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12/11/1986 | FRANCE | N°85-11325

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 12 novembre 1986, 85-11325


Attendu, selon l'arrêt déféré et les pièces de la procédure, que la société Sogedis Voyages (société Sogedis) a souscrit en décembre 1978 une soumission cautionnée par laquelle elle s'engageait, à l'égard de l'administration des Douanes, à acquitter les droits de port pour les navires qui lui étaient consignés et que la Société Générale (la banque) a cautionné cet engagement ; que, le 30 janvier 1979, la société Sogedis a établi une déclaration relative aux droits de port concernant le navire Thérissos entré dans le port de Bastia le même jour, et a payé la " taxe

de jauge " ; que l'administration des Douanes a demandé à la société Sogedis...

Attendu, selon l'arrêt déféré et les pièces de la procédure, que la société Sogedis Voyages (société Sogedis) a souscrit en décembre 1978 une soumission cautionnée par laquelle elle s'engageait, à l'égard de l'administration des Douanes, à acquitter les droits de port pour les navires qui lui étaient consignés et que la Société Générale (la banque) a cautionné cet engagement ; que, le 30 janvier 1979, la société Sogedis a établi une déclaration relative aux droits de port concernant le navire Thérissos entré dans le port de Bastia le même jour, et a payé la " taxe de jauge " ; que l'administration des Douanes a demandé à la société Sogedis le paiement des droits pour le stationnement du navire dans le port de janvier à juillet 1979 et, après le refus de cette société, les a réclamés à la banque qui les a payés en sa qualité de caution ; que la société Sogedis s'est opposée à la demande de remboursement formée contre elle par la banque, en faisant valoir que la créance de l'Administration n'était pas fondée à son encontre, et que la banque a attrait l'administration des Douanes en la cause pour obtenir restitution des sommes versées au cas où la prétention de la société Sogedis serait accueillie ; que le tribunal de grande instance s'est déclaré incompétent pour statuer sur le bien-fondé de la créance de l'administration des Douanes envers la société Sogedis, au profit du tribunal d'instance, et a sursis à statuer sur la demande formée par la banque contre la société Sogedis jusqu'à décision sur la question préjudicielle ; que la banque a saisi le tribunal d'instance de sa demande dirigée contre l'administration des Douanes et que la société Sogedis est intervenue dans ce litige ; que, dans cette dernière instance, la cour d'appel, par l'arrêt infirmatif attaqué, a dit l'action de l'administration des Douanes prescrite à l'encontre de la société Sogedis, a dit que la banque avait payé les droits à tort et en a ordonné le remboursement ; .

Sur le premier moyen, pris en sa première branche :

Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt d'avoir décidé que la société Sogedis n'était pas débitrice des droits de port qui lui avaient été réclamés par l'administration des Douanes à raison du stationnement du navire Thérissos dans le port de Bastia, et en conséquence ordonné le remboursement à la banque du montant desdits droits qu'elle avait payés en qualité de caution de la société Sogedis, alors, selon le pourvoi, que le déclarant en douane est le seul et unique redevable de l'impôt ; qu'en l'espèce, il n'est pas contesté que la société Sogedis, en tant que consignataire de navire, a déposé le 30 janvier 1979 une déclaration en douane relative à la perception des droits de port ; qu'en estimant dès lors que cette société, malgré sa double qualité de consignataire et de déclarant en douane, n'était pas redevable de la taxe de stationnement du navire, la cour d'appel a violé les articles 95 du Code des douanes et 11 de la loi du 3 janvier 1969 ;

Mais attendu que, s'il résulte des dispositions des articles L. 211-1 et L. 211-4 du Code des ports maritimes que les droits de port sont perçus comme en matière de douane et que les infractions sont constatées et punies, les poursuites sont effectuées et les instances sont instruites et jugées comme en cette matière, ces dispositions n'ont pas pour effet de conférer aux droits de port la nature de droits de douane ; qu'il s'ensuit que la désignation du redevable procède des textes qui instituent les droits de port et en fixent les conditions d'application, et non des règles découlant de la nature propre des droits de douane ;

Attendu, dès lors, que l'arrêt a retenu à bon droit que le seul redevable des droits litigieux était l'armateur du navire et, après avoir constaté que l'administration des Douanes savait que la société Sogedis n'était pas le mandataire de l'armateur, en a déduit exactement que cette société n'était pas débitrice des droits réclamés ; que le moyen n'est donc pas fondé ;

Sur le premier moyen, pris en ses deuxième et troisième branches :

Attendu qu'il est encore fait grief à l'arrêt d'avoir décidé que dans la mesure où la société Sogedis aurait été redevable envers l'administration des Douanes de la taxe de stationnement du navire Thérissos, la réclamation judiciaire est intervenue après expiration du délai d'un an par lequel se prescrit l'action ouverte contre le consignataire d'un navire, et que l'action de l'Administration se trouvait donc prescrite, alors, selon le pourvoi, que, d'une part, l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties ; qu'en l'espèce, par deux lettres des 16 mai et 13 juillet 1979, l'administration des Douanes avait demandé à la société Sogedis de lui verser la somme de 45 405,44 francs représentant les droits de stationnement du navire ; qu'à la suite du refus opposé par cette société, l'Administration la réclama à la Société Générale qui s'était portée caution solidaire de la société Sogedis ; que la Société Générale a procédé au règlement à l'amiable de ces sommes ; qu'en déclarant que l'Administration avait formé une " réclamation judiciaire " pour en déduire que cette dernière était prescrite, la cour d'appel a dénaturé les termes du litige et violé l'article 4 du Nouveau Code de procédure civile et alors, d'autre part, que l'administration des Douanes dispose d'un délai de trois ans pour recouvrer les taxes et redevances composant les droits de port ; que l'arrêt attaqué a déclaré l'action fiscale prescrite motif pris de ce que l'Administration n'aurait pas agi contre le consignataire dans le délai d'un an ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé par refus d'application les articles 285-4 et 354 du Code des douanes ;

