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17/11/1987 | FRANCE | N°85-14431

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 17 novembre 1987, 85-14431


Attendu, selon les énonciations des juges du fond, que M. A..., qui avait créé un cabinet de kinésithérapie, a, par actes sous seing privé des 23 mai et 1er septembre 1977 - établis par M. X... -, autorisé M. Y..., M. Z... et les époux B..., également kinésithérapeutes, qui travaillaient déjà avec lui, à utiliser partie des locaux où il exerçait et s'est engagé à présenter à chacun d'eux une partie de sa clientèle, en leur remettant les fiches correspondantes, et à leur céder du matériel contre payement d'une somme de 100 000 francs ou de 130 000 francs ; que, par troi

s actes du 1er janvier 1978, il a, en qualité de gérant de la société Mé...

Attendu, selon les énonciations des juges du fond, que M. A..., qui avait créé un cabinet de kinésithérapie, a, par actes sous seing privé des 23 mai et 1er septembre 1977 - établis par M. X... -, autorisé M. Y..., M. Z... et les époux B..., également kinésithérapeutes, qui travaillaient déjà avec lui, à utiliser partie des locaux où il exerçait et s'est engagé à présenter à chacun d'eux une partie de sa clientèle, en leur remettant les fiches correspondantes, et à leur céder du matériel contre payement d'une somme de 100 000 francs ou de 130 000 francs ; que, par trois actes du 1er janvier 1978, il a, en qualité de gérant de la société Médic Télégraph, consenti un bail à chacun d'eux ; qu'enfin, le 8 novembre 1978, il a été créé entre ces praticiens une société civile de moyens ; que, le 5 décembre 1979, M. Y..., M. Z... et les époux B..., prétendant qu'il s'était agi de cessions illicites de clientèle et qu'il y avait indétermination de la chose vendue, ont assigné MM. A... et X... en nullité ou, subsidiairement, en résolution de ces actes et en remboursement des sommes versées ; qu'ils ont, en outre, demandé le payement de dommages-intérêts ; .

Sur le premier moyen, pris en ses deux branches :

Attendu que M. Y..., M. Z... et les époux B... reprochent à l'arrêt confirmatif attaqué de les avoir déboutés de leurs demandes, alors, selon le moyen, d'une part, qu'en déclarant qu'ils ne justifiaient d'aucun intérêt à voir prononcer la nullité ou, subsidiairement, la résiliation ou l'exécution des conventions, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles 31 et 125 du nouveau Code de procédure civile ; et alors, d'autre part, que le fait d'avoir constitué une société civile de moyens ne pouvait s'analyser en une renonciation à demander la nullité des actes litigieux ou, subsidiairement, leur résiliation ou leur exécution, même avec retard ; qu'en tout état de cause, M. Y..., M. Z... et les époux B... n'avaient pas pu renoncer à se prévaloir des manquements postérieurs de la part de M. A... ayant consisté à conclure le 2 avril 1979 avec M. C... des conventions identiques dont le but était d'installer un concurrent ;

Mais attendu que la cour d'appel relève, d'abord, qu'il n'est pas contesté que les contrats litigieux ont reçu exécution, à l'exception d'une transmission matérielle en mains propres à chacun des demandeurs des fiches le concernant, qui figuraient dans un fichier commun auquel tous les kinésithérapeutes ont accès et sont différenciées entre elles par leur couleur ; qu'elle énonce, ensuite, que l'exercice de leur profession s'est poursuivie pendant plusieurs années sans aucune protestation de leur part et a même été suivi par la signature sans réserves de l'acte constitutif d'une société civile de moyens et d'un règlement intérieur ; que, par ces motifs, la cour d'appel a souverainement estimé que M. Y..., M. Z... et les époux B... n'avaient pas d'intérêt à agir ;

Attendu, ensuite, que, de ces constatations et énonciations, les juges du second degré ont pu déduire que l'attitude observée par M. Y..., M. Z... et les époux B..., qui avaient poursuivi leur activité en commun avec M. A... conformément aux conventions conclues entre eux, révélait leur accord sur l'état de chose existant, caractérisant ainsi la manifestation non équivoque de leur part de renoncer à demander la nullité des actes litigieux ou, subsidiairement, leur résiliation ou exécution ; d'où il suit qu'en aucune de ses branches le moyen n'est fondé ;

Sur le deuxième moyen, pris en ses quatre branches :

Attendu qu'il est encore fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté M. Y..., M. Z... et les époux B... de leurs demandes en nullité des actes litigieux et en restitution des sommes versées, alors, selon le moyen, d'une part, que la cour d'appel, qui a constaté que M. A... avait entendu partager son activité avec ses confrères en s'engageant à les présenter à une partie seulement de sa clientèle, n'a pas tiré les conséquences juridiques qui en découlaient, à savoir que ces actes constitueraient une cession partielle de clientèle frappée d'une nullité d'ordre public ; alors, d'autre part, qu'en constatant que ces actes ne comportaient pas de précision sur la fraction de clientèle à présenter la cour d'appel constatait par là même qu'il y avait indétermination quant à leur objet ; alors, de troisième part, qu'en relevant que la présentation de clientèle n'avait été qu'accessoire, l'arrêt a dénaturé les conventions litigieuses ; et alors, enfin, qu'il n'a pas été répondu aux conclusions soutenant qu'à supposer que la mise à disposition des locaux ait dû être considérée comme la cause déterminante des actes litigieux et la présentation à une partie de la clientèle un simple accessoire, les conventions étaient nulles pour défaut de cause dès lors que M. Y..., M. Z... et les époux B... étaient, depuis plusieurs années, locataires des lieux ;

Mais attendu que la cour d'appel, qui a recherché quelle avait été la commune intention des parties en concluant les conventions litigieuses, retient souverainement que celles-ci permettaient à M. Y..., à M. Z... et aux époux B... d'exercer leur activité dans un centre médical important et en expansion où ils pouvaient se créer une clientèle personnelle plus facilement qu'en s'installant à titre individuel et que la cause déterminante de ces conventions ne résidait pas dans le nombre de clients à présenter et la transmission de leurs fiches - ce qui excluait nécessairement toute cession prohibée de clientèle - ; qu'ainsi, les juges du second degré, qui n'étaient pas tenus de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, ont, sans dénaturer les conventions, légalement justifié leur décision ; d'où il suit qu'en aucune de ses quatre branches, le moyen n'est fondé ;

Sur le troisième moyen, pris en ses deux branches :

Attendu qu'il est également reproché à l'arrêt d'avoir débouté M. Y..., M. Z... et les époux B... de leurs demandes en résiliation des conventions ou, subsidiairement, en condamnation de M. A... à les exécuter et à réparer le dommage par eux subi, alors, selon le moyen, d'une part, que la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, selon lesquelles la remise des fiches de la clientèle qui constituait l'une des obligations de M. A... n'était plus possible, en ne prononçant pas la résiliation des conventions ou, à défaut, la réparation du préjudice subi du fait de ce manquement ; et alors, d'autre part, qu'en relevant qu'il n'était pas contesté que les contrats avaient été exécutés, à l'exception de la remise des fiches, l'arrêt a dénaturé les conclusions soutenant que l'obligation de présentation à partie de sa clientèle par M. A... n'avait pas été non plus exécutée ;

Mais attendu que la cour d'appel ayant souverainement estimé que la remise des fiches ne constituait pas la cause déterminante des conventions et que celles-ci se trouvaient, d'ailleurs, à la disposition des kinésithérapeutes dans un fichier où elles étaient identifiables pour chacun d'eux, a, par là même, décidé qu'aucun préjudice n'était établi, qu'ainsi, hors toute dénaturation, la cour d'appel a légalement justifié sa décision au regard des chefs critiqués ; d'où il suit que le moyen n'est pas mieux fondé que les précédents ;

Sur le quatrième moyen :

Attendu qu'il est enfin soutenu que la cassation de l'arrêt en ce qui concerne les demandes dirigées contre M. A... doit entraîner, par voie de conséquence, celle de l'arrêt en ce qu'il a débouté M. Y..., M. Z... et les époux B... de leur action en responsabilité contre M. X..., en tant que rédacteur des actes litigieux ;

Mais attendu que le rejet du pourvoi en ce qu'il est dirigé contre M. A... rend ce moyen sans objet ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 85-14431
Date de la décision : 17/11/1987
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

PROFESSIONS MEDICALES ET PARAMEDICALES - Médecin chirurgien - Auxiliaires médicaux - Masseur kinésithérapeute - Cabinet de groupe - Création - Droit de présentation à la clientèle - Présentation de chacun des membres du groupe à une partie de la clientèle

* PROFESSIONS MEDICALES ET PARAMEDICALES - Médecin chirurgien - Auxiliaires médicaux - Masseur kinésithérapeute - Libre choix par la clientèle - Atteinte - Création d'un cabinet de groupe - Présentation de chacun des membres à une partie de la clientèle (non)

Les juges du fond justifient leur décision refusant d'annuler, pour cession prohibée de clientèle, la convention par laquelle, moyennant le paiement d'une somme d'argent, un kinésithérapeute autorise les confrères avec lesquels il a formé un cabinet de groupe à utiliser partie des locaux où il travaille et s'engage à présenter à chacun d'eux une partie de sa clientèle en leur remettant les fiches correspondantes et à leur céder du matériel, dès lors que, recherchant la commune intention des parties, ils retiennent souverainement que cet accord permet aux intéressés d'exercer leur activité dans un centre médical important où ils peuvent se créer une clientèle plus facilement qu'en s'installant à titre individuel et que la cause déterminante de la convention ne réside pas dans le nombre de clients à présenter et la transmission de leurs fiches - ce qui exclut nécessairement toute cession prohibée de clientèle .


Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 07 mars 1985

A RAPPROCHER : Chambre civile 1, 1985-01-08 , Bulletin 1985, I, n° 9, p. 9 (rejet)

arrêt cité.


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 17 nov. 1987, pourvoi n°85-14431, Bull. civ. 1967 I N° 300 p. 215
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1967 I N° 300 p. 215

Composition du Tribunal
Président : Président :M. Fabre
Avocat général : Avocat général :M. Dontenwille
Rapporteur ?: Rapporteur :M. Viennois
Avocat(s) : Avocats :la SCP Nicolas, Massé-Dessen et Georges, la SCP Guiguet, Bachellier et Potier de la Varde, la SCP Boré et Xavier .

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1987:85.14431
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