédure pénale, 593 de ce Code, 20 de l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958, défaut de motifs et manque de base légale ; " en ce que l'arrêt mentionne que la chambre d'accusation était présidée par Mme Mabelly et que M. Bourion, auditeur de justice, composant la chambre d'accusation a pris part au délibéré avec voix consultative ; " alors qu'aux termes de l'article 191 nouveau du Code de procédure pénale, tel qu'il résulte des dispositions de l'article 12-1, immédiatement applicables, de la loi du 30 décembre 1987, le président de la chambre d'accusation est désigné par décret après avis du Conseil supérieur de la magistrature ; qu'en l'espèce, les mentions de l'arrêt attaqué ne mettent pas la Cour de Cassation en mesure de d'assurer que Mme Mabelly a été désignée conformément aux dispositions nouvelles du texte susvisé ;

" et alors que seuls peuvent composer la chambre d'accusation les magistrats, l'avocat général et le greffier ; qu'ainsi M. Bourion ne pouvait composer la chambre d'accusation, ni même assister au délibéré de cette juridiction avec voix consultative ; qu'il s'ensuit que l'arrêt attaqué a été rendu par une juridiction illégalement composée " ; Attendu, d'une part, qu'il résulte des pièces produites aux débats que Mme Mabelly, président de chambre, a été désignée le 9 novembre 1987 par l'assemblée générale de la cour d'appel d'Aix-en-Provence pour présider la chambre d'accusation pendant l'année judiciaire 1988, conformément aux dispositions de l'article 191 du Code de procédure pénalee, dans sa rédaction alors applicable ; Que cette désignation, régulièrement faite, demeure valable jusqu'à la publication des décrets prévus par la loi du 30 décembre 1987 ; Attendu, d'autre part, que l'arrêt attaqué mentionne que la chambre d'accusation a statué en présence de M. Bourion, auditeur de justice, qui a pris part au délibéré avec voix consultative ; Que la procédure ainsi suivie entre dans les prévisions de l'article 19 de l'ordonnance du 22 décembre 1958, tel qu'il est rétabli par la loi organique du 17 juillet 1970 ; D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ; Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 102, 106, 107, 121, 206, 591 et 593 du Code de procédure pénale ; " en ce que l'arrêt attaqué a refusé d'annuler le procès-verbal d'interrogatoire de A... en date du 17 octobre 1986 ; " aux motifs que la substitution du nom du greffier par celui de Paul B... constituait une simple erreur matérielle qui n'avait pas eu pour effet de porter atteinte aux droits de l'inculpé qui l'avait signé sans formuler d'objection en l'état cependant de deux erreurs matérielles l'une concernant le nom du greffier, l'autre celle de son conseil ; " alors qu'en vertu des dispositions combinées des articles 121, 106 et 107, les procès-verbaux d'interrogatoire doivent être, à peine de nullité, signés du juge, du greffier et de la personne entendue ; qu'en l'espèce, il est constant que le procès-verbal du 17 octobre 1986 indique que le greffier était M. Paul B..., autre inculpé ; qu'il s'ensuit que le procès-verbal qui n'a pas été établi conformément aux dispositions des textes précités est nul et que la chambre d'accusation devait constater cette nullité " ;

Attendu qu'il ressort de l'examen des pièces de la procédure que le 17 octobre 1986 le juge d'instruciton était assisté de Michèle Clary, greffier, qui a signé les procès-verbaux d'interrogatoire et de confrontation de Gilbert Y... et de Paul A... ; que toutefois le nom d'un autre inculpé, Paul B..., a été mentionné aux lieu et place du nom du greffier sur le procès-verbal d'interrogatoire et de confrontation de Paul A... ; Attendu que pour écarter les conclusions de nullité dont elle était saisie, la chambre d'accusation énonce qu'il résulte des dispositions combinées des articles 106, 107 et 121 du Code de procédure pénale que les procès-verbaux doivent être signés par le juge d'instruction et le greffier, que tel est le cas en l'espèce ; qu'elle ajoute que la substitution du nom de Navarra à celui du greffier constitue une simple erreur matérielle qui n'a pas eu pour effet de porter atteinte aux droits de l'inculpé qui a lui-même signé ce procès-verbal ; Attendu qu'en cet état la chambre d'accusation a fait l'exacte application des textes visés au moyen ; qu'en effet l'article 106 du Code de procédure pénale, rendu applicable aux procès-verbaux d'interrogatoire et de confrontation par l'article 121 du même Code, n'exige pas que le nom du greffier soit mentionné sur ces procès-verbaux, qu'il suffit pour désigner le greffier que sa signature figure, comme en l'espèce, au bas de chacune des pages de l'acte ; Que, dès lors, le moyen ne peut qu'être rejeté ; Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 81, 591 et 593 du Code de procédure pénale, 6 § 3 d) de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble violation des droits de la défense ; " en ce que l'arrêt attaqué a rejeté la demande de complément d'information de A... ; " aux motifs que les inculpés avaient été présentés aux témoins qui les avaient reconnus de manière plus ou moins formelle ; que ces témoins avaient été entendus et que leurs déclarations avaient été portées à la connaissance des inculpés qui avaient ainsi pu faire valoir leurs moyens de défense ;

