Attendu, selon les énonciations des juges du fond, que M. François X..., aviculteur, a perdu en juin 1978 de nombreux canetons provenant de deux lots livrés, le premier par la société SOCOM Charloux (SC), et le second par la société Corlay ; qu'il a assigné ces deux fournisseurs, ainsi que les sociétés BVT Guyomarc'h (BVT) et Braud, auprès desquelles il se procurait les aliments destinés à l'engraissement de ces animaux, et M. Yves Y..., vétérinaire, à qui il avait fait appel lors de la maladie ayant provoqué la mort des canetons, en responsabilité et en réparation de son préjudice ; que la cour d'appel (Rennes, 5 juin 1985) a dit que les accords verbaux conclus entre M. X... et les sociétés BVT et Braud s'analysaient en des contrats d'intégration, a prononcé l'annulation de ces contrats pour non-respect des prescriptions de la loi du 6 juillet 1964, a dit qu'après remise des parties dans leur état antérieur aux contrats nuls, M. X... restait créancier de ses fournisseurs d'aliments pour une somme de 65 834,12 francs dont il y avait lieu de déduire les créances de ces derniers, a condamné les sociétés BVT et Braud à payer à M. X... le solde lui restant dû, a condamné M. X... à payer à la société Corlay la somme de 19 083 francs représentant le montant de sa livraison de canetons, a débouté la société SOCOM Charloux de ses demandes, a condamné cette dernière à payer à M. X... une somme de 25 000 francs à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi à la suite d'une livraison de canetons malades, et a mis hors de cause M. Y... ; .
Sur le premier moyen du pourvoi principal des sociétés BVT et Braud :
Attendu que ces sociétés reprochent à l'arrêt attaqué d'avoir qualifié les conventions passées entre elles et M. X... de contrats d'intégration, alors, selon le moyen, que ce dernier était un éleveur-commerçant et qu'en lui attribuant la qualité de producteur agricole tout en reconnaissant qu'il était commerçant, la cour d'appel a violé l'article 17-1 de la loi du 6 juillet 1964 ;
Mais attendu que, si les juges d'appel ont indiqué que l'activité de M. X... revêtait " un caractère commercial " dans la mesure où il achetait des animaux en lots importants pour les engraisser essentiellement avec des aliments eux-mêmes achetés, et pour les revendre en lots non moins importants, ils ont relevé qu'il travaillait " sur des produits agricoles " et qu'il ne se bornait pas à " un achat pour une revente en l'état comme des marchands de bestiaux " ; qu'ils ont pu dès lors considérer qu'il était un " producteur agricole " au sens de la loi précitée ; que le moyen n'est donc pas fondé ;
Sur le second moyen du même pourvoi, pris en ses deux branches :
Attendu que les sociétés BVT et Braud reprochent encore à l'arrêt attaqué d'avoir, pour tirer les conséquences de la nullité des contrats d'intégration et, en particulier, pour liquider la créance de M. X..., accordé à celui-ci la rémunération, sur la base d'un salaire horaire augmenté des charges sociales, du travail qu'il avait dû accomplir pour exécuter les contrats nuls, alors, selon le moyen, d'une part, que le contrat d'intégration est un contrat d'entreprise, ce qui exclut, en cas de nullité, l'obligation pour le fabricant d'aliments de restituer à l'éleveur la prestation de travail qu'il a accomplie pour exécuter le contrat nul et qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé les articles 17-1 et suivants de la loi du 6 juillet 1964 ; et alors, d'autre part, que, la nullité du contrat d'intégration emportant avec elle l'obligation pour chacune des parties de restituer à l'autre partie, en nature si cela est possible, sinon en valeur, les prestations fournies et les avantages retirés du contrat nul, la cour d'appel, en s'abstenant de constater que M. X... avait accompli le travail nécessaire pour l'exécution du contrat annulé en vertu d'une obligation que ce contrat stipulait, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 17-1 précité ;
Mais attendu que la cour d'appel a exactement reconnu à l'éleveur le droit à la valeur des prestations fournies au titre du travail effectué pour exécuter les contrats annulés sans qu'intervienne dans le domaine des restitutions la nature de ces contrats ; que, contrairement à ce que soutient le moyen, la cour d'appel a souverainement estimé que le mode de calcul par elle adopté devait procurer à M. X... la contrepartie de la valeur de ses peines et soins directement liés à l'exécution de ces contrats ;
D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses deux branches ;
Sur le moyen unique du pourvoi provoqué de la société SOCOM Charloux, pris en ses deux branches :
Attendu que la société SOCOM Charloux reproche à l'arrêt attaqué de l'avoir condamnée à payer des dommages-intérêts à M. X... en réparation de son préjudice résultant de la maladie (réovirose) dont étaient atteints les canetons qu'elle lui avait livrés, alors, selon le moyen, d'une part, que le vice caché ne donnant lieu à la résolution de la vente que s'il est antérieur au contrat, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1641 du Code civil en s'étant bornée à affirmer, en dépit de deux expertises ayant conclu que rien ne permettait de considérer que la réovirose s'était transmise " verticalement " par l'intermédiaire de l'oeuf, que M. X... n'était pas responsable de la propagation de cette maladie dans le lot de canetons de la société SOCOM Charloux, tout en constatant qu'elle se transmettait " horizontalement " par la proximité et que la contagion du lot de la société Corlay par le lot de la société SOCOM Charloux était due à la méconnaissance par M. X... des règles d'hygiène ; et alors, d'autre part, qu'en relevant que la réovirose se transmettait par la voie " horizontale " lorsque l'éleveur ne respectait pas les règles d'hygiène, ce qui était le cas en l'espèce puisque la maladie contractée par le lot de la société SOCOM Charloux s'était propagée
au lot de la société Corlay, puis en estimant que M. X... n'était pas responsable de la maladie ayant atteint le lot de la société SOCOM Charloux, la cour d'appel s'est contredite dans ses motifs ;
Mais attendu, d'abord, que la cour d'appel, qui n'était pas liée par les conclusions des experts, a, par motifs propres et adoptés, constaté que la réovirose affectait le lot de canetons de la société SOCOM Charloux au moment de sa livraison à M. X... ; qu'elle a déduit souverainement de ses constatations que cette maladie s'était introduite " verticalement " par l'intermédiaire de l'oeuf et non " horizontalement " par la proximité du fait des mauvaises conditions d'hygiène ;
Et attendu, ensuite, que c'est sans se contredire que la cour d'appel, après avoir écarté toute responsabilité de M. X... quant à l'introduction de la réovirose dans le lot de canetons livrés par la société SOCOM Charloux, a retenu la responsabilité de l'éleveur quant à la propagation de cette maladie par transmission " horizontale " au lot livré plus tard par la société Corlay en lui reprochant de n'avoir pas respecté les règles d'hygiène ;
D'où il suit qu'en aucune de ses deux branches, le moyen n'est fondé ;
Sur l'application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile :
Attendu que la demande formulée de ce chef par M. X... contre la société BVT a été présentée plus de deux mois après la signification du mémoire ampliatif de cette société, demanderesse au pourvoi principal, c'est-à-dire en dehors du délai prévu par l'article 982 du nouveau Code de procédure civile ; qu'elle est donc irrecevable ;
Attendu, par contre, qu'il serait inéquitable de laisser à la charge de M. X... les frais irrépétibles qu'il a pu engager en défense sur le pourvoi provoqué de la société SOCOM Charloux ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi principal des sociétés BVT Guyomarc'h et Braud et le pourvoi provoqué de la société SOCOM Charloux ;
DECLARE irrecevable la demande présentée par M. X... contre la société BVT Guyomarc'h sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile