La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

26/07/1988 | FRANCE | N°87-81745

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 26 juillet 1988, 87-81745


REJET du pourvoi formé par :
- X... Félix,
contre un arrêt de la cour d'appel de Lyon, 4e chambre, en date du 18 février 1987, qui, pour infraction à la législation sur les relations financières avec l'étranger, l'a condamné à 3 mois d'emprisonnement avec sursis, et qui, à la demande de l'administration des Douanes, partie intervenante, s'est prononcé sur les pénalités cambiaires.
LA COUR,
Vu les mémoires produits, tant en demande qu'en défense ;
Sur les faits :
Attendu qu'il appert de l'arrêt attaqué que le 7 janvier 1982 des agents des Douanes de Fern

ey-Voltaire ont interpellé dans le secteur français de l'aéroport de Genève-Cointri...

REJET du pourvoi formé par :
- X... Félix,
contre un arrêt de la cour d'appel de Lyon, 4e chambre, en date du 18 février 1987, qui, pour infraction à la législation sur les relations financières avec l'étranger, l'a condamné à 3 mois d'emprisonnement avec sursis, et qui, à la demande de l'administration des Douanes, partie intervenante, s'est prononcé sur les pénalités cambiaires.
LA COUR,
Vu les mémoires produits, tant en demande qu'en défense ;
Sur les faits :
Attendu qu'il appert de l'arrêt attaqué que le 7 janvier 1982 des agents des Douanes de Ferney-Voltaire ont interpellé dans le secteur français de l'aéroport de Genève-Cointrin, à l'arrivée d'un vol en provenance de Paris, Félix X... qui a dit n'avoir rien à déclarer ; qu'il a été trouvé porteur de quatre chèques tirés à l'ordre de son fils mineur sur le compte d'un tiers ouvert dans une banque de Lausanne et libellé en dollars américains, ainsi que la clef d'un coffre-fort ; que le même jour les scellés ont été apposés sur ce dernier ouvert au nom de X... dans une banque de Paris ; que les 12 et 13 janvier 1982, des inspecteurs de la Direction nationale des enquêtes douanières, assistées d'un officier de police judiciaire, ont, après ouverture dudit coffre-fort, saisi les devises étrangères qu'il contenait ainsi qu'une certaine somme en francs français pour sûreté des pénalités encourues ; que X... a été interrogé par lesdits inspecteurs et sur l'exportation sans déclaration de moyens de paiement et sur la détention irrégulière de devises étrangères ;
Que par acte introductif d'instance fiscale, une information a été ouverte le 9 janvier 1985 par le procureur de la République de Bourg-en-Bresse, et qu'après renvoi devant le tribunal correctionnel, la cour d'appel de Lyon a déclaré X... coupable de l'ensemble des faits dénoncés ;
En cet état :
Sur le premier moyen de cassation pris de la violation des articles 351, 358 du Code des douanes, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale :
" en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a rejeté l'exception de prescription de l'action publique concernant le délit d'exportation sans déclaration de moyens de paiement ;
" aux motifs que, dès lors que X..., impliqué dans une affaire d'infraction à la législation des changes, avait été trouvé porteur d'une clé de coffre, les investigations des agents des Douanes, commencées à Genève-Cointrin, étaient tout naturellement poursuivies par des agents territorialement compétents pour intervenir au lieu où se trouvait le coffre ; que les inspecteurs de la Direction nationale des enquêtes douanières avaient compétence non seulement pour effectuer la visite de ce coffre, mais aussi pour poursuivre l'enquête en ce qui concerne l'exportation sans déclaration de moyens de paiement constatée par les agents du bureau de Genève-Cointrin ; que le délai de prescription a été interrompu non seulement par le procès-verbal d'audition et de saisie du 13 janvier 1982, mais aussi par les procès-verbaux de visite du coffre et de saisie pour sûreté des pénalités encourues en date des 12 et 13 janvier 1982, ces procès-verbaux étant la suite nécessaire du procès-verbal de saisie du 7 janvier 1982 et ayant eu pour objet de poursuivre les investigations dans une région autre que celle où avaient eu lieu les actes de poursuites antérieurs, de procéder le cas échéant à de nouvelles saisies, de recueillir les explications de l'inculpé et de déterminer les circonstances et la gravité des infractions commises ;
" alors que les procès-verbaux de l'Administration ne constituent un acte d'instruction et de poursuite interruptif de la prescription que s'ils émanent d'agents compétents ; qu'il résulte de l'article 358 du Code des douanes que les infractions douanières, dès lors qu'elles sont constatées par un procès-verbal de saisie, relèvent de la compétence exclusive du tribunal dans le ressort duquel est situé le bureau des Douanes le plus proche du lieu de constatation de l'élément matériel de l'infraction ; qu'en l'espèce, le procès-verbal de constat intervenu le 7 janvier 1982 à Genève-Cointrin, portant sur un fait d'exportation sans déclaration de moyens de paiement auquel a fait suite immédiatement un procès-verbal de signification à l'intéressé de ladite infraction, puis un procès-verbal d'interrogatoire et de saisie, a délimité l'objet de l'inculpation et l'étendue des poursuites à l'encontre de X..., et déterminé la compétence exclusive ratione loci ; que, dès lors, les agents des Douanes procédant à Paris, les 12 et 13 janvier 1982, à la visite domiciliaire d'un coffre bancaire, à la mise sous scellés puis à la saisie des devises étrangères, établissant un procès-verbal de saisie ayant pour effet de déterminer le fait constaté et le fondement des poursuites, à savoir la détention irrégulière de devises étrangères, n'avaient pas qualité pour sortir du cadre de cette enquête précise et interroger le demandeur sur un précédent délit parfaitement distinct et établi par ailleurs ; que, dès lors, le procès-verbal d'interrogatoire du 13 janvier 1982 émanant d'agents radicalement incompétents pour y procéder ne constitue pas un acte interruptif de prescription ; qu'il en est de même des procès-verbaux de constat et de saisie des 12 et 13 janvier 1982 complètement étrangers aux faits susceptibles de constituer le délit d'exportation sans déclaration de moyens de paiement ; qu'en conséquence, aucun acte n'étant venu valablement interrompre la prescription, celle-ci se trouve acquise " ;
Attendu que pour rejeter l'exception de prescription de l'infraction qui, constatée le 7 février 1982, avait motivé l'ouverture d'une information le 9 février 1985, la cour d'appel, après avoir, pour les motifs qu'elle indique, et que ne critique pas le moyen, dit régulier en la forme un procès-verbal du 13 janvier 1982, énonce que la prescription a été interrompue notamment par le procès-verbal d'interrogatoire et de saisie de l'argent français du 13 janvier 1982, suite nécessaire du procès-verbal de saisie du 7 janvier 1982 et ayant eu pour objet de poursuivre les investigations dans une région autre que celle où avaient eu lieu les actes de poursuite antérieurs, de procéder, le cas échéant à de nouvelles saisies, de recueillir des explications de l'inculpé et de déterminer les circonstances et la gravité des infractions commises ;
Attendu qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a fait l'exacte application des articles 7 et 8 du Code de procédure pénale applicables aux infractions douanières et cambiaires en vertu des articles 351 et 451 du Code des douanes ;
Qu'en effet, les dispositions de l'article 358 du dernier de ces Codes, qui instituent des règles spéciales de compétence en ce qui concerne les juridictions appelées à connaître des infractions douanières constatées par procès-verbal de saisie sont étrangères à la constatation et à la recherche des infractions douanières et cambiaires par les agents de l'administration des Douanes, et que les procès-verbaux de ladite Administration, lorsqu'ils émanent d'agents compétents, comme en l'espèce, constituent des actes d'instruction et de poursuite, interruptifs comme tels de la prescription ;
Que le moyen n'est donc pas fondé ;
Sur le second moyen de cassation pris de la violation des articles 358 du Code des douanes, 203 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale :
" en ce que la cour d'appel s'est reconnue compétente pour statuer sur l'ensemble des faits soumis à son appréciation ;
" aux motifs propres que le délit de détention illicite de devises étrangères est indissociable du délit de l'exportation de moyens de paiement sans déclaration, que la plus étroite connexité dont l'article 358 du Code des douanes n'exclut pas l'application, existe entre ces deux infractions qui procèdent de la même volonté du prévenu de ne pas respecter la réglementation des relations financières avec l'étranger et que le fait pour X... d'avoir été trouvé porteur de la clef de son coffre à Genève-Cointrin " permet de localiser au lieu de l'interpellation la commission de l'infraction " ;
" alors que, d'une part, l'article 358 du Code des douanes prévoit que les instances résultant d'infractions douanières constatées par procès-verbal de saisie sont portées devant le tribunal dans le ressort duquel est situé le bureau des Douanes le plus proche du lieu de la constatation de l'infraction ; que cet article institue des règles de compétence exorbitantes du droit commun auxquelles il ne peut être dérogé ; qu'en l'espèce, le délit de détention illicite de devises étrangères n'a pu être consommé et constaté qu'à Paris, lieu de situation du coffre où ont été découvertes ces devises et, qu'en conséquence, le tribunal correctionnel de Paris avait une compétence exclusive pour statuer ;
" alors que, d'autre part, la connexité prévue par l'article 203 du Code de procédure pénale, même si elle avait pu être invoquée, ce qui est impossible en l'espèce, ne concerne que les infractions commises par plusieurs personnes distinctes ayant entre elles un lien résultant soit de l'unité de temps ou de lieu, soit de l'unité de dessein, soit encore d'une relation de cause à effet, mais ne peut concerner des infractions totalement distinctes même si elles ont été commises par le même auteur ; qu'il en est de même de l'unité de dessein inexistante entre les deux infractions poursuivies, l'une n'ayant pas été réalisée pour commettre l'autre, et ne constituant pas davantage une circonstance aggravante de l'autre ;
" alors qu'enfin, le seul fait d'avoir été trouvé porteur d'une clef de coffre dont l'origine illicite n'a jamais été invoquée, ne constitue pas un délit et ne peut, en conséquence, localiser le lieu de la commission d'une quelconque infraction " ;
Attendu que pour rejeter l'exception d'incompétence visant une infraction cambiaire commise à Paris et déclarer compétent le tribunal appelé à connaître d'une infraction de même nature commise dans son propre ressort et reprochée au même prévenu, les juges du second degré, qui se sont prononcés par les motifs reproduits au moyen lui-même, ont notamment retenu que les agents des Douanes ont constaté le 7 janvier 1982, lors de l'interpellation initiale de X..., que le coffre-fort ne pouvait être ouvert qu'au moyen de la clef qui venait d'être saisie, et que l'article 358 du Code des douanes n'excluait pas les règles de connexité ;
Attendu qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a fait l'exacte application tant des dispositions de l'article 358 du Code des douanes que de l'article 203 du Code de procédure pénale applicable selon l'alinéa 2 de l'article 358 précité dès lors que le tribunal correctionnel de Bourg-en-Bresse était compétent pour connaître de l'une des deux infractions constatée par le procès-verbal de saisie ;
Qu'en effet, les dispositions de l'article 203 précité ne sont pas limitatives et s'étendent aux cas dans lesquels, comme en l'espèce, il existe entre les faits des rapports étroits analogues à ceux que la loi a spécialement prévus ;
Que le moyen doit donc être écarté ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 87-81745
Date de la décision : 26/07/1988
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

1° CHANGES - Procédure - Action publique - Extinction - Prescription - Interruption - Procès-verbaux.

1° ACTION PUBLIQUE - Extinction - Prescription - Interruption - Acte d'instruction ou de poursuite - Procès-verbal - Procès-verbal des Douanes 1° DOUANES - Procédure - Action publique - Extinction - Prescription - Interruption - Procès-verbaux 1° PRESCRIPTION - Action publique - Interruption - Acte d'instruction ou de poursuite - Procès-verbaux - Procès-verbaux des agents des Douanes.

1° Les dispositions de l'article 358 du Code des douanes qui instituent des règles spéciales de compétence en ce qui concerne les juridictions appelées à connaître des infractions douanières constatées par procès-verbal de saisie sont étrangères à la constatation et à la recherche des infractions douanières et cambiaires par les agents de l'administration des Douanes. Les procès-verbaux de l'administration des Douanes, lorsqu'ils émanent d'agents compétents, constituent des actes d'instruction et de poursuite, interruptifs comme tels de la prescription, au sens des articles 7 et 8 du Code de procédure pénale, déclarés applicables aux infractions douanières et cambiaires en vertu des articles 351 et 451 du Code des douanes.

2° CHANGES - Procédure - Tribunal correctionnel - Saisine - Etendue - Connexité - Cas - Cas visés à l'article 203 du Code de procédure pénale.

2° CONNEXITE - Cas - Cas visé à l'article 203 du Code de procédure pénale - Domaine d'application.

2° Les dispositions de l'article 203 du Code de procédure pénale relatives à la connexité sont applicables en matière de douanes et de changes par application de l'article 358, alinéa 2, du Code des douanes. Le tribunal correctionnel compétent pour connaître d'une infraction douanière constatée par procès-verbal de saisie par application de l'article 358, alinéa 1er, dudit Code est compétent pour connaître de toute autre infraction douanière, dès lors qu'il existe entre lesdits faits des rapports étroits analogues à ceux que l'article 203 du Code de procédure pénale a spécialement prévus.


Références :

Code de procédure pénale 203
Code de procédure pénale 7, 8
Code des douanes 351, 358, 451
Code des douanes 358 al. 1

Décision attaquée : Cour d'appel de Lyon, 18 février 1987

CONFER : (1°). Chambre criminelle, 1969-02-18 , Bulletin criminel 1969, n° 84, p. 210 (rejet) ;

Chambre criminelle, 1977-12-12 , Bulletin criminel 1977, n° 394, p. 1048 (rejet) ;

Chambre criminelle, 1983-11-29 , Bulletin criminel 1983, n° 323, p. 826 (rejet). CONFER : (2°). Chambre criminelle, 1981-11-12 , Bulletin criminel 1981, n° 302, p. 793 (rejet et cassation partielle).


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 26 jui. 1988, pourvoi n°87-81745, Bull. crim. criminel 1988 N° 305 p. 828
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 1988 N° 305 p. 828

Composition du Tribunal
Président : Président :M. Berthiau, conseiller doyen faisant fonction
Avocat général : Avocat général :M. Cochard
Rapporteur ?: Rapporteur :M. Hébrard
Avocat(s) : Avocats :la SCP Waquet et Farge, la SCP Boré et Xavier

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1988:87.81745
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award