" alors que, en vertu de l'article 6 § 3 d) de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, tout accusé a droit d'interroger lui-même les témoins à sa charge ; qu'à l'appui du complément d'information qu'il sollicitait, A... avait fait valoir, dans son mémoire, qu'il n'avait jamais pu obtenir malgré ses demandes réitérées au juge d'instruction à cet effet, d'être confronté avec ses accusateurs et de les interroger ; que la chambre d'accusation qui admet implicitement le bien-fondé de la demande avait le devoir d'y faire droit ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la chambre d'accusation a violé les droits de la défense et privé sa décision de base légale " ; Sur le quatrième moyen de cassation, pris de la violation des articles 81, 591 et 593 du Code de procédure pénale, 6 § 3 d) de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, défaut de réponse à mémoire, ensemble violation des droits de la défense ; " en ce que l'arrêt attaqué a rejeté la demande de complément d'information de E... ; " aux motifs que les inculpés avaient été présentés aux témoins qui les avaient reconnus de manière plus ou moins formelle, que ces témoins avaient été entendus et que leurs déclarations avaient été portées à la connaissance des inculpés qui avaient ainsi pu faire valoir leurs moyens de défense ; " alors qu'en vertu de l'article 6 § 3 d) de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, tout accusé a le droit de faire interroger ou d'interroger lui-même les témoins à charge et à décharge ; que E... avait, à plusieurs reprises et en vain, demandé l'audition de huit témoins à décharge qui l'avaient vu en Corse à l'époque où se sont produits à Nice les vols aggravés qui lui sont reprochés ; qu'il avait également demandé à interroger lui-même le seul témoin à charge, Mme X..., et que la confrontation avec ce témoin avait été interrompue avant qu'il puisse lui poser une question ; qu'ainsi l'information a été diligentée exclusivement à charge, en violation des droits de la défense ; qu'il s'ensuit qu'en refusant de faire droit à la demande de complément d'information sans s'expliquer sur les articulations essentielles du mémoire de l'inculpé, la chambre d'accusation a entériné une violation des droits de la défense et privé sa mise en accusation de base légale " ; Sur le cinquième moyen de cassation, pris de la violation des articles 384 du Code pénal et 593 du Code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale, défaut de réponse à conclusions ;

" en ce que l'arrêt attaqué a prononcé la mise en accusation de l'inculpé E... devant la cour d'assises des Alpes-Maritimes des chefs de vols aggravés par le port d'armes apparentes au préjudice d'un supermarché Casino à Nice, d'une agence du Crédit Mutuel à Nice et d'un magasin Sodim à Nice, et détention illégale d'armes des 1ère et 4ème catégories ; " aux motifs que les charges pesant contre les inculpés résultent des reconnaissances faites par les témoins ou des ressemblances relevées, des déclarations de Y... et D..., de la découverte des pièces de monnaie, des armes, des sommes d'argent saisies à leur domicile sur lesquelles ils n'avaient pu fournir d'explications, des circonstances de leur identification grâce au numéro d'immatriculation du véhicule de E..., de leur absence d'alibi en Corse au moment des faits alors que trois témoins soutenaient qu'ils se trouvaient à Nice entre le 29 juillet et le 5 août ; " alors qu'en prononçant la mise en accusation de E... pour le vol aggravé commis au préjudice du magasin Sodim tout en constatant qu'aucun des témoin interrogés ne l'avait reconnu (arrêt p. 7 pénultième paragraphe) la chambre d'accusation s'est contredite et n'a pas légalement justifié sa décision ; " et alors que, dans son mémoire, l'inculpé avait souligné que ni le témoin X... du supermarché Casino, ni les 12 témoins présents le jour de l'agression contre l'agence du Crédit Mutuel ne l'avaient formellement reconnu ; qu'en affirmant, contre les éléments du dossier, dans l'exposé des faits, que le témoin X... avait précisément reconnu l'inculpé et que celui-ci avait été reconnu par Mme C... et G... et M. F..., sans s'expliquer sur les articulations essentielles du mémoire de la défense cependant que le doute doit profiter à l'accusé, la chambre d'accusation n'a pas légalement justifié la mise en accusation du chef de vol aggravé au préjudice du supermarché Casino " ; Sur le sixième moyen de cassation, pris de la violation des articles 15, 20, 28 et 32 du décret-loi du 18 avril 1939, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ; " en ce que l'arrêt attaqué a mis A... en accusation du chef de détention illégale d'armes de la 1ère et de la 4ème catégories ; " alors qu'il résulte des énonciations de l'arrêt attaqué que E... avait admis être propriétaire du pistolet 11, 43 et du révolver 38 spécial (p. 8) découverts lors de la perquisition du 3 septembre 1985 ; qu'il n'est nulle part constaté qu'il eût jamais eu en sa possession lesdites armes ; que, dès lors, la mise en accusation de ce chef n'est pas légalement justifiée " ; Les moyens étant réunis ;

Attendu que pour écarter la demande de supplément d'information et renvoyer les inculpés devant la cour d'assises la chambre d'accusation, après avoir exposé que trois vols à main armée ont été commis à Nice selon le même mode opératoire, au supermarché Casino, au Crédit Mutuel et au supermarché Sodim, relève que le soir du troisième vol, Louis E... se serait rendu à bord de son véhicule et en compagnie de Paul A... au domicile de Gilbert Y... et de sa concubine Christine D... pour y déposer un lot de pièces de monnaie contenu dans un sac Sodim ; Que les juges constatent que la perquisition aurait permis de découvrir dans un blouson appartenant à Louis E... la somme de 8 000 francs et dans une malette celle de 110 000 francs, ainsi qu'un révolver Smith et Wesson approvisionné, un pistolet Colt et des munitions ; que la fouille aurait révélé que Paul A... était porteur d'une somme de 4 050 francs ; qu'ils observent que les directeurs et les employés des trois établissements auraient reconnu les uns E..., les autres A..., comme étant les auteurs des vols à main armée ; qu'ils indiquent enfin qu'une caissière du supermarché Sodim aurait désigné A... comme étant l'individu qui l'avait frappée d'un coup de crosse ; Attendu qu'en l'état de ces énonciations l'arrêt attaqué a répondu aux chefs péremptoires des conclusions déposées au nom des inculpés et a suffisamment caractérisé, sans encourir les griefs allégués, les circonstances dans lesquelles, à supposer les faits établis, A... et E... auraient commis les vols avec armes et le délit connexe de détention d'armes, et, en outre, A... le délit connexe de coups et blessures avec arme ; Qu'en effet, d'une part, les chambres d'accusation en statuant sur les charges de culpabilité apprécient souverainement, au point de vue des faits, tous les éléments constitutifs des crimes et délits connexes ; que la Cour de Cassation n'a d'autre pouvoir que de vérifier si la qualification qu'elles ont donnée aux faits justifie le renvoi devant la juridiction de jugement, qu'il ne lui appartient pas d'apprécier la valeur des charges dont elles ont affirmé l'existence ; Que, d'autre part, le droit reconnu à tout accusé par l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, d'interroger ou de faire interroger les témoins à charge, et d'obtenir la convocation et l'interrogation des témoins à décharge dans les mêmes conditions que les témoins à charge, demeure entier devant la juridiction de jugement ; D'où il suit que les moyens réunis ne sauraient être accueillis ; Et attendu que la chambre d'accusation était compétente, qu'il en est de même de la cour d'assises devant laquelle les demandeurs ont été renvoyés, que la procédure est régulière et que les faits objet de l'accusation principale sont qualifiés crimes par la loi ; REJETTE les pourvois


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 88-82297
Date de la décision : 13/09/1988
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

CHAMBRE D'ACCUSATION - Composition - Auditeur de justice - Délibéré - Voix consultative - Régularité.

INSTRUCTION - Interrogatoire - Procès verbal - Mentions - Signature - Signature du greffier - Conditions.

CHAMBRE D'ACCUSATION - Arrêt de mise en accusation devant la Cour d'assises - Contrôle de la Cour de Cassation - Valeur des charges affirmées (non).


Références :

Code de procédure pénale 106, 107, 121
Ordonnance du 22 décembre 1958 art. 19

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 10 février 1988


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 13 sep. 1988, pourvoi n°88-82297


Composition du Tribunal
Président : Président : M.LeGUNEHEC

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1988:88.82297
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