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10/02/1987 | FRANCE | N°85-12074

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 10 février 1987, 85-12074


Sur le premier moyen :

Attendu que la société La Brocherie, qui exploite une discothèque, ainsi que le syndic de la liquidation de ses biens, reprochent à l'arrêt confirmatif attaqué (Rouen, 24 janvier 1985) d'avoir rejeté leur demande en référé tendant à la mainlevée et subsidiairement au cantonnement d'une saisie-contrefaçon pratiquée par la Société des auteurs compositeurs et éditeurs de musique, dite SACEM ; que, selon le pourvoi, la saisie-contrefaçon ne peut être ordonnée qu'à la demande de l'auteur lui-même ou de ses ayants droit, que la SACEM, simple organ

isme de gestion financière, n'aurait eu qualité pour requérir une saisie au...

Sur le premier moyen :

Attendu que la société La Brocherie, qui exploite une discothèque, ainsi que le syndic de la liquidation de ses biens, reprochent à l'arrêt confirmatif attaqué (Rouen, 24 janvier 1985) d'avoir rejeté leur demande en référé tendant à la mainlevée et subsidiairement au cantonnement d'une saisie-contrefaçon pratiquée par la Société des auteurs compositeurs et éditeurs de musique, dite SACEM ; que, selon le pourvoi, la saisie-contrefaçon ne peut être ordonnée qu'à la demande de l'auteur lui-même ou de ses ayants droit, que la SACEM, simple organisme de gestion financière, n'aurait eu qualité pour requérir une saisie au nom des auteurs que si elle avait démontré être cessionniaire de leur droit d'exploitation, et qu'il résultait au contraire de ses écritures qu'elle n'avait agi qu'en tant que mandataire de sociétés d'auteurs étrangères dont certaines seulement sont titulaires des droits de leurs membres, les autres n'en étant elles-mêmes que les mandataires, de sorte que la cour d'appel aurait violé les articles 65 et 66 de la loi du 11 mars 1957 ;

Mais attendu qu'en reconnaissant aux organismes professionnels d'auteurs tels que la SACEM, visés à l'alinéa 2 de l'article 43 de la loi du 11 mars 1957, la " qualité pour ester en justice pour la défense des intérêts dont ils ont statutairement la charge ", l'alinéa 2 de l'article 65 de ladite loi leur a notamment donné le pouvoir de demander la saisie-contrefaçon prévue et organisée par les articles 66 et suivants du même texte, lorsque les oeuvres appartenant à leur répertoire sont représentées sans leur consentement ; que le moyen doit donc être écarté ;

Sur le deuxième moyen :

Attendu qu'il est encore prétendu que, la société La Brocherie s'étant bornée à programmer des disques, et un phonogramme ne constituant pas une oeuvre de l'esprit suceptible de contrefaçon, la cour d'appel aurait violé les articles 1er, 3, 27, 28 et 66 de la loi du 11 mars 1957 ;

Mais attendu que s'il faut distinguer l'oeuvre que constitue l'enregistrement lui-même et l'oeuvre de l'esprit qui fait l'objet de cet enregistrement, l'article 27 de la loi du 11 mars 1957 dispose que la représentation de celle-ci consiste notamment dans sa communication au public par voie de diffusion des paroles, des sons ou des images " par quelque procédé que ce soit ", et donc en particulier par le disque ; que le moyen n'est pas mieux fondé que le précédent ;

Sur le troisième moyen, pris en ses trois branches :

Attendu que, selon le pourvoi, les recettes dont la saisie-contrefaçon peut être autorisée s'entendant seulement du profit retiré de la contrefaçon, la cour d'appel aurait violé l'article 66 de la loi du 11 mars 1957 en maintenant la saisie qui avait été pratiquée sur la totalité des recettes des établissements exploités par La Brocherie ; qu'il est également soutenu qu'elle aurait derechef violé ce texte ainsi que les articles 48 et suivants du Code de procédure civile en s'efforçant de justifier ladite mesure par la prétendue créance de la SACEM, alors que la saisie-contrefaçon est essentiellement différente de la saisie conservatoire de droit commun ; que le moyen invoque enfin une violation des articles 1101 et suivants et 1315 du Code civil, 48 et suivants du Code de procédure civile et 66 de la loi du 11 mars 1957, celui qui réclame l'exécution d'une obligation devant la prouver et la SACEM, en l'absence de tout contrat avec La Brocherie, n'ayant aucun droit, contrairement à ce qu'a décidé la cour d'appel, à " une somme égale aux redevances qui auraient été payées si un contrat avait été conclu " ;

Mais attendu que, tant par motifs propres qu'adoptés, la cour d'appel a énoncé qu'il ne s'agissait pas pour elle de fixer le montant de l'indemnité due à la SACEM en réparation de son préjudice mais de se prononcer quant à la mainlevée ou au cantonnement d'une saisie présentant les caractères d'une mesure conservatoire et portant sur les " recettes " d'une unique soirée ; que l'arrêt attaqué se trouve ainsi légalement justifié, abstraction faite du motif selon lequel les " recettes " visées par l'article 66 de la loi du 11 mars 1957 ne s'entendraient pas des seuls bénéfices, et sans qu'il puisse y avoir violation des articles 48 et suivants du Code de procédure civile ; que le moyen doit donc être écarté en ses deux premières branches ; qu'il doit l'être également en sa dernière, la cour d'appel ne s'étant référée " aux redevances qui auraient été payées si un contrat avait été conclu " qu'à titre d'élément d'appréciation ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 85-12074
Date de la décision : 10/02/1987
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

1° PROPRIETE LITTERAIRE ET ARTISTIQUE - Action en justice - Qualité - SACEM - Protection des droits d'auteur - OEuvres appartenant à son répertoire - Reproduction non autorisée - Saisie-contrefaçon.

ACTION EN JUSTICE - Qualité - Propriété littéraire et artistique - Organismes de défense professionnelle - Défense des intérêts dont ils ont statutairement la charge - Société des auteurs - compositeurs et éditeurs de musique - OEuvres appartenant à leur répertoire * SAISIES - Saisie-contrefaçon - Qualité pour agir - Propriété littéraire et artistique - Protection des droits d'auteur - SACEM * CONTREFAçON - Saisie - Loi du 11 mars 1957 - Qualité pour agir - Société des auteurs - compositeurs et éditeurs de musique - OEuvres appartenant à leur répertoire - Réprésentation non autorisée.

1° Les organismes professionnels d'auteurs, tels que la Société des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique (SACEM), ont qualité pour ester en justice pour la défense des intérêts dont ils ont statutairement la charge. Ils ont, notamment, le pouvoir de demander la saisie-contrefaçon prévue et organisée par les articles 66 et suivants de la loi du 11 mars 1957 lorsque les oeuvres appartenant à leur répertoire sont représentées sans leur consentement .

2° PROPRIETE LITTERAIRE ET ARTISTIQUE - Droits d'auteur - Droit de représentation - Définition - Diffusion de l'oeuvre par le disque.

2° La diffusion par le disque constitue la représentation d'une oeuvre de l'esprit au sens de l'article 27 de la loi du 11 mars 1957 qui vise, notamment, la communication de l'oeuvre au public par voie de diffusion des paroles, des sons ou des images " par quelque procédé que ce soit " .

3° PROPRIETE LITTERAIRE ET ARTISTIQUE - Contrefaçon - Saisie - Objet - Exploitant de discothèque - Diffusion d'oeuvres de l'esprit en violation des droits d'auteur - Recettes - Recettes d'une seule soirée - Possibilité.

CONTREFAçON - Propriété littéraire et artistique - Saisie - Nature - Mesure conservatoire * SAISIES - Saisie-contrefaçon - Autorisation - Rétractation - Refus - Pouvoirs du juge des référés - Propriété littéraire et artistique - Discothèque - Diffusion d'oeuvres sans autorisation - Saisie de la recette d'une soirée.

3° En énonçant qu'elle est saisie non d'une demande en fixation du montant de l'indemnité due à la Société des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique (SACEM) en réparation du préjudice subi du fait de la diffusion, par l'exploitant d'une discothèque, d'oeuvres de l'esprit en violation des droits d'auteur, mais d'une demande tendant à la mainlevée ou au cantonnement d'une saisie-contrefaçon présentant les caractères d'une mesure conservatoire et portant sur les " recettes " d'une unique soirée, une cour d'appel justifie légalement sa décision maintenant la saisie, abstraction faite du motif selon lequel les " recettes " visées par l'article 66 de la loi du 11 mars 1957 ne s'entendraient pas des seuls bénéfices


Références :

Code civil 1101, 1315
Code de procédure civile 48

Décision attaquée : Cour d'appel de Rouen, 24 janvier 1985


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 10 fév. 1987, pourvoi n°85-12074, Bull. civ. 1987 I N° 49 p. 36
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1987 I N° 49 p. 36

Composition du Tribunal
Président : Président :M. Fabre
Avocat général : Avocat général :M. Charbonnier
Rapporteur ?: Rapporteur :M. Raoul Béteille
Avocat(s) : Avocats :M. Ryziger et la SCP Riché, Blondel et Thomas-Raquin .

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1987:85.12074
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