Sur le moyen unique, pris en ses trois branches :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Lyon, 21 mars 1985), que la société Manufrance a bénéficié de la suspension provisoire des poursuites, étant alors redevable d'une certaine somme envers la Société nationale des chemins de fer français (SNCF), celle-ci étant de son côté sa débitrice ; qu'après l'homologation du plan d'apurement collectif du passif, les deux sociétés sont convenues de porter leurs opérations ultérieures en compte courant ; qu'après exécution partielle du plan, la société Manufrance a été mise en règlement judiciaire, le compte courant faisant alors apparaître un solde créditeur en sa faveur ; que la SNCF a produit au passif du règlement judiciaire après avoir opéré compensation entre sa dette en compte courant et le reliquat de sa créance ayant donné lieu à moratoire ; que tout en contestant la production ainsi établie, la société Manufrance et les syndics de la procédure collective ont assigné la SNCF en paiement de sa dette en compte courant ; que la SNCF a opposé la compensation légale qui se serait opérée entre cette dette et sa créance résiduelle ;
Attendu qu'il est reproché à l'arrêt d'avoir écarté cette compensation et condamné la SNCF à payer la somme réclamée, alors, selon le pourvoi, d'une part, que le jugement qui prononce le règlement judiciaire rend exigibles toutes les dettes du débiteur concernées par cette mesure ; qu'il a donc nécessairement pour effet d'annuler ab initio la mesure de suspension provisoire des poursuites consentie au débiteur ; que la cour d'appel a violé l'article 37 de la loi du 13 juillet 1967, alors, d'autre part, que dans ses conclusions d'appel, la SNCF avait fait valoir que la compensation devait à tout le moins jouer pour celles des créances et dettes réciproques qui étaient exigibles antérieurement au jugement de suspension provisoire des poursuites ; que cette compensation avait d'ailleurs été prise en compte par la société Manufrance elle-même pour calculer la créance de la SNCF ; que la cour d'appel n'a donné aucune réponse à ce moyen, violant de ce fait l'article 455 du nouveau Code de procédure civile, et alors, enfin, que le jugement de suspension provisoire des poursuites ne peut être utilisé pour justifier le refus de la compensation légale entre des créances réciproques exigibles antérieurement à son prononcé ; qu'en en décidant autrement, la cour d'appel a violé l'article 1290 du Code civil ;
Mais attendu, en premier lieu, qu'après avoir énoncé à juste titre que la créance de la SNCF née antérieurement au jugement qui a prononcé la suspension provisoire des poursuites n'était plus exigible par suite du moratoire consenti lorsqu'est apparue la créance en compte courant de la société Manufrance, l'arrêt retient exactement que le jugement de règlement judiciaire n'a pas eu pour conséquence d'anéantir rétroactivement cet effet du moratoire ; que, dès lors, les dettes réciproques ne s'étant pas trouvées exigibles avant le prononcé du règlement judiciaire, c'est à bon droit que la cour d'appel a écarté la compensation invoquée ;
Attendu, en second lieu, qu'il résulte des propres écritures de la SNCF que la compensation entre les premières dettes réciproques a été prise en compte lors de la fixation de sa créance soumise à moratoire ; que l'arrêt constate que la demande en paiement formée à son encontre ne concerne que le montant du solde du compte courant ouvert après l'établissement du plan d'apurement ; qu'il s'ensuit qu'en accueillant cette demande, la cour d'appel n'a pas remis en cause la compensation légale opérée avant le jugement de suspension provisoire des poursuites et n'avait pas, dès lors, à répondre à des conclusions sans portée sur la solution du litige ;
Que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi