Attendu, selon les énonciations de l'arrêt attaqué (Paris, 12 juillet 1984), que la Southern Pacific Properties Ltd (SPP) et la Southern Pacific Properties (Middle East) Ltd (SPPME), sociétés dont le siège est à Hong-Kong, ont, le 12 décembre 1974, signé un contrat avec un organisme public égyptien, Egyptian General Organization for Tourism and Hotels (EGOTH), en vue de la création de deux centres touristiques, dont l'un situé à proximité du site des pyramides de Gizeh, contrat portant, outre la signature des parties, celle du ministre égyptien du tourisme, précédée de la mention " approved, agreed and ratified " ; que par la suite, le plateau des pyramides fut classé par l'autorité administrative compétente dans le domaine public des antiquités, ce qui entraîna l'arrêt des travaux et l'annulation du projet ; .
Attendu que, se prévalant de la clause compromissoire inscrite au contrat, la SPP et la SPPME ont saisi la Cour d'arbitrage de la Chambre de commerce internationale (CCI) ; que l'acte de mission, établi le 3 mai 1980 conformément au règlement de cette cour d'arbitrage, a précisé que le siège de l'arbitrage serait à Paris et a constaté les réserves expresses de la République d'Egypte au sujet de la compétence du tribunal arbitral ; que, cependant, par une sentence du 13 février 1983, ce tribunal a écarté l'exception soulevée et, mettant hors de cause EGOTH, a condamné la République d'Egypte à payer à la SPPME la somme de 12 500 000 dollars des Etats-Unis à titre de dommages-intérêts ;
Attendu que la cour d'appel, saisie du recours en annulation prévu par l'article 1504 du nouveau Code de procédure civile, combiné avec l'article 1502, 1°, du même Code, et retenant que la sentence avait été prononcée sans compromis à l'égard de la République arabe d'Egypte, a annulé cette sentence ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la SPP et la SPPME soutiennent que la cour d'appel, saisie d'un recours en annulation fondé sur l'absence de convention d'arbitrage, ne pouvait contrôler que la violation ouverte ou la dénaturation de cette convention, la juridiction arbitrale restant souveraine pour interpréter celle-ci, et que ladite cour d'appel ne pouvait donc remettre en cause cette interprétation pour apprécier elle-même s'il avait été statué hors compromis ;
Mais attendu que, si la mission de la cour d'appel, saisie en vertu des articles 1502 et 1504 du nouveau Code de procédure civile, est limitée à l'examen des vices énumérés par ces textes, aucune limitation n'est apportée au pouvoir de cette juridiction de rechercher en droit et en fait tous les éléments concernant les vices en question ; qu'en particulier, il lui appartient d'interpréter le contrat pour apprécier elle-même si l'arbitre a statué sans convention d'arbitrage ; que le moyen n'est donc pas fondé ;
Sur le deuxième moyen, pris en ses deux branches :
Attendu qu'il est reproché à la cour d'appel d'avoir dénaturé l'acte de mission des arbitres, aux termes duquel, selon le moyen, la République d'Egypte n'avait décliné l'arbitrage que jusqu'à la sentence finale, ce qui signifierait qu'elle n'entendait pas remettre en cause la décision des arbitres statuant sur leur propre compétence, et de n'avoir pas répondu aux conclusions des sociétés faisant valoir que cet acte de mission constituait un compromis sur la compétence, et non sur le fond ;
Mais attendu que la cour d'appel, répondant ainsi aux conclusions, a estimé, sans dénaturation, d'une part, que la convention d'arbitrage ne pouvait être constituée que par la clause compromissoire insérée au contrat du 12 décembre 1974, et non par l'acte de mission dont l'objet était seulement de définir les points litigieux et, d'autre part, que l'acte de mission, dans lequel la République d'Egypte soutenait qu'il n'y avait pas de convention d'arbitrage, ne pouvait tenir la place de celle-ci ; qu'en aucune de ses branches le moyen n'est donc fondé ;
Sur le troisième moyen :
Attendu que les deux sociétés reprochent encore à la cour d'appel, qui a dénié à la signature du ministre égyptien du Tourisme précédée de la mention " approved, agreed and ratified ", apposée sur le contrat du 12 décembre 1974, la valeur d'un engagement de l'Etat égyptien, de n'avoir pas tiré les conséquences légales de ses constatations au regard des principes et usages du commerce international ;
Mais attendu qu'il n'appartient pas à la Cour de Cassation de contrôler l'existence et l'application des principes et usages du commerce international ; que le moyen n'est donc pas recevable ;
Et sur le quatrième moyen, pris en ses deux branches :
Attendu que le pourvoi reproche enfin à la cour d'appel de n'avoir pas recherché si, dans le même contrat du 12 décembre 1974, EGOTH, à la supposer dotée d'une personnalité juridique autonome, n'avait pas agi en représentation de l'Etat égyptien, ce qui constituerait à la fois une violation du contrat, qui employait le mot " ratified ", et un défaut de réponse à conclusions ;
Mais attendu que le passage invoqué des conclusions ne soutenait pas clairement la thèse présentée aujourd'hui à la Cour de Cassation et n'appelait pas de réponse sur cette prétendue volonté de représenter l'Etat égyptien ; que l'ambiguïté des termes précédant la signature du ministre appelait une interprétation, que la cour d'appel a donnée en disant qu'il s'agissait seulement de l'intervention d'une autorité de tutelle ; qu'ainsi, en aucune de ses branches, ce moyen ne peut pas davantage être accueilli ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi