Sur les trois moyens réunis, pris en leurs diverses branches :
Attendu que la société Les Editions Salabert, cessionnaire des droits patrimoniaux de Charles Z... sur la chanson " Douce France ", dont il a écrit la musique et les paroles, a demandé aux juges du fond de condamner Thierry X..., Bernard Y... et la société WEA-Filipacchi Music, éditeur de disques, à réparer le préjudice à elle causé par " la prétendue parodie " de cette chanson sous le titre " Douces transes ", écrite par Bernard Y... et constituant, selon elle, une adaptation illicite de " Douce France ", et d'interdire sous astreinte la représentation, la reproduction et l'exploitation de cette adaptation, en particulier sous la forme du disque " Le Triomphe de Thierry X... à Marigny " ; que l'arrêt confirmatif attaqué (Paris, 15 octobre 1985) a rejeté ces demandes au motif essentiel que " Douces transes " constituait une parodie autorisée par l'article 41-4° de la loi du 11 mars 1957 ;
Attendu que la société Les Editions Salabert reproche d'abord à la cour d'appel d'avoir ainsi statué alors que, selon la définition qu'en donne du reste l'arrêt attaqué, la parodie consiste en un travestissement comique de l'oeuvre originale et ne doit pas s'en prendre à la personnalité même de l'auteur de cette oeuvre ; qu'ayant relevé que Thierry X... avait au contraire reproduit sans aucun travestissement la musique de la chanson originale de Charles Z... et y avait joint des paroles brocardant certains éléments prêtés à la personnalité de celui-ci, les juges du second degré n'auraient pas tiré les conséquences légales de leurs propres constatations et auraient violé l'article 41-4° de la loi du 11 mars 1957 ; qu'en un second moyen, il est soutenu, d'une part, que la cour d'appel s'est contredite en se référant, pour rechercher quelle était la loi du genre, dont ce texte prescrit de tenir compte, aux spectacles d'imitation donnés par Thierry X... lui-même, lesquels, comme l'avait relevé le jugement confirmé, consistaient précisément en reproductions intégrales de la musique d'oeuvres originales, accompagnées de paroles prenant pour cibles les auteurs de ces oeuvres ; que le même moyen prétend, d'autre part, que l'arrêt attaqué viole la loi du 11 mars 1957 en ce qu'il a attribué à Thierry X... la faculté de déterminer librement la loi d'un genre ; qu'enfin, selon le troisième moyen, la cour d'appel ne pouvait pas, sans violer les articles 48 et suivants de ladite loi, interdire comme elle a fait à l'éditeur titulaire des droits patrimoniaux de Charles Z... de tirer argument de l'atteinte éventuellement portée à la personne de celui-ci, cet éditeur étant au contraire en droit d'invoquer le caractère illicite d'une oeuvre qui, sous le couvert de la notion de parodie, est dirigée contre la personnalité de l'auteur de l'oeuvre originale et ne correspond donc pas aux lois du genre ;
Mais attendu que l'article 41-4° de la loi du 11 mars 1957 autorise notamment la parodie et la caricature ; qu'il est dans les lois du genre de la première, qui se distingue en cela du pastiche, de permettre l'identification immédiate de l'oeuvre parodiée, et dans celles de la seconde de se moquer d'un personnage par l'intermédiaire de l'oeuvre caricaturée dont il est l'auteur ; qu'il ne saurait dès lors être interdit au chansonnier-imitateur qui prend la voix de l'auteur-interprète d'une chanson et se livre en même temps à une parodie et à une caricature, de reproduire la musique originale de sorte que l'oeuvre parodiée est immédiatement identifiée tandis que le travestissement des seules paroles suffit à réaliser celui de cette oeuvre prise dans son ensemble et à empêcher toute confusion, ni de se moquer le cas échéant avec insolence des travers de celui qui est imité ;
Attendu que, sans se contredire, la cour d'appel a donc pu retenir que le spectacle de " Douces Transes " constituait une parodie et une caricature au sens de l'article 41-4° de la loi de 1957 ; qu'à bon droit elle a considéré que dans la mesure où il en résulterait pour l'auteur de " Douce France " une atteinte diffamatoire, seul celui-ci serait recevable à s'en plaindre ;
Que l'arrêt attaqué est donc légalement justifié et qu'aucun des griefs formulés ne saurait être accueilli ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi