Sur le moyen unique, pris en ses trois branches :
Vu l'article 2, alinéa 1er, du décret n° 71-941 du 26 novembre 1971 et les articles 1317 et 1319 du Code civil ;
Attendu qu'aux termes du premier de ces textes, les notaires ne peuvent recevoir des actes dans lesquels leurs parents ou alliés en ligne directe à tous les degrés et en ligne collatérale jusqu'au degré d'oncle ou de neveu inclusivement sont parties ; que le second définit l'acte authentique comme étant celui qui a été reçu par un officier public ayant le droit d'instrumenter dans le lieu où l'acte a été rédigé, et avec les solennités requises ; qu'il résulte du troisième que l'acte authentique fait pleine foi de la convention qu'il renferme entre les parties contractantes et leurs héritiers ou ayants cause jusqu'à inscription de faux ;
Attendu que, par acte du 24 juin 1957 passé en la forme authentique et reçu en l'étude de M. A..., notaire à Rougé, Mme Y..., veuve X..., a fait donation à ses cinq enfants de la nue-propriété, d'une part, des droits lui revenant sur les immeubles dépendant de la communauté ayant existé entre elle et son mari décédé et, d'autre part, de ses immeubles propres ; qu'aux termes de la donation-partage, la totalité des immeubles a été attribuée à son fils Augustin X... qui, depuis la mort de son père, assurait seul la marche de l'exploitation viticole familiale, à charge par lui de payer une soulte de 900 000 anciens francs à chacune de ses soeurs, Mme Marie X..., épouse D..., Mme Elisabeth X..., veuve B..., Mme Annick X..., épouse Z..., et Mme Joséphine X..., épouse C..., la donatrice se réservant l'usufruit de tous ses biens, évalué à 500 000 anciens francs ; qu'après le décès de cette dernière, Mme Joséphine X..., épouse C..., a assigné ses frère et soeurs en nullité de l'acte du 24 juin 1957 ;
Attendu que, par arrêt confirmatif du 9 janvier 1985, la cour d'appel de Rennes a prononcé la nullité dudit acte au motif que, s'il avait bien été reçu par M. A..., notaire à Rougé, il avait en réalité été entièrement conçu et rédigé par M. Z..., notaire à Châteaubriant, époux de l'une des donataires, M. A... n'ayant fait que le signer en l'étude de son confrère et sans remplir sa mission légale et notamment son rôle de conseil, et qu'il apparaissait ainsi que, pour éviter l'interdiction légale qu'il encourait, M. Z... avait utilisé M. A... comme prête-nom en fraude à la loi ;
Attendu cependant, d'une part, qu'aucune disposition légale n'imposant comme condition à l'authenticité d'un acte de donation-partage que le notaire instrumentaire soit le négociateur et le rédacteur de l'acte qu'il reçoit, ni M. Z... en établissant l'acte litigieux, ni M. A... en recevant cet acte, n'ont transgressé la prohibition de l'article 2, alinéa 1er, du décret du 26 novembre 1971 ; que, d'autre part, l'énonciation dans l'acte que la donation-partage avait été passée devant M. A..., notaire à Rougé, qui l'avait reçue en son étude, et qui contient les affirmations d'usage au nom de ce notaire, ne pouvait être combattue que par la procédure d'inscription de faux ;
D'où il suit qu'en statuant comme elle a fait, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE l'arrêt rendu, le 9 janvier 1985, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Angers