Mais attendu que, l'arrêt ayant décidé que la société Sogedis n'était pas débitrice des droits en cause, les motifs et le chef du dispositif déclarant l'action de l'Administration prescrite sont surabondants ; que les moyens critiquant ces motifs et ce chef du dispositif sont en conséquence inopérants ;

Sur le deuxième moyen :

Attendu qu'il est aussi fait grief à l'arrêt d'avoir condamné l'administration des Douanes à restituer à la banque la somme versée augmentée des intérêts au taux légal à compter de l'assignation, alors, selon le pourvoi, que les juges du fond ne peuvent fixer le point de départ des intérêts de l'indemnité qu'ils allouent à compter du jour de l'assignation que s'ils précisent que c'est à titre compensatoire ou de complément de dommages-intérêts ; que l'arrêt attaqué a ordonné que la restitution de la somme de 45 405,44 francs à la Société Générale soit augmentée des intérêts de droit à compter de l'assignation ; qu'en fixant ainsi le point de départ des intérêts à une date antérieure à leur décision sans préciser en quoi ces intérêts avaient un caractère compensatoire, les juges du fond n'ont pas donné de base légale à leur décision au regard de l'article 1153 du Code civil ;

Mais attendu que la répétition de l'indû est une institution commune au droit privé et au droit public internes, d'où il suit que la cour d'appel a considéré à bon droit que l'administration des Douanes était tenue au paiement des intérêts au taux légal à compter de l'assignation par laquelle était formée la demande de remboursement de taxes qu'elle avait perçues par erreur ; que le moyen n'est pas fondé ;

Mais, sur le troisième moyen :

Vu l'article 367 du Code des douanes ;

Attendu qu'aux termes de ce texte, en matière d'affaires de douane, en première instance et sur l'appel, l'instruction est verbale sur simple mémoire et sans frais de justice à répéter de part ni d'autre ;

Attendu qu'en condamnant le Trésor public aux dépens d'une instance relative aux droits de stationnement d'un navire dans un port maritime, alors qu'une telle instance est instruite et jugée comme en matière de douane, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, en ce qu'il a laissé les dépens à la charge du Trésor public, l'arrêt rendu le 17 décembre 1984, entre les parties, par la cour d'appel de Bastia ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 85-11325
Date de la décision : 12/11/1986
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

1° DROIT MARITIME - Port - Droits de port et de navigation - Droit de port - Nature juridique - Droits de douane (non).

DOUANES - Droits de port et de navigation - Droit de port - Redevable - Détermination - Textes les instituant - Application.

1° S'il résulte des dispositions des articles L. 211-1 et L. 211-4 du Code des ports maritimes que les droits de port sont perçus comme en matière de douane et que les infractions sont constatées et punies, les poursuites sont effectuées et les instances sont instruites et jugées comme en cette matière, ces dispositions n'ont pas pour effet de conférer aux droits de port la nature de droits de douane. Il s'ensuit que la désignation du redevable procède des textes qui instituent les droits de port et en fixent les conditions d'application, et non des règles découlant de la nature propre des droits de douane. .

2° PAIEMENT DE L'INDU - Restitution - Intérêts - Point de départ - Demande en justice - Taxes douanières.

PAIEMENT DE L'INDU - Domaine d'application - Taxes douanières * DOUANES - Droits - Remboursement de droits indûment acquittés - Intérêts - Point de départ - Demande en justice * INTERETS - Intérêt légal - Dette d'une somme d'argent - Point de départ - Demande en justice - Remboursement de taxes douanières perçues indûment.

2° La répétition de l'indû étant une institution commune au droit privé et au droit public internes, les juges du fond considèrent à bon droit que l'administration des douanes est tenue au paiement des intérêts au taux légal à compter de l'assignation par laquelle était formée une demande de remboursement de taxes qu'elle avait perçues par erreur. .

3° DROIT MARITIME - Port - Droits de port et de navigation - Droit de port - Navires de commerce - Taxe de stationnement - Procédure - Frais et dépens - Condamnation du Trésor public aux dépens (non).

DOUANES - Procédure - Frais et dépens - Condamnation du Trésor public aux dépens (non) * FRAIS ET DEPENS - Condamnation - Droit maritime - Droits de port et de navigation - Possibilité (non).

3° En matière d'affaires de douane, en première instance et sur l'appel, l'instruction est verbale sur simple mémoire et sans frais de justice à répéter de part ni d'autre. . Doit donc être cassée la décision condamnant le Trésor public aux dépens d'une instance relative aux droits de stationnement d'un navire dans un port maritime, une telle instance étant instruite et jugée comme en matière de douane.


Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Bastia, 17 décembre 1984

DANS LE MEME SENS : Sur le n° 2 : Cour de Cassation, chambre commerciale, 1980-12-16, bulletin 1980 IV N° 423 p. 339 (Cassation) et l'arrêt cité. A RAPPROCHER : Sur le n° 3 : Cour de Cassation, chambre commerciale, 1964-05-27, bulletin 1964 IV N° 278 (2) p. 239 (Cassation).


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 12 nov. 1986, pourvoi n°85-11325, Bull. civ. 1986 IV N° 206 p. 178
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1986 IV N° 206 p. 178

Composition du Tribunal
Président : Président :M. Baudoin
Avocat général : Avocat général :M. Cochard
Rapporteur ?: Rapporteur :M. Hatoux
Avocat(s) : Avocats :la société civile professionnelle Boré et Xavier, la société civile professionnelle Nicolas, Massé-Dessen et Georges et M. Célice .

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1986:85.11325
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