Attendu que, selon l'arrêt attaqué (Paris, 8 novembre 1984), la Société de produits alimentaires et diététiques (société SOPAD) a demandé la condamnation pour concurrence déloyale par copie d'étiquettes de la société Etablissements Ducros et Fils (société Ducros), fabricante d'une gelée, et de la société Villette, distributrice de ce produit ; .
Sur le premier moyen, pris en ses diverses branches :
Attendu que la société Ducros et la société Villette font grief à la cour d'appel d'avoir accueilli la demande alors que, selon le pourvoi, d'une part, l'action en concurrence déloyale nécessite, pour être accueillie, que les étiquettes litigieuses soient la copie servile de celles de la société Ducros ; qu'en se bornant à relever une simple ressemblance entre les étiquettes, la cour d'appel a violé l'article 1382 du Code civil, alors que, d'autre part, les premiers juges avaient déclaré la demande mal fondée au motif que l'étiquette incriminée n'était utilisée que pour les présentations en boîte de 1 kg, à l'exclusion des autres présentations ; que les sociétés Ducros et Villette, qui sollicitaient la confirmation du jugement entrepris s'étaient appropriées ce moyen et soulignaient, au surplus, l'identité de couleur (rouge et jaune) et de graphisme que présentaient depuis 19 ans tous les nombreux produits de la gamme Ducros, qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen qui était de nature à établir l'absence de tout risque de confusion entre la gelée Maggi et la gelée Ducros, cette dernière appartenant à une importante gamme de produits présentant les mêmes couleurs, graphisme, sigle et marque, la cour d'appel a violé les dispositions de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile, alors qu'en outre, les sociétés Ducros et Villette faisaient encore valoir que le sigle en forme de flèche et la marque Ducros étaient très clairement apposés sur les produits ; qu'en s'abstenant également de répondre à ce moyen, la cour d'appel a encore méconnu les exigences de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile, et alors qu'enfin, eu égard au moyen par lequel les sociétés Ducros et Villette faisaient valoir, dans leurs conclusions d'appel ainsi que les premiers juges l'avaient constaté sans être contredits par la société SOPAD, que les produits litigieux étaient vendus à une clientèle de professionnels, donc d'acheteurs particulièrement avertis, la cour d'appel ne pouvait se borner à relever que les ressemblances existant entre les étiquettes étaient de nature à créer " dans l'esprit d'une clientèle moyennement avertie et attentive " un risque de confusion ; que faute d'avoir recherché si un tel risque existait auprès des professionnels de la restauration et de l'alimentation, ou, à tout le moins, si les produits étaient effectivement destinés, en l'espèce, à une clientèle pouvant être qualifiée de moyennement avertie et attentive, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;
Mais attendu en premier lieu qu'une action en concurrence déloyale fondée sur la ressemblance des étiquettes des deux produits peut être accueillie sans qu'il soit nécessaire que ces étiquettes soient la copie servile les unes des autres ; que sans avoir à répondre au moyen inopérant selon lequel la similitude prétendue n'existait que pour la présentation des boîtes de un kilogramme des gelées des deux sociétés et après avoir rejeté les allégations de la société Ducros qui prétendait utiliser depuis des années les mêmes teintes de jaune et de rouge, la cour d'appel, après avoir comparé les étiquettes litigieuses, a constaté l'existence d'un risque de confusion ; que par cette dernière constatation elle a rejeté le moyen relatif au sigle en forme de flèche et à la marque Ducros ainsi que les conclusions faisant valoir une similitude de graphisme sur tous les produits de la gamme Ducros ;
Attendu, en second lieu, que la cour d'appel relevant que les premiers juges avaient eux-mêmes déclaré seulement réduit le risque de confusion compte tenu du caractère de la clientèle en cause, a souverainement apprécié ce risque pour les clients concernés ; d'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
Sur le second moyen :
Attendu qu'il est également fait grief à la cour d'appel d'avoir dit que la société Villette avait commis des actes de concurrence déloyale alors que, selon le pourvoi, la seule connaissance par un distributeur de la reproduction, par un fabricant, de l'étiquette d'un concurrent, ne saurait caractériser la faute constitutive de la concurrence déloyale, que la cour d'appel a violé l'article 1382 du Code civil ;
Mais attendu qu'après avoir retenu que cette société, distributeur de produits alimentaires, n'avait pu ignorer que l'étiquette de la société SOPAD était reproduite, la cour d'appel a pu conclure que la société Villette, en distribuant de la gelée Ducros portant l'étiquette critiquée, avait commis des actes engageant sa responsabilité ; d'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi