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09/12/1986 | FRANCE | N°85-12684

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 09 décembre 1986, 85-12684


Sur le premier moyen, pris en ses deux branches :

Attendu, selon les énonciations des juges du fond, que la société Le Casino a, en 1969, confié à la société Lesoeur l'exécution de travaux de chaudronnerie à réaliser dans une chocolaterie lui appartenant ; que, le 27 juin 1969, la société Lesoeur a été déclarée en règlement judiciaire et que M. X... a été désigné comme syndic ; qu'elle a cependant été autorisée à poursuivre son activité ; que, le 6 janvier 1970, elle a, ayant été placée en liquidation de ses biens, cessé ses activités ; que les travaux du

chantier, qui lui avaient été confiés par la société Le Casino, ont été achevés par...

Sur le premier moyen, pris en ses deux branches :

Attendu, selon les énonciations des juges du fond, que la société Le Casino a, en 1969, confié à la société Lesoeur l'exécution de travaux de chaudronnerie à réaliser dans une chocolaterie lui appartenant ; que, le 27 juin 1969, la société Lesoeur a été déclarée en règlement judiciaire et que M. X... a été désigné comme syndic ; qu'elle a cependant été autorisée à poursuivre son activité ; que, le 6 janvier 1970, elle a, ayant été placée en liquidation de ses biens, cessé ses activités ; que les travaux du chantier, qui lui avaient été confiés par la société Le Casino, ont été achevés par la société CME ;

Attendu que des désordres étant apparus en 1973, il a été jugé par la cour d'appel de Lyon que la responsabilité en était imputable à concurrence de 70 % à l'entreprise Lesoeur, de 10 % à la société CME et de 20 % à une autre société ; qu'elle a cependant mis hors de cause la compagnie d'assurances MGFA, assureur de la société Lesoeur, au motif que la police d'assurance ne couvrait les conséquences de la garantie décennale que pour les seuls travaux achevés avant qu'elle ait été résiliée et qu'elle l'avait été, en la circonstance, à la date du 30 décembre 1969 ;

Attendu que la société Le Casino a alors assigné le syndic de la liquidation des biens de la société Lesoeur devant la cour d'appel de Chambéry en soutenant qu'il était responsable de cette situation ; qu'elle a relevé à cet égard que c'est à la date du 13 novembre 1970, donc postérieurement à l'achèvement des travaux, lesquels avaient fait l'objet, le 3 août 1970, d'un procès-verbal de réception, que le syndic a demandé et obtenu la résiliation de la police et ce rétroactivement à compter du 31 décembre 1969, plaçant ainsi par son fait les travaux effectués hors de la garantie qu'elle prévoyait ; que la cour d'appel a estimé que la garantie aurait été acquise sans cette rétroactivité intempestive et condamné M. X... à payer à la société Le Casino une somme égale au montant des indemnités dont la compagnie d'assurances aurait été redevable envers elle si le contrat avait joué ;

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir ainsi statué, alors, d'abord, qu'après avoir énoncé que la police d'assurance prévoyait la garantie de l'assureur pour les travaux achevés au cours de sa période de validité non seulement par l'assuré lui-même mais par ses sous-traitants, il aurait dénaturé une lettre de M. X... du 10 juin 1970, qui se bornait à constater l'achèvement des travaux par la société CME et réclamait le versement de la retenue de garantie, en l'interprétant comme établissant que cette société était la " sous-traitante " de la société Lesoeur ; alors, ensuite, qu'en énonçant que " de toutes façons " le syndic poursuivant l'activité de l'entreprise aurait dû " procéder à des démarches pour que la CME, qui terminait les travaux, obtienne la garantie de l'ensemble de l'ouvrage ", sans rechercher si ces démarches auraient été nécessairement couronnées de succès, la cour d'appel n'aurait pas caractérisé l'existence d'un lien de causalité entre la faute prétendument commise et le préjudice constaté ;

Mais attendu, d'abord, que M. X... avait prétendu que l'entreprise CME avait été chargée directement par la société Le Casino d'achever les travaux ; que cette société avait soutenu, au contraire, que ladite entreprise n'était qu'une sous-traitante de la société Lesoeur ; que c'est sans encourir le grief de dénaturation que les juges d'appel ont souverainement estimé que la lettre du 10 juin 1970, qui réclamait au bénéfice de " la liquidation des biens Lesoeur " le paiement, consécutif à l'achèvement des travaux par l'entreprise CME, fournissait la preuve du bien-fondé de cette dernière thèse ; qu'ensuite, après avoir énoncé qu'en résiliant rétroactivement la police d'assurance, M. X... avait privé la société Le Casino d'une garantie qui, sans cela, lui était acquise, c'est par une affirmation surabondante qu'ils ont ajouté que de toutes façons il lui aurait appartenu de faire le nécessaire pour qu'une garantie existât jusqu'à la fin du chantier ; que le moyen n'est donc fondé en aucune de ses branches ;

Sur le second moyen, pris en ses trois branches :

Attendu qu'il est encore fait grief à la cour d'appel d'avoir retenu que le plafond de la garantie résultant du contrat d'assurance, s'il s'était appliqué, aurait été de 2 000 000 francs au motif que la police souscrite à l'origine et qui comportait un plafond moindre aurait été modifiée en application des accords passés entre les compagnies d'assurances et la Fédération nationale du bâtiment, alors, en premier lieu, que le contrat d'assurance ne pouvant être modifié que par l'accord des parties qui l'ont signé, la cour d'appel n'aurait pas dit en quoi ces accords engageaient la MGFA et la société Lesoeur dont elle n'a même pas recherché si elle avait adhéré à cette Fédération, alors, en second lieu, qu'elle aurait inexactement affirmé que cette augmentation du montant du plafond n'aurait pas été contestée par le syndic, et alors, enfin, qu'elle n'aurait pas pu tirer argument de l'article 20 du cahier des charges relatif aux travaux que devait exécuter la société Lesoeur pour la société Le Casino, et qui imposait à cette société une police comportant une garantie minimum de deux millions pour en déduire, une convention passée entre deux parties étant sans effet à l'égard des tiers, que le contrat d'assurance signé par la société Lesoeur avait été modifié en conséquence ;

Mais attendu que la cour d'appel a, en dehors de considérations surabondantes, expressément constaté que, dans ses propres écritures devant la cour, la MGFA, auprès de laquelle la société Le Casino avait contracté sa police d'assurance, n'avait pas contesté que le " plafond " de garantie eût été porté à son égard à deux millions, plafond " qui était donc celui qui résultait de la convention des parties elles-mêmes et donnait la mesure du préjudice causé, indépendamment de la contestation de ce " plafond " par le syndic ; qu'elle a, par ce seul motif, justifié légalement sa décision ; que le moyen n'est donc fondé en aucune de ses branches ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 85-12684
Date de la décision : 09/12/1986
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

RESPONSABILITE DELICTUELLE OU QUASIDELICTUELLE - Faute - Faillite, règlement judiciaire, liquidation des biens - Syndic - Assurance responsabilité - Police - Résiliation - Résiliation rétroactive - Dommages résultant de travaux réalisés avant la résiliation

* RESPONSABILITE DELICTUELLE OU QUASIDELICTUELLE - Lien de causalité avec le dommage - Faillite, règlement judiciaire, liquidation des biens - Assurance responsabilité - Police - Résiliation par le syndic - Résiliation rétroactive - Travaux dommageables réalisés avant la résiliation

* REGLEMENT JUDICIAIRE, LIQUIDATION DES BIENS (loi du 13 juillet 1967) - Syndic - Responsabilité - Faute - Assurance responsabilité - Police - Résiliation - Résiliation rétroactive - Travaux réalisés avant la résiliation - Garantie - Exclusion

Le syndic d'une société en liquidation des biens ayant résilié, avec effet rétroactif, un contrat d'assurance, de sorte que des travaux réalisés par la société avant la résiliation s'étaient trouvés exclus de la garantie de l'assureur, justifie légalement sa décision la cour d'appel qui retient que ce syndic avait privé un client de la société, victime de désordres apparus dans les travaux, d'une garantie qui, sans la résiliation de la police, lui aurait été acquise, et le condamne à payer à la victime une somme égale au montant des indemnités dont l'assureur aurait été redevable envers elle si le contrat d'assurance avait joué. .


Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Chambéry, 18 février 1985


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 09 déc. 1986, pourvoi n°85-12684, Bull. civ. 1986 I N° 294 p. 279
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1986 I N° 294 p. 279

Composition du Tribunal
Président : Président :M. Fabre
Avocat général : Avocat général :Mme Flipo
Rapporteur ?: Rapporteur :M. Jouhaud
Avocat(s) : Avocats :la SCP Desaché et Gatineau et M. Le Prado .

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1986:85.12684
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