Sur le premier moyen :
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué (Rouen, 21 mars 1985) que la Société navale des chargeurs X... Vieljeux (société Delmas Vieljeux) a effectué le transport, sur le navire " Lucie X... ", de Matadi (Zaïre) au Havre, de trois conteneurs " déclarés contenir 769 sacs de café vert " ; qu'après déchargement de la marchandise, des manquants ont été constatés dans l'un des conteneurs ; que la compagnie d'assurance Securitas Bremer Allgemeine Versicherungs (la compagnie d'assurance) se présentant en qualité de subrogée dans les droits de son assuré M. Y..., a assigné la société Delmas Vieljeux et le capitaine commandant le navire, afin d'obtenir la réparation du préjudice causé par cette perte ;
Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt d'avoir déclaré recevable l'action ainsi engagée, alors, selon le pourvoi, que la recevabilité de l'action du destinataire réel de la marchandise contre le transporteur est subordonnée à la condition que le connaissement fasse apparaître la qualité de destinataire réel de l'intéressé ; d'où il suit qu'en se bornant à relever, s'agissant des énonciations portées sur le connaissement, que M. Y... figurait sous la rubrique " notify to ", ce qui ne suffisait pas à en faire le destinataire réel des marchandises, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles 3 de la convention de Bruxelles du 25 août 1924 et 27 de la loi du 18 juin 1966 ;
Mais attendu que la cour d'appel a relevé que M. Y..., mentionné sous la rubrique " notify to " était le destinataire réel de la marchandise et que la société Soyer-Devaux, dernier porteur du connaissement qu'elle avait accompli, était un transitaire chargé de réceptionner la marchandise pour le compte du destinataire réel ; que la cour d'appel a pu déduire de ces constatations que la compagnie d'assurance, subrogée dans les droits de M. Y..., était recevable en son action ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen, pris en ses trois branches :
Attendu qu'il est encore fait grief à l'arrêt d'avoir accueilli la demande de la compagnie d'assurance, alors, selon le pourvoi, que, d'une part, les réserves émises par le transporteur sur le connaissement sont valables, quelle que soit leur forme, et dégagent la responsabilité du transporteur, dès lors qu'elles ne concernent que des mentions facultatives du connaissement ; d'où il suit qu'après avoir relevé le caractère facultatif des mentions, apposées sur le connaissement, relatives aux marchandises situées dans le conteneur plombé, la cour d'appel ne pouvait, sauf à omettre de tirer de ses propres constatations les conséquences en résultant légalement, s'abstenir d'énoncer que la réserve " conteneur déclaré contenir " dégageait la responsabilité de la société Delmas Vieljeux s'agissant des marchandises manquantes ; qu'ainsi l'arrêt a été rendu en violation des articles 27 de la loi du 18 juin 1966, 36 du décret du 31 décembre 1966, 3-3° et 3-6° de la convention de Bruxelles du 25 août 1924 ; alors que, d'autre part, s'agissant d'un transport soumis à la convention de Bruxelles du 25 août 1924 sur le connaissement, la responsabilité du transporteur est dégagée, quoique la réserve émise sur le connaissement n'ait pas été spécialement motivée, dès lors qu'en fait le transporteur a eu une raison sérieuse
de douter de l'exactitude des déclarations du chargeur quant au contenu des conteneurs ; qu'ainsi, en s'abstenant de rechercher si l'apposition sur le connaissement, par la société Delmas Vieljeux, de la réserve " conteneur déclaré contenir ", n'avait pas été motivée par le fait que le transporteur avait une raison sérieuse de soupçonner le chargeur d'avoir inexactement désigné les marchandises transportées, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 3 de la convention précitée et alors, enfin, que s'agissant d'un transport soumis à la convention de Bruxelles du 25 août 1924 sur le connaissement la responsabilité du transporteur est dégagée, quoique la réserve émise sur le connaissement n'ait pas été spécialement motivée, dès lors qu'en fait le transporteur n'a pas eu les moyens raisonnables de vérifier la conformité du contenu des conteneurs aux énonciations du connaissement ; qu'ainsi, en s'abstenant de rechercher si l'apposition sur le connaissement, par la société Delmas Vieljeux, de la réserve " conteneur déclaré contenir " n'avait pas été motivée par le fait que le transporteur n'avait pas eu les moyens raisonnables de vérifier le contenu des conteneurs transportés, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 3 de la convention précitée ;
Mais attendu que la société Delmas Vieljeux n'a soutenu dans ses conclusions devant la cour d'appel ni que le connaissement mentionnait des réserves excluant sa responsabilité à raison de manquants, ni qu'elle avait une raison sérieuse de douter de l'exactitude des déclarations du chargeur, ni qu'elle n'avait pas eu les moyens raisonnables de les vérifier ; d'où il suit que le moyen, nouveau et mélangé de fait et de droit, est irrecevable ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi