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13/04/1988 | FRANCE | N°86-15524

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 13 avril 1988, 86-15524


Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 12 mai 1986), que l'hebdomadaire " Jours de France " a publié, en septembre 1983, accompagnées d'un court texte de présentation, deux photographies de l'ancienne impératrice d'Iran Mme Farah X... en costume de bain, dont l'une la montrait en conversation dans un jardin et l'autre sur des rochers, une canne à pêche à la main ; que la cour d'appel a condamné la société " Jours de France " à payer à Mme Farah X... 150 000 francs de dommages-intérêts pour atteinte à sa vie privée et au droit qu'elle possède sur son image ; qu'elle a, en out

re, condamné la société Gamma et l'agence Angeli, qui avaient vend...

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 12 mai 1986), que l'hebdomadaire " Jours de France " a publié, en septembre 1983, accompagnées d'un court texte de présentation, deux photographies de l'ancienne impératrice d'Iran Mme Farah X... en costume de bain, dont l'une la montrait en conversation dans un jardin et l'autre sur des rochers, une canne à pêche à la main ; que la cour d'appel a condamné la société " Jours de France " à payer à Mme Farah X... 150 000 francs de dommages-intérêts pour atteinte à sa vie privée et au droit qu'elle possède sur son image ; qu'elle a, en outre, condamné la société Gamma et l'agence Angeli, qui avaient vendu les photographies litigieuses à la société " Jours de France ", à garantir celle-ci du paiement de la moitié des dommages-intérêts mis à sa charge ;

Sur le premier moyen, pris en sa première branche :

Attendu que la société " Jours de France " fait grief à l'arrêt de s'être ainsi prononcé, alors, selon le moyen, que la protection de la vie privée et le droit à l'image sont régis par la loi personnelle de l'intéressée, c'est-à-dire par sa loi nationale ou, pour les apatrides, par celles de son domicile, et qu'en s'abstenant, en présence de conclusions contestant l'applicabilité de la loi française, de rechercher quels étaient la nationalité ou le domicile de Mme Farah X..., éléments qui commandaient la détermination de la loi applicable, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 3 du Code civil ;

Mais attendu que les conséquences de l'atteinte à la vie privée d'une personne ou de la violation du droit qu'elle possède sur son image relèvent de la loi du lieu où ces faits ont été commis ;

D'où il suit que le moyen est sans portée ;

Sur le premier moyen, pris en sa seconde branche :

Attendu que la société " Jours de France " fait également grief à l'arrêt d'avoir jugé, en violation de l'article 9 du Code civil, que les clichés incriminés " ne ressortissaient pas à la vie publique " de Mme Farah X..., alors que l'étendue de la vie publique d'une personnalité dépend des fonctions qu'elle assume ;

Mais attendu qu'après avoir exactement retenu qu'un monarque avait, comme toute autre personne, droit au respect de sa vie privée et pouvait s'opposer à toute diffusion de son image dès lors qu'elle ne le représentait pas dans l'exercice de la vie publique, la cour d'appel a pu déduire de la nature même des photographies litigieuses que celles-ci reproduisaient des moments de la vie privée de Mme Farah X... ;

D'où il suit que, pris en sa seconde branche, le moyen n'est pas davantage fondé ;

Sur le second moyen :

Attendu que la société " Jours de France " fait encore grief à l'arrêt d'avoir limité la garantie de la société Gamma et de l'agence Angeli à la moitié des dommages-intérêts alloués à Mme Farah X..., alors, selon le moyen, que le commerçant qui vend des photographies à une entreprise de presse en vue de leur publication est tenu de lui fournir des clichés dont l'usage ne présente pas un caractère illicite et que, dans ces conditions, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 1147 du Code civil en prononçant un partage de responsabilité, sans expliquer quelle faute contractuelle la société " Jours de France " avait commise envers ses fournisseurs en omettant de s'assurer du consentement du modèle représenté sur les photographies litigieuses ;

Mais attendu que la cour d'appel a légalement justifié sa décision en retenant qu'eu égard à la personnalité du sujet et à la nature des clichés, la société " Jours de France " avait, en les publiant sans s'assurer elle-même du consentement de Mme Farah X..., commis une faute personnelle qui était pour partie à l'origine de l'obligation de réparation dont elle demandait à être garantie ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 86-15524
Date de la décision : 13/04/1988
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

1° PROTECTION DES DROITS DE LA PERSONNE - Respect de la vie privée - Atteinte - Loi applicable - Loi locale.

1° CONFLIT DE LOIS - Protection des droits de la personne - Respect de la vie privée - Atteinte - Loi applicable - Loi locale 1° PROTECTION DES DROITS DE LA PERSONNE - Respect de la vie privée - Droit à l'image - Atteinte - Loi applicable - Loi locale 1° CONFLIT DE LOIS - Protection des droits de la personne - Droit à l'image - Atteinte - Loi applicable - Loi locale.

1° Les conséquences de l'atteinte à la vie privée d'une personne ou de la violation du droit qu'elle possède sur son image relèvent de la loi du lieu où ces faits ont été commis .

2° PROTECTION DES DROITS DE LA PERSONNE - Respect de la vie privée - Application - Personnalité officielle.

2° PROTECTION DES DROITS DE LA PERSONNE - Respect de la vie privée - Droit à l'image - Définition - Personnalité officielle - Droit de s'opposer à toute diffusion de son image ne la représentant pas dans l'exercice de sa vie publique.

2° Un monarque a, comme toute autre personne, droit au respect de sa vie privée et peut s'opposer à toute diffusion de son image dès lors qu'elle ne le représente pas dans l'exercice de la vie publique


Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 12 mai 1986


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 13 avr. 1988, pourvoi n°86-15524, Bull. civ. 1988 I N° 98 p. 67
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1988 I N° 98 p. 67

Composition du Tribunal
Président : Président :M. Ponsard
Avocat général : Avocat général :M. Charbonnier
Rapporteur ?: Rapporteur :M. Grégoire
Avocat(s) : Avocat :M. Roue-Villeneuve .

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1988:86.15524
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